Lehman Brothers n’est pas morte
Le grand public croit que la banque d’investissement américaine Lehman Brothers est morte à la suite de sa faillite le 15 septembre 2008, après avoir déclaré 4 milliards de dollars de pertes pour le 3ème trimestre. Les médias et les explications mensongères des politiciens sur la crise sont là pour nous le faire croire. Mais Lehman Brothers n’a pas simplement disparu en laissant une ardoise de 107 millions de dollars à effacer d’un coup d’éponge. Quand les créanciers d’une dette s’appellent Goldman Sachs, JPMorgan Chase, Rothschild & Cie, Lazard, Barclays ou Salomon Brothers, les créances ne sont jamais effacées.
LAMCO
Il existe une obscure société d’Asset Management, inconnue du grand public, inconnue des médias, et dont site internet très sobre (pour ne pas dire cheap) est avare en informations, du nom de LAMCO. Legacy Asset Management Company, ou en Français : Société de Gestion d’Actifs Hérités. Merci pour l’héritage. LAMCO a été créée à la suite de la faillite de Lehman Brothers Holdings Inc. (LBHI). Quand LBHI a fait faillite, le groupe (activités, immobilier, mobilier, systèmes informatiques, etc) a été vendu à Barclays Capital et à Nomura Holdings, mais a dû conserver la majorité de ses actifs, dont les fameux actifs pourris que sont les CDO (obligations adossées à des crédits immobiliers non-garantis « subprime »).
C’est pour faire disparaître ces actifs que LAMCO a été créée. Si on était cyniques, on parlerait presque de blanchiment d’argent. Le but de l’opération n’est évidemment pas de rendre leur maison à ceux qui ont été expropriés, ni même de limiter les pertes des créditeurs, mais de maximiser les profits des créditeurs à partir d’actifs illiquides, dont personne ne veut car trop dangereux. Comment réaliser une telle prouesse ? Concrètement il s’agit de changer le packaging, d’envelopper la merde dans un joli papier cadeau, de re-titriser des actifs déjà titrisés au carré, et de s'en débarasser, avec le sourire. En 2008 on parlait de CDO², mais LAMCO nous concocte des CDO³³³. Bien entendu, tout cela finira comme toujours racheté par les Banques Centrales avec la planche à billets et les impôts du contribuable.
LBHI, un sacrifice lucratif et pas définitif
Le gouvernement américain ayant décidé de ne pas renflouer LBHI, le groupe a fait faillite puis a été racheté par Barclays. Cette dernière n’a pas racheté LBHI par charité talmudique chrétienne : Barlcays est créditrice du groupe, comme bien d’autres banques d’investissements.
Les liens entre les banques d’investissement, en apparence concurrente, sont connus depuis longtemps. On sait notamment que Lehman Brothers et Goldman Sachs ont collaboré dès le début du 20ème siècle pour créer General Cigar Co., Goodrich Co., et d’autres géants de l'industrie. On sait également que Goldman Sachs a vendu ses actions Lehman Brothers juste avant la chute de leur quotation en bourse. On sait enfin que c’est Henry Paulson, secrétaire au Trésor en 2008, qui a décidé de sauver Merill Lynch, AIG, Freddie Mac et Fannie Mae, et pas Lehman Brothers. Or Paulson est un ancien patron de Goldman Sachs, un ami de Lloyd Blankfein alors PDG de Goldman Sachs et de John Thain, un ancien de Goldman Sachs et patron de Merill Lynch. Quand on sait que c’est à Goldman Sachs qu’a été confiée la charge de la vente des Bons du Trésor du gouvernement américain après la crise de 2008 alors que LBHI était sa concurrente sur ce marché, on comprend pourquoi Pierre Jovanovic soupçonnait un délit d’initiés voire une escroquerie monumentale dans un article publié en 2009. Au jeu de la finance, quand les joueurs fixent les règles et se connaissent tous, les règles pour le citoyen lambda sont : « pile je gagne, face tu perds ».
Qui dit faillite dit évidemment licenciements. Pour la réceptionniste et la fille de la photocopieuse oui, mais évidemment pas pour les copains. Le PDG de LBHI, Richard « big dick » Severin Fuld a touché 37 millions de dollars l’année de la faillite, et a bien réussit sa reconversion dans des hedge funds et autres maisons de courtages New Yorkaises.
Certes, mais de là à soupçonner que la faillite de LBHI est une escroquerie...il n’y a qu’un pas. Le site internet de LAMCO nous apprend qu’ « il a été établi que la liquidation de ces actifs réduirait fortement le coût du rétablissement ». Faut-il comprendre que Lehman Brothers va renaître de ses cendres ? Est-ce la raison pour laquelle le titre LEH est toujours côté à New York sur le marché PNK ? Pour votre information, PNK signifie « Pink Sheets », c’est un marché non-régulé, opaque, regroupant des actions dont la valeur n’est pas déterminée par l’offre et la demande mais par le National Quotation Bureau, qui comme son nom ne l’indique pas, est une société privée.
Opacité Totale
Qui sait exactement ce qu’il y a dans le bilan de LBHI ? Outre des titrisations d’emprunts immobiliers non-garantis, la banque guerroyait évidemment avec tout l’arsenal financier moderne, dont les Swaps de gré-à-gré. Un Swap est un contrat financier entre deux institutions qui s’échangent ("to swap" en Anglais), pendant une période donnée, des flux financiers calculés par rapport à des taux d’intérêt (LIBOR, Euribor, OIS...), et qui ne sont ni standards ni contrôlés. Le fait qu’ils soient réalisés « de gré-à-gré » (on dit « OTC », pour over-the-counter) signifie qu’ils sont passés entre les deux institutions financières sans aucun contrôle des autorités financières ni des bourses. Quand LBHI a fait faillite, le groupe avait dans son bilan plus d’un million de contrats de type Swap qui avaient atteint leur maturité mais qui n’avaient pas encore été réglés ! Lorsqu’on sait qu’un seul contrat peut porter sur plusieurs centaines de millions de dollars, on imagine les sommes en jeu et on comprend que les créanciers ne laissent pas LBHI s’évaporer dans la nature.
Le reste du bilan de cette association de malfaiteurs est constitué de dérivés de crédit, les fameux CDS (des paris, déguisés en assurance, sur la faillite d’entreprises...et de pays), des dérivés sur produits agricoles et matières premières, des dérivés sur devises et sur actions, etc.
LBHI fait partie de ces banques qui titrisent, monétisent et mettent un prix à tout, absolument tout. En digne « héritière » de LBHI, LAMCO, qui, rappelons-le, a pourtant été créée uniquement pour liquider des actifs illiquides, a finalement décidé de reprendre des activités classiques de banque d’investissement, usant de tous les outils de l’escroquerie financière :
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Titrisation et restructuration d’actifs pourris à dissimuler et refourguer.
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Spéculation sur les produits dérivés. On peut en effet douter que LAMCO achète des bottes de foin et des rouleaux de cuivre pour se les faire livrer à son bureau de New York.
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Collateral Management : il s’agit d’investir le cash ou les actions qui ont été déposée en garantie (collateral) d’un contrat, de type Swap ou CDS, dans des actions ou des produits dérivés. En clair j’investis 100 euros, et comme la loi m’impose de déposer 9% du montant du contrat en garantie, je dépose 9 euros en liquide ou en actions, mais comme je n’aime pas l’argent qui dort j’investis ces 9 euros ailleurs. Et c’est légal.
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CVA : le Credit Valuation Adjustment est une arnaque ultra complexe inventée par des psychopathes qu’on appelle des « quants », ou ingénieurs financiers, qui consiste à monétiser le risque de contrepartie (risque de faillite de l’autre partie au contrat).
Dans le monde de la finance (qui ne finance que ses propres financement), Antoine Lavoisier a tout faux : Rien ne se perd, tout se crée, tout se monétise.
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