Les migrants et l’économie de leurs pays
Dans le but d’aider leurs familles dans leurs pays d’origine, les émigrés transfèrent chaque année des millions d’euros qui prennent ainsi place dans une économie informelle et peu visible mais malgré tout d’une importance indiscutable.
A titre de comparaison, l’aide de l’Union européenne au développement des pays ACP, le Xe FED (Fonds européen de développement) s’élèvera à 22, 98 milliards d’euros pour la période allant de 2008 à 2013. Cela représente au plus 4,6 milliards d’euros par an alors que dans le même temps, les transferts des migrants dans leurs pays d’origine sont eux, estimés à 24 milliards d’euros par an. Pour des pays dont de très nombreux ressortissants vivent à l’étranger, ces fonds constituent une part importante du produit national brut soit une fourchette allant de 21 à 60% selon les pays.
Ces « fonds de la migration » représentent 346% de l’aide publique au développement pour des pays comme les Comores et près de 200% au Kenya. On comprend dès lors pourquoi un pays comme le Mali a jugé utile de créer un ministère chargé des émigrés et pourquoi la totalité des pays de forte tradition d’immigration tergiversent et traînent les pieds lorsqu’il s’agit pour eux de prendre des mesures visant à restreindre le flux migratoire. En effet, si l’argent des émigrés constitue une part importante de la richesse nationale, on en déduit qu’il constitue de facto une part importante du dynamisme économique du pays et donc un sujet sur lequel on ne fait pas l’impasse du jour au lendemain, n’en déplaise aux fonctionnaires de l’Union européenne. Une étude de la BAD (Banque africaine de développement) a cependant montré que malgré son importance, les avis restent partagés sur l’impact de cette manne qui tombe de l’immigration.
Cette étude, en effet, révèle que 80% de cet apport est utilisé pour la consommation courante, 11% pour la construction et réalisation d’infrastructures diverses et moins de 1% pour des projets rémunérateurs. Il est indéniable que cet argent améliore la vie des plus pauvres mais d’autres estiment qu’il a des effets pervers sur la motivation au travail et sur la productivité agricole. Ces fonds induisent aussi une forte dépendance des familles et cela les pousse à économiser pour faire partir d’autres jeunes qui, à leur tour, enverront de l’argent au pays. Devenus les soutiens indispensables de leurs proches, ces exilés ne peuvent plus rentrer chez eux car alors tout s’effondrerait. Ce cercle vicieux est bien connu des pays sahéliens à forte migration.
Au bout du compte, ces transferts permettent à ceux qui sont restés chez eux de sortir du cercle de l’extrême pauvreté mais l’impact de l’argent des émigrés sur le développement du pays n’est pas évident. Les débats restent aussi ouverts que contradictoires pour la faune des intellectuels, mais pour les intéressés, il s’agit de trouver, à leur mesure, des réponses aux difficultés existentielles qui les accablent et qui s’accommodent mal de la rhétorique sans fin de ceux qui ont déjà le ventre plein.
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