Les pensions battent en retraite
Le Conseil d’Orientation des Retraites (COR) s’apprête à rendre avis préconisant un allongement supplémentaire de la durée de cotisation pour obtenir une pension à taux plein. Il ne s’agit pas, en réalité, pour cet organisme frileux et consensuel de jeter un pavé politique dans la mare aux sondages présidentiels quelques jours seulement après le report à 62 ans du départ officiel, mais d’appliquer « mathématiquement » une disposition de la loi Fillon de 2003 concernant l’indexation de la durée de cotisation sur la longueur de l’espérance de vie au delà de 60 ans (celle-ci ayant atteint 24,42 ans, soit près d'une année gagnée en quatre ans !).
Il est bien évident que ces « petites » mauvaises nouvelles successives ne constituent qu’un avant goût des grandes réformes radicales qui nous attendent d’ici à quelques années (3-5 ans), en attendant l’écroulement complet du système d’ici 7 à 10 ans. La cécité du public, aggravée par l’hypocrisie des politiques (électoralisme oblige !), dans ce domaine est comparable à celle qui prévaut pour les questions énergétiques. Dans les deux cas, la disette prochaine est calculable, donc prévisible, par un élève de CM2 capable d’obtenir la moyenne à un simple problème d’arithmétique.
Pour ce qui concerne les retraites, il devient à la longue véritablement harassant de rabâcher pour la Cent-Millième fois que l’allongement de la durée de la vie, doublée de l’accroissement démographique, doublée de l’augmentation du chômage et des prises en charges, doublée du ralentissement récent de la croissance, de sa stagnation actuelle et de sa négativité prochaine, débouchera inéluctablement sur une faillite annoncée du système par répartition.
La France d’en bas, en fait, n’en a cure et sa cécité se révèle finalement factice dans la mesure où elle a pris l’habitude de réclamer sans se préoccuper des calculs alambiqués de « ceux d’en haut ». Il serait d’ailleurs malvenu, de la part des politiques, de le lui reprocher puisque la base de leur stratégie (tous partis confondus) depuis 1945 vise à édifier un Etat-Providence qui s’occupe de tout, veille à tout et déresponsabilise totalement le citoyen de base. Dans ces conditions, il ne faut pas s’étonner que les réactions du bon peuple, déjà ou futur retraité, fasse fi des raisonnements comptables, des équations algébriques et des courbes géométriques des ministères. Alors que, par ailleurs, les profits financiers faramineux des sociétés capitalistes et les trains de vie ostensibles des politiciens jouisseurs éclaboussent sans vergogne les espaces étriqués où l’individu de base consomme son maigre pécule, il ne convient pas que les puissants du système opposent une mine contrite aux revendications de ceux qui les ont fait rois avec leur bulletin de vote.
Puisque le système par répartition n’est pas viable à court terme et que, malgré l’allongement de la durée du travail, les retraites ne pourront plus être payées de cette façon, il faut changer le système. Il existe deux options pouvant être choisies, l’une n’étant pas d’ailleurs pas exclusive de l’autre.
La retraite égale pour tous :
Cette option est d’une simplicité limpide et présente l’avantage d’induire des économies radicales sur le coût de traitement interne. Elle implique la création d’une caisse de retraite unique pour tous les travailleurs (salariés ou non) à laquelle sont versées toutes les cotisations des différentes catégories professionnelles. Le volume total de ces cotisations, diminué des frais de gestion interne (considérablement diminués) est alors divisé par le nombre de retraités et chacun perçoit une allocation identique. Ce système mettrait ainsi fin au caractère discriminatoire du régime des retraites qui est en contradiction flagrante avec le principe d’Egalité, Liberté et Fraternité de la République. En effet, il n’y a aucune raison pour que tel individu touche une retraite supérieure à tel autre, au prétexte qu’il a bénéficié de revenus supérieurs durant son existence. Un malade pauvre est il moins bien remboursé par la sécurité sociale qu’un malade riche ? Non ! Et pourtant le riche a cotisé plus que le pauvre ! Ce qui semble juste pour la maladie, ne l’est pas pour la retraite. Il y a manifestement un anachronisme difficile à comprendre… De plus, il ne faut pas perdre de vue que la retraite est un salaire de non activité, que tous les inactifs sont égaux devant le non-travail et que chacun pèse d’un poids égal sur les finances de la nation. Enfin l’argument selon lequel tel individu qui a plus cotisé (parce qu’il avait un salaire supérieur) mérite une paye de retraite supérieure est choquant du point de vue de la solidarité entre les membres d’un même groupe humain car chacun a contribué de manière identique au fonctionnement de l’ensemble sur le plan de l’effort fourni. Et le fait que son salaire en période d’activité ait été supérieur paraît déjà suffisant comme écart d’injustice tolérable dans une société solidaire.
La fiscalisation des retraites :
Ce système aurait le mérite de mettre fin à l’hypocrisie des régimes sociaux dits « privés » ou « autonomes » ou « indépendants » qui, en fait, ne le sont pas d’un point de vue politique puisque l’Etat est fondé à mettre la main à la poche en cas de besoin. Le concept de l’Etat Providence voulu par la caste politique, consacrant l’avènement d’un dirigisme planificateur pseudo-technique et d’un aménagement autoritaire du cadre de vie sous prétexte d’impératifs économiques camoufle en réalité la consolidation d’un despotisme nouveau qui se retourne aujourd’hui, dans cette affaire comme dans d’autres à venir, contre lui. Pris à son propre piège et empêtré dans les mailles du filet qu’il a lui même tendu au dessus de son peuple l’Etat Tout Puissant se voit aujourd’hui sommé d’aller jusqu’au bout de sa logique tutélaire, pourrait alors être contraint de considérer la retraite comme « un droit » public et donc financer son coût par l’impôt au même titre que l’éducation ou l’armée. De la sorte les sommes circulant aujourd’hui dans l’usine à gaz constituée par l’interconnexion entre les innombrables caisses collectrices et les millions d’entreprises cotisantes seraient prélevées directement par l’impôt sur le revenu des personnes physiques. La conséquence serait une diminution des cotisations sociales, donc une augmentation des salaires, mais assortie d’une augmentation des impôts. Bien sûr, cette augmentation de la pression fiscale ne saurait aller sans engendrer quelques réactions épidermiques négatives, mais au point où il en est arrivé de soumission totale à l’Etat Maternel, le peuple, lui aussi, se doit d’aller jusqu’au bout de sa propre logique.
L’Etat, seul payeur des retraites, serait alors ainsi clairement identifié comme interlocuteur unique et le schéma revendicatif qui préside aujourd’hui à la régulation des salaires et avantages sociaux serait tout simplement élargi à celui de la détermination des pensions de vieillesse.
Si la première option peut paraître quelque peu robespierriste aux yeux de certains par son côté radicalement égalitaire , la seconde, par contre, me semble bien aller dans le sens du vent et se fondre dans l’air du temps. A une époque où le raisonnement populaire qui prévaut est d’imposer un rapport de force au payeur désigné, charge à lui de se débrouiller comme il veut pour dégager les sommes nécessaires, et où la rémunération de la non activité après un certain âge est considérée comme un droit acquis et imprescriptible, il semble nécessaire que l’Etat Patron en tire toutes les conséquences.
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