« Manger son chapeau » sans honte
« Il n’y a que les imbéciles qui ne changent pas d’avis » ; certains ajoutent "disent en général les imbéciles quand ils en changent". Il serait malséant d’accoler cette « intro » aux positions récentes de Joseph Stiglitz, prix Nobel d’économie qui vient de publier un livre, « Le prix des inégalités », dans lequel il critique les conséquences du « libre-échange ». Ajoutons, qu’il est préférable de se faire accuser de « retournement vestimentaire » plutôt que de persister dans l’erreur par simple « orgueil mal placé »
On connaissait jusqu’à présent l’attachement très ferme de Stiglitz à une forme de « mondialisation économique » et surtout ses dénonciations véhémentes du « protectionnisme » Il a acquis sa notoriété « grand public » à la suite de ses violentes critiques envers le FMI et la Banque mondiale, émises peu après son départ de cette Banque mondiale alors qu'il y était économiste en chef. En 2008, le Président de la République, Nicolas Sarkozy, lui confia une mission de réflexion sur le changement des instruments de mesure de la croissance française. Nous reviendrons plus loin sur quelques remarques figurant dans le rapport de cette commission remis en 2009. On le classait dans les « nouveaux Keynésiens », très critiques envers les prescriptions de politique économique usuelles des keynésiens (déficit budgétaire et taux d'intérêts bas) qui ne tiendraient pas assez compte des problèmes liés au fonctionnement des marchés ! Que s’est-il donc passé ? Pour lui tout commence en 2000 avec « les politiques de déréglementation des marchés financiers de l’administration Clinton et la baisse des impôts sur les revenus du capital (…) qui ont mis de l’huile sur le feu » et il souligne que « la libéralisation ne promeut pas la croissance économique ; mais en revanche, elle amène plus d’instabilité et d’inégalités ». Il en vient même à reconnaître les conséquences peu sociales du libre-échange : « Si les Etats-Unis importe des biens qui nécessitent des travailleurs peu qualifiés, cela réduit la demande pour les travailleurs peu qualifiés pour faire ces biens aux Etats-Unis et pousse vers le bas les rémunérations de ces même travailleurs peu qualifiés. (…) Si les exportations créent des emplois, les importations en détruisent ; et nous avons détruit plus d’emplois que nous en avons créés. » Curieux quand même ! Il n’y a pas besoin d’être prix Nobel d’économie pour envisager de telles conséquences ; le bon sens semblerait suffire. On notera avec grand intérêt un passage remarqué de son rapport rédigé en 2009 : « S’ils ne peuvent pas faire confiance à la sécurité et à la solidité des institutions financières des autres pays, il leur faudra limiter les transactions avec elles pour ne pas mettre en danger leurs propres institutions (…) Les avantages d’un élargissement du marché financier peuvent être inférieurs, et de loin, aux coûts que leurs citoyens risquent d’avoir à payer, comme l’illustre le cas de l’Islande (…) Les économies bien réglementées doivent être protégées de celles qui le sont insuffisamment ou pas du tout ». Il ajoutait que la « globalisation » restreint la capacité d’action des Etats et pousse à une « harmonisation par le bas » Bref, voilà réunis, sans doute un peu tard, des arguments suffisants pour réclamer une fois de plus qu’un traité européen scélérat et surtout dangereux ne soit pas ratifié au sein des seules assemblées mais par référendum.
Nous n'attendrons pas très longtemps, c'est sans doute déjà fait, pour lire ou entendre ceux qui hier encensaient le grand économiste "labellisé" déclarer : "Stiglitz ... Il est gâteux !"
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