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Marchés versus Etats

 « Mener aujourd’hui une politique de restriction budgétaire n’a aucun sens et pourtant c’est bien ce qu’imposent unilatéralement les marchés » Cette déclaration de Charles Wyplosz, professeur à l’Institut d’Etudes Internationales de Genève à la Tribune de Genève concerne (pour l’instant) l’attitude des marchés face à l’Espagne le Portugal et la Grèce. Et il enfonce le clou : « C’est un bon exemple d’une politique classique basée sur la panique et qui ne s’appuie sur aucune étude économique sérieuse ». En fait, ce que veulent imposer les marchés à tous les Etats européens c’est une mutation de la logique des dépenses qui exigerait des investissements structurels et anticipateurs et qui demanderait une nouvelle politique de crédit. Les marchés, gavés par les fonds octroyés aux banques pour éviter la récession, refusent tout simplement le retour de l’ascenseur, préférant spéculer sur la dette. Dette due aux avances et aux cadeaux des dits Etats au système financier, c’est-à-dire « aux marchés ».

Que reproche-t-on à la Grèce ? Une comptabilité obscure et hétéroclite, un coût très élevé de l’investissement privé (bureaucratie – corruption), un Etat qui s’accommode des disparités et du nombre des caisses de retraite, une dette importante mais tout à fait comparable à celles des autres Etats Européens. On oublie cependant que le triptyque marine marchande, tourisme, fonds issus de la diaspora, est resté pendant des décennies « hors comptabilité » égalisant de fait les déficits. On oublie surtout que le gouvernement actuel issu des urnes il y a à peine trois mois a fait campagne et a été élu sur un programme proposant de mettre fin à toutes ces « maladies congénitales » perpétuées depuis l’après guerre par tous les gouvernement précédents et qui étaient à la base d’une gouvernance clientéliste.

Louka Katseli, ministre de l’économie, de la compétitivité et de la marine marchande indique dans une ITV au journal économique Naftemboriki que l’objectif primordial pour le gouvernement grec reste une politique d’investissements permettant la modernisation des secteurs de l’Etat et du privé, d’une cohérence économique sereine. Les marchés ne l’entendent pas de cette manière : ils sont les premiers à désirer un pays dépendant, embourbé dans des pratiques bureaucratiques, clientélistes et opaques : pour eux, c’est le client idéal. 

Or, la Commission, le lendemain des élections s’est réveillée « vertueuse », elle qui avait avalé les couleuvres du gouvernement conservateur précédant malgré les scandales permanents, les mensonges et autres camouflages de toute sorte. Elle se défend aujourd’hui en disant qu’il faut un début à tout. Cependant, cette rigueur exigée est très sélective : si on demande par exemple avec insistance (et à juste titre) l’harmonisation et la limitation des fonds de retraites ou celles des fonctionnaires, on ne trouve rien à dire sur l’assiette fiscale qui est en Grèce de 40%. En fait, on demande moins d’Etat, « oubliant » que c’est l’abandon par les Etats d’une grande partie de leur rôle de régulateur économique et surtout social qui permit aux banques d’y pallier à leur manière, c’est-à-dire par un usage excessif du crédit et de la spéculation. On peut (toute proportion gardée) comparer cette politique à celle de Paulson qui conduisit la Lheman Brothers à la faillite : dans un océan de permissivité, au sein d’une dérive spéculative à hauts risques devenue la règle, une banque n’est pas sauvée, indiquant une limite jusque là inexistante et qui précipite l’établissement entrainant tous les autres. Il y a deux mois, une affirmation de solidarité sans faille de pays de la zone euro, aurait coupé court à toute spéculation et « les marchés », eux mêmes discrédités - comme les institutions dites de cotation et qui s’étaient trompés sur tout -, n’auraient pas joué contre Athènes ou Madrid. Aujourd’hui, une fois encore, les déclarations de la banque centrale européenne et de la Commission sont plus que tardives. Les marchés, avides de fonds et de bonnes occasions jouent la panique, ayant objectif le status quo antes  : un monde sans Etats régulateurs, sans politiques de crédit, sans politique sociale et qui les laisseraient seuls à déterminer le cout du crédit vis-à-vis des Etats et des citoyens. Les fautes se paient : aujourd’hui ce n’est plus la Grèce ou le Portugal qui sont au point de mire : c’est la zone euro qui, par manque de solidarité élémentaire joue son va tout. Il ne faut pas s’offusquer de la manière dont fonctionnent « les marchés ». Tant qu’on les laisse faire (demandant aux citoyens au passage de participer à leur sauvetage si les choses se gâtent), ils continueront. Par contre, l’Union Européenne et les Etats membres devraient choisir : ils travaillent pour le marché ou pour les citoyens européens ? Quand enfin décideront-ils qu’ils sont d’une utilité quelconque ? 


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7 réactions à cet article    


  • le naif le naif 9 février 2010 12:41

    @ L’auteur

    Excellent article auquel j’adhère totalement.

    TINA

    There Is No Alternative disaient en cœur Reagan et Tatcher et tous le monde d’applaudir des deux mains....

    Ensuite, nous avons eu le droit au choc des civilisations..... autre délire

    Et si la troisième voie était déjà en marche sous nos yeux, sans que la gauche « Aliendiste (version commémoration des chrysanthème au PS) et Zappatiste (Façon Danielle Mitterand, » n’y comprenne goutte....

    L’alternative au capitalisme existe déjà depuis dix ans..... c’est le Chavisme et la révolution Bolivarienne, L’ALBA, Le sucre....... Une expérience extrêmement prometteuse et porteuse d’avenir.

    A ses détracteurs, je propose un petit jeu amusant, comparer les performances du Cac 40 à celles de la bourse de Caracas : http://map.jdf.com/map.html

    Sur 5 ans Paris : - 9.38%
         Caracas : +95.29%

    Sur 3 ans Paris : -36.32%
     Caracas : +30.38%

    Sur 1an Paris : +15.51%
     Caracas : +64.38%

    Sur 6 mois Paris : + 2.45%

     Caracas : +25.11%

    Depuis le 1er Janvier Paris : -8.36%

     Caracas : +4.79%

    Et pourtant comme se plaisent les médias dominant à le décrire, Chavez est un tyran, un dictateur populiste, ami de Cuba et de l’Iran, bref un fou qu’il faut abattre au plus vite. En 2002 victime d’un coup d’état, dont se félicite immédiatement Double W Busch il est réinstallé au pouvoir par L’armée et le peuple !!!! et depuis, il a été réélu démocratiquement à chaque élections.......

    Cet homme nous montre une voie possible, Celle du Socialisme avec un S majuscule, à ceux qui ne connaissent pas son action, ou qui n’ont retenu que ce que le Monde et Libé en disent, je vous invite sincèrement à vous pencher sur cette expérience au combien prometteuse.

    Pour approfondir le sujet : http://www.michelcollon.info/index.php?view=article&catid=80&id=1510&option=com_content&Itemid=26

    Ou tapez simplement Chavez sur Google et écoutez ses discours afin de vous faire votre propre opinion sur cet homme.

    La chute annoncée du système financier, loin d’être une catastrophe pourrait permettre au peuple de rependre ses droits si nous savons saisir notre chance....... à méditer.....


    • verdan 9 février 2010 17:35

      bonjour

      Oui !!! Comme Poutine ! 2 vrais Homme(s) d’Etat !

      D’accord avec vous .


    • le naif le naif 9 février 2010 19:31

      @ verdan

      "Oui !!! Comme Poutine ! 2 vrais Homme(s) d’Etat !

      D’accord avec vous ."

      Je ne vois pas bien le rapport avec Poutine, mais visiblement la situation du Vénézuela et de l’Amérique du Sud en général doit vous échapper quelque peu.... Je vous laisse à vos certitudes.


      • le naif le naif 9 février 2010 19:44

        @ verdan

        Bonsoir

        Oups désolé, je crois que j’ai mal interprété votre message, j’ai cru que c’était sarcastique.

        Cela est du au fait que j’ai du mal à associer Poutine et Chavez, l’un se comporte comme un tsar, l’autre est un démocrate. Ce qui à mes yeux fait une sacrée différence et surtout sur le plan social et économique, l’expérience Vénézuélienne, est aux antipodes de l’expérience Russe qui est passée à l’économie de marché avec une brutalité que n’aurait pas renié Tatcher...


        • Antoine Diederick 9 février 2010 23:33

          hummm surtout trop de corruption en Grèce....

          "Par contre, l’Union Européenne et les Etats membres devraient choisir : ils travaillent pour le marché ou pour les citoyens européens ? Quand enfin décideront-ils qu’ils sont d’une utilité quelconque ? "

          cela c’est une bonne question.....mais cela ne va rien résoudre ?

          et les grecs, ils travaillent pour qui.....et ils espèrent quoi ?


          • Antoine Diederick 9 février 2010 23:36

            le mythe de l’Europe salvatrice ?


          • fifilafiloche fifilafiloche 10 février 2010 03:19

            Je suggère au Chaviste d aller vivre pendant quelques temps comme un Vénézuélien au paradis de Chavez, non avec des rentes européennes, mais du fruit de son travail, affrontant chaque jour l insécurité, le manque de produits agricoleset un budget alimentaire comparativement 5 fois plus élevé qu’en France.


            L Euro baisse, qui s en plaindra ? Cela fait des années que nous posons en victimes des dévaluations compétitives de la Chine et des Etats Unis.

            Les bourses baissent ? Qui s en plaindra ? En Janvier encore, tout le monde dénonçait la nouvelle bulle mobilière due aux prêts à taux zéro.

            La fin de la crise passe passera par de longues et douloureuses années de déleveraging, une augmentation importante des prélèvements et des Etats rationalisant leurs dépenses. Nous n en sommes qu au début. Les bulles financières et immobilières doivent absolument dégonfler pour rendre sa place au capitalisme productif, seul porteur de richesses sur le long terme.

            Rendez vous en 2020 pour un début de reprise sur des modèes de développement totalement bouleversés : arrêt des concentrations internationales, fin de l ère pétrole, une Chine première puissance mondiale exigeant le respect, et oui, des retraites par répartiton qui auront disparu, car impossible à financer.

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