Microsoft et Electronic Arts en campagne publicitaire
Une sorte deYalta vidéoludique, où deux grandes puissances se partagent l’avenir des mondes virtuels : la publicité implémentée dans les jeux . La semaine dernière, Microsoft et Electronic Arts, ont signé un accord autorisant les publicités de la société Massive, propriété de Microsoft, dans les franchises sportives d’EA. Nascar, Tiger Woods golf, mais aussi la ligue de hockey sur glace (NHL) ou de football américain (John Madden) font partie du contrat. "Nous devons bâtir un réseau global, et ceci constitue une étape majeure pour y parvenir", se félicite Cory Van Arsdale, président-directeur général de Massive, qui n’a pas révélé le montant de la transaction.
Dans la guerre des consoles, Microsoft semble avoir remporté une importante bataille. Massive dispose déjà d’une quarantaine de partenaires, et une centaine de titres sont implémentés par les soins de cette entreprise. Pourtant, la publicité ingame constitue, pour l’heure, plus un investissement qu’une véritable source de revenus. Véritables régies publicitaires, les sociétés d’implémentation achètent des espaces comme dans un journal ou sur les chaînes de télévision.
L’an dernier, Microsoft a racheté le leader du marché, Massive, pour 200 millions de dollars. Google s’est également particulièrement investi, en rachetant
le concurrent Adscape, pour 23 millions de dollars. Les acteurs
traditionnels de la publicité commencent également à s’engager dans les
mondes virtuels. De grands groupes comme Ogilvy ou Publicis augmentent
significativement les effectifs de leur division jeu.
Le marché de la publicité ingame est encore peu développé, mais croît rapidement. Pour un titre comme Need for Speed, les revenus publicitaires peuvent atteindre 4 millions de dollars par an, estime un expert de Park Associates. A plus long terme, une récente étude du cabinet américain estime que le marché des Etats-Unis devrait atteindre 800 millions de dollars en 2012, contre 55 millions en 2006. De tels chiffres demeurent toutefois peu élevés, face au 30 milliards de dollars du marché total des jeux vidéo en 2007.
Appât du gain
A défaut, d’être globale, une campagne publicitaire dans un jeu peut atteindre une cible mouvante et peu accessible que sont les adolescents et les jeunes adultes.
Mais outre les avantages pour l’industrie vidéoludique, l’essor de la publicité en ligne est-elle une chance pour le joueur ?
L’argument du réalisme, maintes fois évoqué par les concepteurs de jeux, est assez léger quand c’est finalement le joueur qui paie pour de la publicité. L’arrivée massive d’encarts publicitaires risque de développer la "publiphobie". Il y a quelques mois, les panneaux publicitaires ajoutés dans Battlefield 2142 et dans Counterstrike ont suscité l’ire des joueurs, estimant que le gameplay était affecté, protestant sur les forum, et dispensant des messages pour les retirer. Les études de Park Associates montrent également que les joueurs sont enclins à penser que la publicité réduit le plaisir ludique.
Par ailleurs, aucune politique de réductions du prix des jeux n’est envisagée, contrepartie pourtant légitime de l’introduction de la publicité. Dans tout support mixte, à la fois vendu à une clientèle personnelle et aux régies publicitaires, on attend une répartition équitable. Dans un journal par exemple, les revenus publicitaires servent à vendre à moindre coût au lecteur. Ce n’est en aucun cas l’intention de Microsoft ou d’EA, plutôt soucieux d’asseoir leurs marges. Certains types de jeux, dont les jeux dits occasionnels, en plein essor, ne se prêtent également pas facilement à la publicité en ligne.
L’omniprésence de Microsoft dans le secteur vidéoludique laisse craindre un chantage à la publicité. Quand un seul acteur possède un tel monopole, il peut aisément faire pression sur les éditeurs tiers. S’ils veulent pouvoir développer sur le support de la XBox 360, il leur faudra évidemment choisir Massive, et non un concurrent. Si un tel schéma s’étend, l’accès à certains supports sera strictement verouillé. Alors que dans la sphère informatique, la "net-ralité" du réseau est de moins en moins respectée, avec les surenchères d’exclusivité, le même phénomène pourrait se reproduire dans la sphère vidéoludique.
C’est pourquoi Yuanzhe Cai du cabinet Park Associates voit dans la publicité dans les jeux une "arme à double tranchant", et invite à prévenir la "cannibalisation" du secteur.
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