La suite, et non la fin...
Jeudi soir, j’ai pu apprendre lors du journal de 20 heures, entre deux "reportages de fond", qu’Alstom avait demandé en procédure d’urgence devant la Justice française la suspension du contrat octroyé par la SNCF à Bombardier.
La France s’était émue du fait qu’une entreprise canadienne avait pu gagner un contrat d’une telle somme contre une entreprise française qui se voyait la favorite. Certains se demandaient si nous n’étions pas masochistes de ne pas nous attribuer à nous-mêmes des contrats de cette envergure, malgré l’existence de règles en matière d’appels d’offre internationaux. Mais ça, j’en ai déjà parlé ici, et d’autres là.
Ce qui est intéressant, c’est de voir les raisons de ce recours, et les conséquences de ce dernier. A la suite de la perte de ce contrat, le PDG d’Alstom, M. Patrick Kron, aurait demandé à ses équipes de comprendre la raison de cet échec. Ce qui, en soi, est très louable, se remettre en cause ne peut pas faire de mal de temps à autre, surtout après ce genre d’échec. Plusieurs questions et conclusions vont sortir de cette réflexion. Il semble tout d’abord incompréhensible pour la direction qu’ Alstom soit plus compétitif en Chine qu’en Ile-de-France. Ensuite, ils se mettent à douter de la capacité de Bombardier à produire tous les trains en France. Voilà deux raisons qui vont pousser Alstom à se dire que Bombardier ne peut pas tenir ses promesses. Voilà de quoi lancer une procédure, alors que Bombardier, bon joueur, semblait déjà vouloir donner une part du gâteau à son concurrent. Leur conclusion, en somme, semble être : ce n’est pas de notre faute, c’est donc forcément de la leur. Belle mentalité que celle-ci. Il est assez rare de voir qu’une remise en cause au sein d’une société conduit à remettre en cause le concurrent qui a gagné. Les appels d’offre européens (RFP) sont, tout comme leurs analogues internationaux, des contrats extrêmement techniques, de plusieurs centaines de pages, ne laissant pas la place à l’improvisation ou au mensonge. Je le sais, j’en ai vu passer, et pas des plus faciles. Un produit plus adapté à ce que demande le client, un tarif plus attractif : voilà les clés du succès. Je vous renvoie à nouveau à cet article qui vous donne quelques chiffres sur les économies réalisées par la SNCF en acquérant le produit bombardier.
Alstom a du mal à digérer la pilule, d’autant plus que l’entreprise est écartée des appels d’offre de Toronto et de Montréal, qui ne sont pas régis par les règles internationales, les gouvernements provinciaux étant presque indépendants de la capitale.