Pourquoi une éventuelle restructuration de la dette grecque nous concerne
Le pataquès médiatique est actuellement en marche sur une possible restructuration de la dette grecque. Les analyses se multiplient sur le bien-fondé d'un non-remboursement d'une partie de la dette hellène. Inévitable pour les uns, stupide pour les autres, l'hypothèse d'une restructuration focalise l'attention car ses conséquences iraient bien au-delà des frontières grecques.
L'agence de notation Standard & Poor's a abaissé une nouvelle fois ce lundi les notes de crédit à court (remboursement dans moins d'un an) et long terme (remboursement dans plus de 5 ans) de la Grèce, évoquant un risque accru qu'Athènes doive se résoudre à restructurer sa dette. En somme, à n'en rembourser qu'une partie.
Cette nouvelle baisse intervient suite aux rumeurs d'une sortie de la zone euro de la Grèce vendredi dernier. Une rumeur jugée "stupide", par le chef de l'Eurozone, Jean-Claude Junker. Effectivement, une telle solution est techniquement et juridiquement impossible à mettre en place avant deux ou trois ans selon Georges Ugeux, banquier d'affaire international et bloggeur. Techniquement car fabriquer et mettre en circulation une monnaie, c'est plus simple à dire qu'à faire. Juridiquement car il faut l'aval de tous les Etats membres de la zone euro. Enfin, une sortie de l'euro renchérirait la dette du pays, déjà évaluée à plus de 350 milliards d'euros.
Depuis avril 2010, la dette grecque est considéré comme un "junk bond", c'est -à-dire un actif pourri par les agences de notations. Acheter un titre de dette grecque revient en quelque sorte à prêter à un ami notoirement insolvable. Les contreparties de cette folie sont des taux d'intérêt très élevés. Ces taux sont actuellement à près de 25% sur 2 ans sur le marché. Impossible pour la Grèce d'emprunter à des taux pareils, mais les détenteurs de ces "billets de loto" peuvent se les revendre entre eux. Et au passage, les acheteurs peuvent s'y retrouver en prenant une assurance contre le non-remboursement de la dette, les fameux CDS.
La BCE détient 20% de la dette grecque
Un peu par preuve de solidarité, beaucoup par peur d'y passer aussi, les Européens ont décidé il y a un an de soutenir la Grèce. En lui prêtant à des taux moins indécents que ceux réclamés par le marché. Et en permettant à la Banque Centrale Européenne (BCE) d'acheter massivement de la dette grecque. Selon le Financial Times, la BCE détient actuellement 20% de la dette grecque.
Les banques commerciales françaises (comme BNP, Société Générale...) ont accumulé 40 milliards d'euros de dette grecque selon le site OWNI.fr qui s'appuie sur des statistiques de la Banque des Règlements Internationaux. Quant au premier détenteur de dette grecque, ce sont les banques de ce pays, déjà fragilisées.
Un défaut (non-remboursement) sur une partie de la dette mettrait en difficulté les banques grecques qu'il faudrait probablement renflouer. Et renflouer veut dire plus d'aide de l'UE et en partie de la France. Les banques françaises et au passage les particuliers qui ont souscrit à ces titres devraient essuyer quelques pertes. La BCE qui détient maintenant une bonne partie des Bons du Trésor grec dans ses caisses serait bien embêtée.
Une restructuration, inévitable soit-elle, serait pour Bruxelles un mauvais signal envoyé aux marchés. Un tel scénario montrerait les limites de la solidarité européenne et surtout ouvrirait la voie à une restructuration de l'Irlande, qui croule aussi sous les dettes. Les banques françaises et la BCE peuvent tenir le choc d'une restructuration de la dette grecque. Un défaut de plusieurs pays de la zone euro serait une autre histoire. Un nouveau renflouement serait nécessaire, alors que la marge de manoeuvre en France, et pour tous les pays de la zone euro déjà endettés jusqu'au cou, est très faible. La rigueur budgétaire éprouvante expérimentée en Grèce, en Irlande et au Portugal deviendrait réalité en France. Les conséquences pourraient être alors plus graves que celles de la crise de 2008 qui n'ont toujours pas été pansées.
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