Pousser les Grecs au Défaut ?
Le temps ne semble guère aux accommodements. En d’autres temps, l’Union européenne se serait montrée empressée d’annoncer jeudi un accord global, quitte à mentionner quelques points de détail à régler. Mais pour le moment les marchés sont calmes, la Bourse se porte mieux, les taux d’intérêt sont à la détente… s’agirait-il d’une opportunité pour ceux qui sont tentés par l’option du Défaut grec ?

Jeudi soir 9 février, la zone euro a donné moins d'une semaine à la Grèce pour répondre à plusieurs exigences, et notamment pour trouver 325 millions d'euros d'économies budgétaires, avant de pouvoir délier les cordons de la bourse et accorder à Athènes une aide cruciale pour le pays. « En dépit des progrès importants réalisés ces derniers jours, nous n'avons pas eu tous les éléments nécessaires sur la table pour prendre des décisions » a dit le président de l'Eurogroupe, Jean-Claude Juncker, à l'issue d'une réunion des ministres des Finances de l'Union monétaire à Bruxelles.
Plutôt que d’annoncer un accord avec des réserves, on a donc préféré annoncer un désaccord malgré les progrès enregistrés. Ce qui nous renvoie au 15 février. On joue donc la corde pour l'échéance toute proche du 20 mars. Et à force de jouer la corde… Jusqu’ici, les consignes de prudence étaient absolues. Le président de la Deutsche Bank vient de le redire encore : « si nous laissons la Grèce s’effondrer, je pense que nous ouvrons la boîte de Pandore ». Mais d’autres en viennent à prendre position ouvertement pour la rupture.
Leurs arguments : à force de vouloir « sauver la Grèce à tout prix » pour « sauver le système tout entier », ne tombe-t-on pas dans l’absurde ? Car au drame humain que l’on impose à ce pays, s’ajoute une dimension financière qui apparaît de plus en plus déraisonnable. En début de semaine, une commissaire européenne néerlandaise a évoqué ouvertement l’option d’une sortie de la Grèce. Elle a été rappelée à l’ordre bien sûr, mais cela montre que le sujet n’est plus tabou. Il est même à l’ordre du jouir à Bruxelles. Dans une rencontre avec les lecteurs du quotidien belge Le Soir, l’ex-premier ministre Guy Verhofstadt a demandé : « la réforme profonde d’un État grec aux mains de "partis gangsters", gauche et droite confondues, tout affairés à procurer des avantages à leur clientèle respective. On devrait s’attaquer à cela. Or, que voit-on ? On préconise de la modération salariale dans le secteur privé, ce qui ne fera qu’accentuer la récession »
De plus en plus de voix s’élèvent pour cesser de camoufler une situation impossible sous de faux arrangements et, plutôt que d’appliquer de nouveaux cataplasmes, de crever l’abcès. Aux tendances favorables au défaut dans les milieux financiers s’ajoute désormais celui des milieux politiques. Avec peut-être une hésitation quant aux conséquences d’une telle option, hésitation qui leur ferait préférer non de provoquer eux-mêmes la rupture mais de pousser les Grecs à la faute.
Qu’en est-il des Grecs eux-mêmes ? Les réactions de la population ne sont pas à la mesure de la gravité de la situation, sans doute parce qu’elle ne voit aucune issue à la crise, qu’elle se sent écrasée et ne sait pas où se tourner. Du côté des politiques, c’est le désarroi : ce vendredi, quatre ministres du parti d’extrême-droite ont présenté leur démission, deux membres socialistes du gouvernement ont également jeté l'éponge. Une nouvelle grève générale a été déclenchée. Des affrontements se sont déroulés vendredi après-midi à Athènes. Tout ceci indique qu’il sera très difficile pour les Grecs de fournir aux Européens les garanties requises avant mercredi prochain.
Comme en situation de guerre, à Athènes, on pense ces jours-ci avant tout à remplir les réserves et placards… quand on en a les moyens, bien sûr !
MALTAGLIATI
13 réactions à cet article
Ajouter une réaction
Pour réagir, identifiez-vous avec votre login / mot de passe, en haut à droite de cette page
Si vous n'avez pas de login / mot de passe, vous devez vous inscrire ici.
FAIRE UN DON