Quand les agences de notation débarquent chez vous
N’allez pas croire que les agences de notation ne s’intéressent qu’aux états. Leur mission s’étend aussi aux niveaux infra-étatiques. C’est ainsi que le Conseil général du Finistère a eu la désagréable surprise de voir débarquer chez lui une filiale de l’agence de notation américaine Fitch. C’est ce que nous apprend le journal « Le télégramme » du 5 décembre 2011. Mais il serait vain de s’énerver en criant « Us go home ! » , il faut illico presto étaler sa situation financière.
C’est ainsi et on ne sait plus qui des Américains ou des Allemands auront raison de notre souveraineté les premiers. Quand je pense qu’on regardait avec inquiétude vers la Chine ou vers Bruxelles…
Cette grosse agence de notation se contentait jusqu’à présent d’évaluer la solvabilité des États. Voici maintenant qu’elle s’immisce dans les collectivités locales. En fait, tout lieu susceptible de voir naître une crise financière peut se faire visiter par les agences qui sont partout aux aguets comme des vautours. Or, la crise financière atteint les collectivités locales. En effet, 10 milliards d’euros pourraient manquer en 2012 pour assurer les financements dont les collectivités locales françaises ont besoin, selon Dexia Crédit Local (DCL), qui prévoit que la dette des collectivités locales atteindra en 2011 154,7 milliards d’euros, soit 7,7% du PIB. De plus, l’Etat va réaliser quelque 200 millions d’euros d’économies sur ses concours financiers aux collectivités. Cela aura une incidence sur les investissements (les collectivités représentent 71% de l’investissement public en France) surtout que l’évolution des règles prudentielles (Bâle 3) imposée aux banques pourrait, à terme, réduire le volume du crédit et/ou renchérir le coût du crédit pour les collectivités.
Le conseil général du Finistère a donc été approché par une filiale de l’agence de notation américaine Fitch, laquelle lui a proposé une évaluation de sa solvabilité, en forme de garantie pour les organismes prêteurs de plus en plus frileux à accorder des emprunts aux collectivités locales. Pierre Maille, le président du conseil général du Finistère, n’a pas donné suite à la proposition de l’agence de notation. Il faut dire que la dette du Finistère est actuellement de 274€ par habitant contre 465€ au niveau national. Mais il n’est pas dit que toutes les collectivités pourront se passer de ces désormais incontournables inquisiteurs. Avec les conséquences qui découlent d’une appréciation négative : fin de l’accès au crédit ou renchérissement de celui-ci.
La situation est inquiétante puisque même pour le conseil général du Finistère qui se porte bien les banques font la fine bouche. Le Crédit foncier a ainsi mis fin à la convention qui le liait au conseil général. Roger Mellouët, le vice-président chargé des finances au conseil général du Finistère, n’en fait pas mystère : « Jusqu’à présent, nous n’avions aucune difficulté à emprunter 20millions par an (*) auprès d’un seul organisme. Aujourd’hui, nous devons passer par trois banques différentes, aux conditions qu’elles nous imposent ». François Baroin a alerté les maires en novembre sur ce point : « Quoi qu’il arrive, il faut s’attendre à une diminution de la durée des prêts aux collectivités. Aujourd’hui, on atteint des durées de prêts à 20, 25 voire 30 ans… Demain, ce sera plutôt 15 ans. Concrètement, cela signifie qu’un maire ne pourra peut-être plus faire autant sur un seul mandat. Les choses se feront alors sur deux mandats ».
Heureusement, le projet de création d’une agence de financement des collectivités locales, demandée par les élus locaux pour trouver du financement, a été approuvé par le rapport de la Cour des comptes sur « la gestion de la dette publique locale ». Si Dexia ne prête plus aux collectivés (en faillite, elle est poursuivie en justice par dix collectivités), une nouvelle banque de financement du secteur public local verra le jour. Elle sera détenue à 65% par La Banque postale et à 35% par la Caisse des Dépôts et Consignations. Elle doit être créée d’ici juin 2012. D’ici là, maires, présidents de collectivité, surveillez votre porte ! Et…votre budget…
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