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Sanofi fait passer le bénéfice avant la recherche en France

Sanofi l’a annoncé en juillet 2012 : le groupe va restructurer son pôle recherche, ce qui signifie en langage non « langue de bois entrepreneuriale » qu’il va licencier à tour de bras. Le directeur s’est contenté d’affirmer que ce plan « aurait un impact sur l’emploi » mais les syndicats, pas dupes pour autant, chiffrent eux le dit impact à au moins 1500 suppressions d’emploi.

Les syndicats estiment que ce plan est indéfendable puisque Sanofi a réalisé 8,8 milliards d'euros de profits l'année dernière. "On est précisément dans le cas décrié par l'actuel gouvernement : l'entreprise qui licencie pour donner toujours plus d'argent à ses actionnaires", juge ainsi Jean-François Chavance à la CFDT dans l’Expansion.

Arnaud Montebourg a également réagi en qualifiant le plan « d’archétype du plan social abusif »

Chris Viehbacher, PDG du groupe, a de nouveau défendu son projet de réorganiser la recherche et développement du groupe autour de "hubs", des plateformes regroupant les chercheurs pour "renforcer la productivité", notamment en France qui abrite la moitié des activités de recherche.

Associer productivité et recherche est pour le moins audacieux, et pose un certain nombre de questions quant à la capacité de la direction à comprendre l’activité de son entreprise. En effet, la recherche n’est pas par essence une activité commerciale, et encore moins une activité rationalisable, quantifiable, industrialisable à grand échelle. Si Sanofi et d’autres grands labos ont fait de l’industrialisation de la recherche leur marque de fabrique, l’entreprise pourrait risquer gros à trop tirer sur la corde, en voulant traiter ses chercheurs comme des salariés d’une usine mécanisée.

Non pas que le second travail soit moins noble et moins pénible que le premier ; c’est surtout le caractère laborieux de la recherche, par étapes, et nécessitant temps et patience, dont il est question ici. La compréhension de la nature particulière de la recherche est essentielle pour que celle-ci puisse se développer et apporter des résultats profitables à tous. Autrement dit, les visions de court et de moyen termes sont certes appropriées en matière de spéculation financière, mais totalement illusoires en ce qui concerne la santé.

Ce n’est pas la première fois que Sanofi se comporte en capitaine d’industrie plus qu’en figure de proue de l’avancée médicale en France.

En se remémorant les épisodes Oenobiol et Genzyme, il est difficile de faire avaler la pilule aux quelques 1500 chercheurs qui vont devoir trouver des laboratoires plus intéressés par leurs travaux que par leur taux horaire. Sanofi, dont le président prétend qu’il faut aller chercher plus de productivité, fait, depuis quelques années, des bénéfices record. Ceux-ci ont largement été réinvestis dans des branches qui ont pourtant peu à voir avec son activité d’origine.

En 2009, Oenobiol, « leader français des compléments alimentaires consacrés à la santé et à la beauté » est racheté par Sanofi, qui compte « diversifier sa stratégie ».

En 2011, c’est au tour de Genzyme de tomber dans l’escarcelle de Sanofi, L'acquisition de Genzyme par Sanofi a été élue "Meilleure opération de Fusion-Acquisition 2011" par le Club des Trente, obscur énième club de patrons bretons spécialisé dans le lobbying. Cette acquisition de Genzyme par Sanofi s’est faite au terme d'une OPA de 20,1 milliards de dollars, soit la deuxième plus grosse opération de rachat au monde conclue sur un laboratoire de biotechnologies.

Chris Viehbacher, toujours lui, a expliqué que Sanofi a été "patient et discipliné tout au long des négociations". "Genzyme va devenir le centre mondial d'excellence de Sanofi-Aventis pour les maladies rares et conservera une présence importante dans la région de Boston".

Mais venant d’un personnage impliqué dans des scandales tels que la vente illégale de médicaments, il ne faut plus s’étonner de rien.

« En juillet 2012, GlaxoSmithKline verse 3 milliards de dollars pour mettre fin à des poursuites intentées aux Etats-Unis et qui portaient sur des faits qui se sont déroulés entre 2000 et 2008. Chris Viehbacher est directement incriminé pour avoir poussé à la vente d'Advair pour traiter toutes les formes d'asthmes, alors que l'agence du médicament n'avait autorisé le produit que pour les formes les plus sévères. En 2004, il a notamment déclaré aux actionnaire du groupe : The real opportunity for us with Advair is that we can now convince physicians that there is no such thing as mild or severe asthma : you have asthma. »

La suite est bien connue, deux ans après : c’est l’annonce de restructuration en France. Ce drame, pour nos chercheurs, pourrait être une première étape. Une marche décisive vers le sabordage de l’esprit de recherche nécessaire aux grandes avancées humaines, ou quand le bien collectif est sacrifié à l’autel du profit de quelques uns.

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Chris Viehbacher


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4 réactions à cet article    


  • jean 20 août 2012 16:22

    Merci de votre article, crèmes de beauté = labo privés, médicaments = labo d’état TINA


    • lulupipistrelle 20 août 2012 20:33

      Je ne connais pas la situation actuelle...
      Mais en France pendant deux décennies (les années 80-90) les vraies recherches étaient faites dans des labos universitaires par des étudiants payés au SMIG... alors que l’industrie pharmaceutique se casse la gueule ce ne serait que justice.


      • Noel2412 21 mai 2013 09:10

        rien d’étonnant quand on voit leurs plans sociaux


        • Tika Soomak TikaSoomak 24 mai 2013 23:50

          Sanofi, 1ère entreprise pharmaceutique européenne d’origine française se désengage peu à peu de ses centres de recherche et développement en France. Chris Viebacher, directeur général de Sanofi depuis fin 2008 (ex-numéro 2 de GSK), secondé depuis 2009 par Elias Zerhouni, responsable de la R&D (ex-directeur du très célèbre « NIH institute » américain), ont pris la mesure de la recherche européenne et française : nulle !

          Les emplois qui sont délocalisés ne sont pas remplacer par les emplois du même secteur d’activité, il n’y a pas de mutation des emplois délocalisés vers un autre ou un nouveau secteur d’activité, ce sont des emplois perdus définitivement, uniquement pour que les dirigeants, les financiers et les actionnaires fassent plus de profits. Les conséquences sont nombreuses, augmentation du chômage de masse, rareté de l’emploi, pression sociale par la baisse sur les salaires, les droits sociaux et les revendications, moins d’impôts par le manque d’activité de type industrie ou service donc de financement pour les services publics : écoles, santé, aides diverses, déplacements,...

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