Tarification de l’eau : inégalités et confusion
La facture d’eau moyenne des Français cache de fortes inégalités d’une commune à l’autre. La tarification a atteint un niveau de complexité sans précédent. Il est bien difficile pour les non-spécialistes de comprendre ce qu’elle inclut et pourquoi elle évolue… On annonce, un peu partout en France, des hausses, immédiates ou à venir. Plongée dans le maquis des prix de l’eau courante.
Une enquête de 60 millions de consommateurs, publiée dans le numéro d’avril dernier en partenariat avec France Libertés, a révélé l’augmentation vertigineuse des tarifs de l’eau du robinet dans certaines communes. Différences de topographie, rénovation des réseaux de captage ou d’assainissement, mode de gestion… Les facteurs qui font varier les prix sont multiples et complexes. Et parfois, complètement obscurs.
Une augmentation générale
Les prix ont augmenté en moyenne de 6,3 % entre 2011 et 2014. Dans plus de 4 villes sur 5, parmi les 130 étudiées, les tarifs de l’eau ont cru plus vite que l’inflation. Avec des écarts très marqués d’une commune à l’autre. Le litre s’échelonne ainsi de 1,50 € à 5,17 € selon que l’on habite à Antibes ou à Evreux. Les Antibois ont vu leur facture plus que divisée par deux en 3 ans, tandis que celle des Ebroïciens a bondi de 37 %. Cet exemple est spectaculaire mais pas isolé : les prix ont aussi explosé à Bar-Le-Duc (+ 25 %) ou Agen (+ 25 %), par exemple.
L’analyse comparative menée par 60 millions de consommateurs donne une idée des écarts moyens et des hausses récentes, mais ne rend pas compte des extrêmes. Dans notre pays, le prix moyen du mètre cube est de 3,78 euros, mais il peut grimper jusqu’à près de 10 euros, d’après le Panorama de l’Observatoire des services publics d’eau et d’assainissement
Dans le dédale des tarifications
Chacun sait que le système français de tarification de l’eau est une usine à gaz. Un sondage d’Opinionway pour ComprendreChoisir le rappelait d’ailleurs à l’occasion de la journée mondiale de l’eau en mars : plus de la moitié des Français (54 %) ne savent pas évaluer leur facture, seuls 16 % en connaissent exactement le montant. En principe, c’est simple, l’usager paie le prix de la collecte, du traitement, de la distribution puis de l’assainissement des eaux usées. On comprend aisément que ces coûts varient en fonction du territoire, de la pollution des eaux captées, de la distance à parcourir pour assurer l’acheminement aux communes ou aux habitations… L’eau courante est généralement plus chère dans les zones rurales que dans les agglomérations. Les choses se compliquent, explique fort pédagogiquement cet article, du fait d’une taxation différente de la distribution (TVA à 5,5 %) et de l’assainissement (10 % depuis le 1er janvier 2014).
En outre, de nouvelles règlementations obligent les municipalités à réaliser des travaux de mise aux normes de leurs réseaux d’épuration, occasionnant des investissements, qui se répercutent sur nos factures d’eau. Ces deux évolutions sont responsables d’une part de l’augmentation des prix. Mais cela n’apparaît pas de façon transparente pour les abonnés.
L’opacité devient totale quand on s’intéresse au prix de l’abonnement, fixé par les conseils municipaux, et au système choisi pas ceux-ci pour la gestion de l’eau : régie municipale directe ou délégation. La seconde est en moyenne plus coûteuse, mais, au détour d’une renégociation, elle peut aussi se révéler avantageuse. La presse quotidienne régionale a rendu compte, ces derniers mois, des réunions des syndicats des eaux départementaux (ici, dans l’Ariège), des rapports des Directions départementales des territoires (là, dans l’Indre) ou des Cours régionales des comptes (par exemple à Paris), qui laissent présager des hausses. Comme le résume La Gazette des communes, peu optimiste : « un prix bas peut cacher une augmentation future ». Dans ce contexte, les consommateurs ne disposent d’aucune visibilité sur le montant de leurs futures factures d’eau.
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