Tourmente au Japon ?
Parmi les 400 à 500 milliards de dollars de pertes estimées du fait des subprimes, les Américains et Européens en ont confessé et assumé à ce jour environ 140. Autrement dit, quelqu’un - ou quelques-uns - n’ont pas encore procédé à leur mea culpa et ce quelqu’un pourrait bien être les banques japonaises... En effet, les établissements bancaires sont sous pression légale car de nouvelles et strictes procédures comptables en vigueur les contraignent à une transparence accrue pour l’exercice se clôturant fin mars 2008.
Ainsi, la réplique du tremblement de terre américain dû aux subprimes pourrait bien venir du pays du soleil levant et d’Asie en général... en espérant que cette réplique ne soit pas aussi violente que la secousse initiale ! De fait, et comme il n’y a en général pas de fumée sans feu, les établissements bancaires japonais ont déjà considérablement resserré le robinet du crédit, ce qui ne présage rien de bon quand on sait que les taux d’intérêt nippon sont à... 0,5 % ! La fameuse théorie du "découplage" entre économie américaine et économies asiatiques a fait long feu car l’économie japonaise, qui est toujours - et de très loin - la seconde économie au monde doit aujourd’hui faire face à des périls aussi graves que l’économie américaine. Les commandes industrielles s’affaissent de manière inquiétante, la construction de nouvelles maisons atteint son niveau le plus bas depuis quarante ans et les prix de l’immobilier à Tokyo ont déjà perdu 22 % depuis cet été... Par ailleurs, signe avant-coureur de récession régionale, les exportations japonaises d’acier et de semi-conducteurs vers la Chine sont en net repli. Ainsi, ce grand marché asiatique supposé relativement immunisé à toute contamination occidentale et devant prendre le relais en cas de crise américaine se révèle tout compte fait étroitement dépendant de la bonne forme de l’économie américaine. Et comment espérer le contraire puisque les consommateurs américains achètent 30 % de leurs marchandises en Asie, exactement comme il y a dix ans ?
La Banque du Japon va donc devoir baisser ses taux d’intérêts même si, avec des taux aussi bas, il ne lui reste que fort peu de munitions. Elle devra donc boire le calice jusqu’à la lie et renouer avec la politique de "baisse quantitative" utilisée régulièrement jusqu’à un passé récent et consistant à approvisionner généreusement les banques avec des "hélicoptères " chargés de liquidités. Il semblerait que l’espoir né il y a quelques mois selon lequel l’économie japonaise soit guérie de ses maux endémiques se soit rapidement évaporé et cela pose au monde un problème. En effet, ce pays est de très loin le premier créancier mondial car ses investissements à l’étranger se montent à 3 000 milliards de dollars, chiffre qui représente la totalité de la dette américaine ! les liquidités placées sur des bourses ayant décollé ces dix dernières années comme celle de Nouvelle-Zélande, du Brésil, d’Islande et surtout de Grande-Bretagne sont ainsi estimées à 1 000 milliards de dollars. L’opération classique de ces quinze dernières années ayant consisté en des emprunts libellés en yens car peu coûteux, convertis en d’autres devises et investis à l’étranger... Le Japon peut donc véritablement être considéré comme notre pompe à liquidités et c’est peu dire qu’une partie de notre bien être en dépend ! Il semblerait bien pourtant que cette pompe soit en train de s’inverser avec de forts rapatriements de capitaux en cours ayant pour effet direct une forte appréciation du yen.
Du fait de leur excédent commercial, les Japonais réalisent annuellement un bénéfice net de 250 milliards de dollars, mais les statistiques américaines démontrent néanmoins que leurs investissements en bons du Trésor américains sont restés stables. Il y donc de fortes présomptions que ces sommes aient été injectées dans le réseau américain des subprimes... A ce jour, les principales grandes banques japonaises n’ont reconnu que 4,7 milliards de pertes, mais Mitsubishi - la plus importante - a révisé 12 fois en hausse le montant de ses pertes depuis seulement le mois de novembre dernier ! Il semblerait bien que le monde de la finance nippon nous joue le "remake" des années 1990 où, de peur de perdre la face, il avait remis de multiples fois l’annonce de mauvaises nouvelles.
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