Une nouvelle idéologie anglaise ?
A l’occasion de la mort de Madame Thatcher, Courrier International n° 171 a publié quelques extraits de la presse anglaise. The Daily Mirror dressait un réquisitoire. The Sun s’enflammait pour la dame de fer. Ce sont les lois du genre. Un peu comme Télérama dans la critique d’un film.
Mais en pages 12 et 13, Courrier International reprennait un article de Will Hutton publié dans The Observer au sujet de « l’affaire Cahuzac ».
« Il fut un temps où l’on jugeait impératif de mener une existence vertueuse. Il était question d’intégrité, d’engagement envers un but dépassant l’enrichissement personnel, d’un certain altruisme, pour ne pas dire d’humilité. Ceux qui se trouvaient au sommet y étaient peut-être parvenus en se montrant implacables et ambitieux, mais ils savaient que pour gouverner il fallait donner l'exemple, et cela nécessitait d’autres qualités que de simplement penser à soi.
Cette époque est révolue. Le plus grand défaut de la contre-révolution libérale est peut-être d’avoir consacré tant d’énergie à démontrer que la vertu, quelle que soit son importance dans la sphère privée, n’a aucune valeur dans la sphère publique. Le recul de la vertu est désormais le fléau de notre temps. Il est légitime de faire preuve de cupidité ; une seule chose compte, accumuler des richesses, peu importe comment, y compris à coups de primes scandaleuses ou d’évasion fiscale. Or, dans tout l’Occident, cette attitude a des conséquences de plus en plus perceptibles. La politique, les affaires et la finance en sont aujourd’hui affligées au point d’être dysfonctionnelles, et la population n’a plus aucune confiance dans ce qu’il est convenu d’appeler ‘les élites”. »
Il ne s’arrête pas là et continue :
« Aujourd’hui, l’Etat est jugé à la fois inefficace et répressif. Les riches n’ont aucun scrupule à dissimuler leurs richesses et l’évasion fiscale motivée par l’égoïsme est considérée comme une attitude légitime, voire une obligation morale. Le Royaume-Uni n’échappe pas à cette tendance. »
Il précise sa pensée :
« Aujourd’hui, nous traversons une période de révolte des élites, comme le redoutait il y a vingt ans l’historien [américain] Christopher Lasch. Le code éthique soutenu par les valeurs chrétiennes et garant d’une certaine équité a été sapé par la laïcisation et les préceptes du libre-échange. Et il n’y a plus non plus de mouvements de travailleurs puissants, portés par les valeurs du socialisme, pour obliger les élites à être honnêtes. »
Et il conclut :
« Il est temps que nos dirigeants - dans le secteur public comme dans le privé - rendent des comptes. »
Une nouvelle idéologie anglaise est-elle en train de naître ?
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