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Vivons-nous sous une dictature économique ?

Les acteurs du système financier mondial sont-ils des partenaires ou des ennemis ?

Le fantasme partagé par la gauche radicale et l’extrême droite que des individus peu nombreux manipulent les peuples dans le but de les exploiter est-il un tant soit peu fondé ? La perspective historique appliquée à deux krachs récents permet de comprendre l’ampleur du hold-up prélevé chaque année sur la richesse du globe par une élite. Cette brève analyse montre que les politiciens élus (gauche et droite confondus) sont plutôt incapables de contrôler un Moloch devenu maintenant dominant, les nations devenant peu à peu ses obligés.

Revenons donc sur les deux catastrophes financières des années passées, soit l’éclatement de la bulle Internet, puis la crise des “subprimes”, les deux préludant à la crise financière et monétaire sans précédent que nous traversons, le contribuable étant in fine sommé de payer en lieu et place des véritables coupables.

Le co-président de la banque Goldman Sachs au début des années 1990, Robert Rubin, suit Bill Clinton à la Maison Blanche où il dirige bientôt le Conseil économique national, pour finir ministre des Finances. Rubin est l’archétype même du banquier vedette de Goldman. Il fera même la couverture du Time avec son adjoint aux Finances Larry Summers et le patron de la Fed Alan Greenspan, sous le titre triomphant de : "Le comité pour sauver le monde”.

Durant son passage aux Finances, les mesures qu’il institue vont avoir des conséquences radicales sur le fonctionnement de la Bourse – à commencer par des avantages évidents concédés à Goldman Sachs, permettant à la banque de réaliser des profits obscènes. Le principe de l’escroquerie de la bulle Internet est du reste très facile à comprendre. Des sociétés en devenir, souvent parfaitement inconnues jusque-là, furent introduites en bourse, au mépris de toutes les règles prudentielles antérieures. Ce que l’investisseur lambda ignorait à ce moment-là, c’est que les banques avaient changé les règles du jeu pour améliorer l’apparence de ces prétendues "affaires". Elles avaient mis au point un système d’investissement à deux niveaux – une pour les initiés qui connaissaient les vrais chiffres et l’autre pour les profanes qui étaient invités à suivre des prix gonflés que les banques elles-mêmes savaient irrationnels. L'innovation majeure durant les années 2000 a donc consisté à abandonner les normes de contrôle. Depuis la Grande Dépression de 1929, il existait en effet de strictes règles de mandatement financier pour l’introduction en bourse : la société devait exister depuis au moins 5 ans et elle avoir dégagé un bénéfice pendant au moins 3 années consécutives. Mais Wall Street, suivant Goldman Sachs et son insatiable soif de l'or, jeta ces règles à la poubelle. Le problème c’est que personne ne révéla aux futurs cocus investisseurs que les données avaient changé, bien que toute la sphère bancaire le sache. Jay Ritter, professeur de finances à l’Université de Floride, spécialiste des introductions en bourse, affirme ainsi que les banques comme Goldman ne pouvaient ignorer que de nombreuses sociétés qu’elles introduisaient en bourse ne feraient jamais un centime de bénéfice. « Au début des années 1980, les plus grandes banques exigeaient 3 années bénéficiaires. Puis, ça a été un an, puis un trimestre. Au moment de la bulle Internet, les banques ne demandaient même pas une prévision de rentabilité  ».

Goldman a bien entendu nié avoir changé les normes de l’introduction en bourse durant cette période, mais ses propres statistiques démentent son affirmation. Parmi les 24 sociétés que la banque introduisit en bourse en 1997, un tiers perdaient de l’argent au moment de l’introduction. En 1999, au sommet de la bulle, la banque introduisit en bourse 47 sociétés, chiffre considérable et absurde. Dans les quatre premiers mois de l’année suivante, Goldman introduisit en bourse 18 sociétés (dont 14 perdaient déjà de l’argent à ce moment-là) ! Et toujours en 1999, les actions des sociétés introduites en bourse par Goldman montèrent de 281 % au dessus de leur prix d’introduction, comparé à une moyenne de 181 % pour Wall Street.

Comment Goldman réalisa-t-elle ce tour de magie, digne d’un Houdini ? Ils manipulèrent les prix des actions, grâce à la technique dite du “laddering”. Voici comment cela fonctionne : la banque elle même évalue l’entreprise X, détermine le nombre d’actions offertes au public et embarque le PDG pour une tournée auprès des investisseurs, moyennant une commission substantielle ( 6 à 7 % du capital récolté). Puis elle “consent” à ses meilleurs clients le droit d’acheter d’importantes quantités d’actions au prix d’introduction, mais en échange de promesse d’achat ultérieurs de la même action, au prix du marché.

Cette exigence, apparemment innocente, donne à la banque une connaissance d’initié (c’est à dire à usage exclusif) de l’évolution du prix de l’action, puisqu’elle est certaine que ces clients vont acheter plus cher, plus tard, des actions – ils s’y sont engagés.

De cette façon, Goldman sait que le prix de l’action va monter mathématiquement, après l’introduction en bourse.

Goldman fut poursuivi plusieurs fois par des actionnaires pour s’être livré au “laddering” à l’occasion de l’introduction en bourse de plusieurs sociétés Internet. Ces manœuvres frauduleuses furent dénoncées par exemple par Nicholas Maier, manager du Hedge funds “Cramer & Co”. Le dit Maier révéla à la SEC que, entre 1996 et 1998, il avait été forcé à plusieurs reprises de participer à des opérations de “laddering” pour les introductions en bourse de Goldman. En 2005, Goldman accepta de payer 40 millions de dollars pour ses fraudes de laddering – une amende ridicule comparée aux énormes profits que la banque avait réalisés avec cette technique de vol à la tire. Une autre pratique à laquelle Goldman s’est livrée durant la bulle Internet était le « spinning », qui relève lui de la pure et simple corruption. Dans ce cas, la banque offrait aux cadres dirigeants de la société mise en bourse des actions à un prix très préférentiel, en échange de leur clientèle. Les banques qui pratiquaient le spinning sous-estimaient le prix initial d’introduction, s’assurant ainsi que ce prix bas, dont elles faisaient profiter les initiés, allait très probablement monter rapidement, apportant ainsi des gains immédiats aux cadres favorisés.

 D’après un rapport du comité des services financiers de la Chambre des représentants, Goldman a fait cette offre spéciale aux cadres dirigeants de 21 sociétés qu’elle a introduites en bourse ! Goldman s’indigna publiquement du rapport, le qualifiant de « flagrante distorsion des faits » - peu de temps avant de mystérieusement payer, sans faire de vague, une amende de 110 millions de dollars, et ce pour mettre fin à une enquête sur le “spinning” lancée par les autorités de l’État de New York. « Le spinning lors des introductions en bourse n’était pas une peccadille sans importance », affirma le procureur général de l’époque, Eliot Spitzer. « Au contraire, c’était une partie intégrante d’un schéma frauduleux destiné à gagner des parts du marché de la banque d’affaires.  »

Entre 1999 et 2002, c’est à dire durant les années Internet, la firme a versé 28,5 milliards (oui, vous avez bien lu, milliards) de dollars de primes à ses dirigeants...

Passons à présent aux subprimes : Goldman et ses confrères de même farine utilisèrent en l’espèce deux méthodes combinées d’arnaque. En premier lieu, ils créèrent des liasses de centaines de différents prêts immobiliers en dissimulant ceux qui étaient voués à la cessation de paiement au milieu d’autres, mieux notés, dans des instruments appelés CDO (titrisation). En second lieu, pour se prémunir contre le risque sur leurs propres paris insensés, Goldman et ses suiveurs contractèrent des assurances appelées CDS. Il convient de décerner une palme du cynisme à ces innovateurs : les produits financiers dérivés comme les CDO et les CDS avaient déjà provoqué une série de catastrophes financières dans le passé (Procter & Gamble et Gibson Greetings y perdirent tous deux des fortunes). Après l’éclatement de la bulle immobilière, Goldman subit de plein fouet une vague de procès, dans lesquels la banque fut accusée d’avoir caché l’information sur la qualité des prêts immobiliers qu’elle émettait. Les autorités de l’État de New York poursuivent Goldman ainsi que 25 autres courtiers pour avoir vendu des liasses des prêts de Countrywide à des fonds de pension de fonctionnaires, lesquels avaient perdu 100 millions de dollars sur leur investissement. Le Massachusetts aussi a enquêté sur Goldman pour les mêmes raisons, agissant au nom de 714 détenteurs de prêts prédateurs. Mais une nouvelle fois, Goldman s’en sortit avec les honneurs, si l’on peut dire, écartant les menaces en acceptant de payer une somme dérisoire, 60 millions de dollars – soit environ ce que les CDO leur rapportait en un jour et demi, pendant le boom immobilier !

Bien qu’il ait déjà organisé le renflouage de Bear Stearns quelques mois auparavant et qu’il ait aussi renfloué les prêteurs quasi-privés Fannie Mae et Freddie Mac, le désormais célèbre Henry Paulson (secrétaire du Trésor et ancien directeur de Goldman !) choisit d’abandonner en rase campagne Lehman Brothers – un des derniers concurrents réels de Goldman – sans intervention publique. Le lendemain même, Paulson donna le feu vert au renflouage massif – 85 milliards de dollars – d’AIG, lequel paya à Goldman 13 milliards de dollars qu’il lui devait. Grâce au sauvetage, la banque finit donc par être payée en totalité pour ses mauvais paris. Immédiatement après le renflouage d’AIG, le même Paulson annonça le sauvetage de l’industrie financière par le gouvernement fédéral, un plan de 700 milliards de dollars appelé le TARP « programme de soulagement des avoirs en déshérence » et plaça un banquier de Goldman en charge de gérer ce fonds. Afin de profiter de l’argent du sauvetage, Goldman annonça de manière surprenante qu’elle se transformait en une holding bancaire : cette conversion soudaine lui donnait en réalité accès non seulement à 10 milliards de dollars du TARP, mais aussi à toute une galaxie de financements publics moins voyants – notamment des prêts à taux réduits de la Réserve Fédérale. Fin mars 2009, la Fed avait prêté ou garanti au moins 8.700 milliards de dollars, pour une série de nouveaux renflouages...

Le message global de tout ceci est que pour certains privilégiés, quand il s’agit de bonnes affaires, tout est licite ! Mal défendus par une classe politique qui ne remet pas le système en question, ni n'en punit ses dérives, les contribuables occidentaux devront envisager en tout cas le régime sec dans les années à venir : sauf à construire un virage radical de gouvernance, tous devront mettre la main à la poche sans discontinuer, aux fins de consolider l’insolente aisance de ceux qui les flouent légalement...


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13 réactions à cet article    


  • Daniel Roux Daniel Roux 2 décembre 2011 11:05

    L’auteur décrit bien le mécanisme pathogène pour la société, des opérations financières de l’oligarchie ainsi que de son activisme dans la corruption des pouvoirs.

    Ce qui est remarquable est l’emploi martelé dans les discours du mot « démocratie ». Le peuple doit continuer à croire que tout se décide en son nom et sous son contrôle.

    C’est évidemment une mascarade. Sous le masque délabré, c’est une société d’inspiration féodale qui se développe, une dictature du 1% des plus riches. 


    • anty 2 décembre 2011 18:07

      1% c’est un peu trop
      cela fait 70 000 000 des riches dans le monde
      Les riches doivent représenter 1 à 2 millions de personnes sur terre (à tout casser)


    • magneticpole magneticpole 2 décembre 2011 11:37

      L’oligarchie est un virus, tant que nous n’agissons pas en système immunitaire, cela sera ainsi.


      • OUI NOUS VIVONS DANS UNE DICTATURE FINANCIERE DE.BANKSTERS

        voici mon cas...nous avons une petite maison et une seule pension moyenne ...nous nous sommes endettés pour aider notre fille qui élève seule notre petit fils de 9ans depuis septembre elle n’a plus qu’un mi-temps car elle a des bons patrons médecins.... ( ELLE A FAIT UNE ts en mars 2011) comme tous grands parents en citoyens correct nous nous sommes occuppés de notre petit fils ce qui a couté cher surtout a PARIS...

        NOUS AVONS VOULU FAIRE UN RACHAT DE CREDIT POUR POUVOIR LUI DONNER 400 EUROS/MOIS
        LE BANQUIER UN ARNAQUEUR NOUS DEMANDAIT POUR 66000 EUROS SUR 15 ANS 33000 EUROS DINTERETS + 12560 EUROS DE COMMISSION ET FRAIS CELA FAISAIT DU .66% (LE revolving a 22ù est beaucoup moins cher)
         66% D’INTERET......NOUS AVONS REFUSE....
        CAR EN PLUS ILS METTAIENT NOTRE PETITE MAISON SOUS HYPOTHEQUE...

        est ce normal que des organismes financiers comme cetelem...finareff et aerios (lyon)
        prennent autant de commissions (12560 euros et 33000 euros d’interets
        j’ai porté plainte...j’attendais ce pret depuis 3 mois sur 10 dossiers j’en avais garde 3....1) 8000 euros de frais...900 euros d’hypotheque...2 ) 4000 euros de commission 3) 3200 euros hypotheque comprise...une banque publique bien connue sur le marché financier de PARIS
        CE QUI M ’A FAIT HESITER

        A ce banquier public faisait la pub sur internet...pret sur 30 ans et:ou 85 ans d ’age

        quels banksters merci ROCKFELLER...LAGARDE MERKELL SARKO...engeance du diables

        SARKO LE VOYOU MELE A 70 GROSSES AFFAIRES (dont 2 avec 2011 morts...katachi et médiator...)
        PENDANT CE TEMPS NOS ELUS ET GENS DU SPECTACLE SE PAYENT 12 JOURS A 25000 EUROS A L ILE MAURICE OU A 10000 EUROS JOUR DANS UN PALAIS RIAD A MARRACKECH...
        EXEPMLES FRANCAIS B MONTIEL...DEPARDIEU...DUBOSC

         C EST DINGUE ILS DEPENSENT EN 1 JOUR ?NEE CE QUE MA FILLE FERAIT DURE 3 MOUS LOYER...ALIMENTATION...TOUT COMPRIS

        ELLE ST BELLE NOTRE FRANCE DE L AGCS...DE L OMC...DE LA BCE...SDE CE SALAUD DE SARKO QUI LOGENT LES PRESIDENTS DU G20 DANS DES SUITES A 37000 EUROS LA NUIT.

        MA FILLE VIT UN AN AVEC CELA
        C EST UN SCANDALE !!!! indignons nous resistons a ce nouvel ordre mondial....du FRIC ROI !!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!


      • RECTIF DE VIEUX PAPI MALADE

        - ile maurice 250000 euros pour 12 jours.5 etoiles

        - maroc...riad palais...10000 euros la journée

        clients connus bechkam...julia rober paris hilton...depardieu ...dubosc....montiel..clavier...reno
        tous amis de l’empereur de poche


      • dom y loulou dom y loulou 2 décembre 2011 12:02

        « Le fantasme partagé par la gauche radicale et l’extrême droite ... »


        que les extrêmes fantasment est une chose, les autres fantasment aussi grave, surtout s’ils aiment croire les balivernes des écrans clignotants et les décolletés des speakerinnes, mais qui vous a dit que les amoureux de la vérité sont des extrémistes ?

        toutes mes excuses, les merdias bien sûr vous l’ont dit et vous l’avez pris comme du pain béni...

        mais les amoureux de la vérité ne sont ni des extrémistes ni des surhommes ni des pancartables, juste des citoyens qui réfléchissent et qui essaient de maintenir du sens dans un système qui n’en a PLUS AUCUN hormis de faire des courbettes devant des fous

        homis de faire tourner des usines d’armement

        le « système économique » des Rothschild ne veille absolument qu’à cela

        • Alexis_Barecq Alexis_Barecq 2 décembre 2011 13:37

          Oui.

          Nous visons sous une dictature économique.


          • anty 2 décembre 2011 18:30

            Nous vivons dans une dictature qui se dit démocratique...


          • Pyrathome Pyrathome 2 décembre 2011 14:10

            On appelle ça « le système totalitaire marchand » .......



            • Kuota Kuota 2 décembre 2011 15:25

              Goldman sachs est dans tous les traquenards, et même dans la marée noir du Golf du Mexique.

              Il est clair que l’ennemie n° 1 de l’humanité c’est l’oligarchie financière, et l’absence de vrai démocratie.

              Les médias et politique ne cessent de nous proposer des leurres comme les immigrés, les pauvres, les malades, les chomeurs, les fraudeurs, les jeunes des banlieue, les vieux etc.... Trop de français tombent dans ce panneau du conflit horizontale entre gens du peuple au lieu de lever la tête vers cette élite oligarchique..... qui elle est responsable de tout ce m*******.

              Courage, à force de dénoncé le vrai source de nos maux on finira pas attendre le seuil du 100ème singe.... http://info-resistance.org/about/resister/


              • TSS 2 décembre 2011 18:25

                Poser la question c’est y repondre... !!.
                .
                .


                • mortelune mortelune 7 décembre 2011 11:40
                  Joli article bien vu !
                  J’ajoute que ce qui se passe en Grèce donne la réponse à toutes les questions.

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