Agriculteurs : manifester à l’aide de ce qui nous tue
Les agriculteurs manifestent depuis plusieurs jours, demandant une revalorisation de leurs marges. Ce serait d’autant plus dramatique s’ils n’avaient pas alimenté eux-même ce système qui leur est défavorable.
C’est un peu le remake du type qui scie la branche sur laquelle il s’est posé, en version agricole : à la place de la scie, ils utilisent une tronçonneuse.
Depuis plusieurs jours, les agriculteurs, après des années de crise, de marges toujours plus réduites, de suicides, de mépris, ont décidé de manifester en masse, bloquant de grands axes pendant quelques jours, pour finalement se tourner vers des actions plus localisées, ciblant les centres d’approvisionnements ou certains produits, notamment des produits d’origine étrangère.
Mais d’où vient le problème ? Simplement, de la mondialisation et de l’Europe qui favorise la libre concurrence, faussant la production locale : comment espérer tirer une marge équivalente quand les salaires, les aides et les coûts sociaux ne sont pas les mêmes selon les pays ?
Mais la faute ne revient pas simplement au "capitalisme", entité floue et indéfinie ; cette économie, ce sont notamment les différents acteurs qui l’ont accepté et qui l’alimentent, agriculteurs y compris, notamment par le biais des coopérations agricoles, censées au départ favoriser les différents agriculteurs, et qui, peu à peu, se sont transformées en empires tyranniques imposant ses propres conditions à ses propres membres qui ne voient plus d’autres alternatives...Et la condition numéro une, c’est la production à tout prix, produire, produire, toujours plus produire, quitte à surproduire, pour toujours plus réduire les prix... Et cette production intensive passe forcément par une agriculture intensive.
Et ce n’est pas près de s’arrêter, au vu des chiffres : utilisation des pesticides en hausse, ventes de tracteurs stables, projets de fermes usines de plus en plus nombreux...
Dès lors, comment être compatissant avec des gens qui utilisent les outils qui les ruine ?
D’autant plus que les agriculteurs clament haut et fort qu’ils nourrissent les gens, ce qui est vrai, mais est-ce que ça leur donne le droit pour autant de le faire au détriment de tout le reste ? Est-ce que ça leur donne le droit de polluer l’environnement en brûlant tout et n’importe quoi ? Est-ce normal qu’ils polluent des rivières et tuent des centaines voire des milliers de poissons simplement pour revaloriser des prix qu’ils ont en partie fixés de par leurs pratiques ?
Est-ce normal que la FNSEA et la FDSEA soient toujours les plus virulents et ne sont pourtant jamais condamnés et toujours écoutés ?
Les mesures annoncées ne vont, une fois de plus, que repousser l’échéance de la finalité d’un secteur sous perfusions. D’ici quelques années, voire moins, la situation sera identique, voire pire. Ce n’est pas en augmentant les aides que la dette des agriculteurs ne va pas continuer à se creuser, si les ventes ne suivent pas. Ce n’est pas en promouvant un produit quand les prix et les concurrents restent les mêmes, que les ventes décolleront. Ce n’est pas en favorisant les emprunts que les dettes vont diminuer. Et c’est encore moins en faisant porter le chapeau au loup que les problèmes vont se régler, surtout quand ce dernier n’a qu’un impact (limité) sur les ovins, et absolument pas sur les bovins, ni sur les produits laitiers, ni sur les œufs, et encore moins sur les cultures.
C’est l’histoire d’un secteur en crise qui n’arrive pas à se remettre en question ,aidé par un gouvernement incompétent qui ne pense qu’à son image, relayée par une presse avide de sensationnel en ces jours d’été ou l’actualité est morne. Cela pourrait être un bon sujet humoristique, s’il ne nous concernait pas toutes et tous...
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