Esca(lade) ?
En France, le sujet des pesticides est très passionnel, surtout chez les vignerons.
Voilà qu’avec la recrudescence de l’Esca, une des plus anciennes maladies de la vigne, encore très mal connue, certains viticulteurs montent au créneau pour réclamer le retour en grâce du bon vieil arsenic de soude, un produit particulièrement dangereux et hautement cancérigène, fort heureusement interdit en 2001.

L’Esca, appelé aussi l’apoplexie des vignes, pour métaphoriser une nécrose spectaculaire, fait un retour en force sans qu’on ne puisse en expliquer la raison, autrement que par une pluviosité anormale et le recul de certains traitements chimiques, hier encore autorisés.
Depuis quelques semaines, les vignerons voient ressurgir la maladie avec autant de crainte que les jeunes vignes sont maintenant touchées, alors qu’habituellement, ce sont plutôt les vieilles vignes de plus de vingt ans qui constituent la cible de prédilection du champignon malveillant.
Et comme il n’existe pas de moyen véritable de lutte directe et que les conséquences sont effectivement irréversibles pour les ceps atteints, les vignerons ont tôt fait de trouver un coupable idéal : la Commission Européenne, coupable d’avoir banni l’arsenic de soude de nos cultures.
Lorsqu’on sait qu’en matière d’arrosage chimique, la vigne reste loin devant le peloton des fruits contaminés, il y a lieu de s‘alerter face à la toute puissance du lobby viticole.
Chez les vignerons qui travaillent la vigne en bio, ce genre de déclarations irrite particulièrement.
"Si l’on ne sait pas grand chose sur l’Esca, on connaît en revanche très bien l’arsenic de soude, une belle saloperie, heureusement interdite depuis 2001" explique Monsieur Y, vigneron à Saint Bris le Vineux, dans l’Yonne.
A l’en croire, rien ne justifie l’emploi de l’arsenic de soude pour contrer l’Esca, vu la dangerosité du produit d’abord, mais aussi, parce qu’en l’état des connaissances scientifiques sur cette maladie, il est de loin préférable de laisser travailler les labos pour permettre d’aboutir à des traitements naturels et respectueux de l’environnement.
Pour Monsieur Y, la prévention réside d’abord dans le travail de la vigne. Pour lui, certaines méthodes de taille enseignées depuis des années pourraient bien fragiliser la vigne, en la rendant plus perméable au champignon.
"On continue de tailler et de palisser jusqu’à avoir le fruit d’un seul côté, ce qui est une aberration. Il suffit d’imaginer ce qu’un tel traitement donnerait sur l’homme... »
Quand on sait que les champignons se développent d’autant mieux que la plante se trouve dans de mauvaises conditions de culture, la conduite de la vigne et notamment la préparation des sols, tout comme la qualité du porte-greffe peuvent légitimement être évoqués comme facteurs susceptibles d’intervenir dans la mortalité prématurée des ceps.
Si, depuis 2001, les vignerons n’ont fort heureusement plus le droit d’utiliser des produits à base d’arsenic de soude, il faut espérer que les laboratoires trouvent rapidement une solution au problème de l‘Esca.
En effet, ce problème s’ajoutant à la mévente dans le vignoble français, la crainte est forte de voir resurgir le spectre de la révolte des vignerons, alors que se profile une certaine échéance électorale...
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