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Invisible biodiversité

« Si les gènes sont un alphabet, alors les espèces sont des mots et les écosystèmes des livres. » Edward O. Wilson

Il y aurait à ce jour 1.800.000 espèces végétales et animales connues et décrites. Mais la fourchette d’estimation assez floue du nombre d’espèces potentielles évaluée par les experts se situe entre dix et cent millions ! Autant dire que nous ne voyons même pas la partie émergée de l’iceberg. Nous risquons de ne jamais connaître la plupart de ces espèces qui sont appelées à disparaître par le fait de la pression humaine. Le biologiste et entomologiste Edward O. Wilson, le premier à avoir utilisé le mot BIODIVERSITÉ comme titre d’un de ses nombreux livres, nous met en garde contre l’érosion des surfaces naturelles de notre « île Terre ».

Avec Robert MacArthur, ils ont établi ce qu’ils nomment la « Théorie de la biogéographie insulaire », à savoir que « Le nombre d’espèces qui vivent dans une aire donnée croît de manière logarithmique avec sa superficie ». La règle vaut évidemment pour l’inverse et nous sommes confrontés à une réduction drastique de nos écosystèmes qu’Homo sapiens demens (sensu Edgard Morin), ivre de pouvoir, met à mal par anthropocentrisme et cupidité. L’érosion de la biodiversité est ainsi entrée dans une phase qui pourrait nous conduire vers ce que certains auteurs nomment déjà la sixième extinction massive d’espèces, par la faute du petit homme borné. Chaque espèce portée au déclin est une perte d’informations capitales. Ce que nous pourrions perdre en un siècle ne pourra se rétablir qu‘en quelques centaines de millions d’années comme l’étude des cinq précédentes extinctions massives dues à des causes naturelles nous le démontre. Pour la première fois, cette perte colossale et rapide de biodiversité est due aux pressions anthropiques et non plus à des catastrophes physiques. L’UICN, Union internationale de conservation de la Nature, relève qu’actuellement sur une très courte période, les espèces se fragilisent, passant du statut de « En sécurité » à celui de « Vulnérable » puis très rapidement à celui de « En danger », « En danger critique » et enfin au rang final d’ « Éteint ». Ce mouvement érosif est galopant. Sans vraiment pouvoir nous donner la mesure de cette accélération, Edward O. Wilson affirme que ce taux d’extinction est de cent, voire mille, ou plus probablement dix mille fois supérieur à ce qu’il était avant que l’homme ne passe du rôle originel de prédateur - de la préhistoire jusqu’aux peuples premiers - à celui de destructeur - inhérent aux civilisations, notamment depuis notre humanisme, puis nos révolutions industrielles et agricoles, jusqu’au capitalisme du productivisme forcené.

Mais peut-on mettre la biodiversité en équation ? Certains s’y essaient, mais on nage un peu dans l’irrationnel tant nos connaissances ne font encore qu’effleurer le Vivant. Notre manie de mettre la vie dans des « tiroirs », de nommer, de découper, de classer, d’avoir aussi sans doute encore à découvrir et nommer des dizaines de millions de nouvelles espèces, ce qui en soi peut donner le vertige, nous fait perdre de vue que cette érosion exponentielle, avec à la clef cette immense perte d’information du Vivant, est irrémédiable et dommageable pour notre avenir du moins à notre échelle de temps « humain ».

Ce qui est certain, c’est qu’un écosystème diversifié est une assurance contre le risque de déséquilibre, et que nous faisons exactement l’inverse en les déstabilisant, en les déconstruisant tous les uns après les autres.
L’étude écosystèmique est une discipline assez jeune, mais il est un fait maintenant avéré, c’est que « Tout habitat naturel géré par l’homme soit en habitat résidentiel, soit en habitat agricole, forestier, … ou de loisir, voit sa biodiversité décliner de façon exponentielle ».

Et toute espèce dont l’habitat se dégrade est vouée à la disparition. Ce postulat devrait nous faire réfléchir.

La « vie qui se voit » est une infime minorité de ce qui existe sous nos pieds. Raison de plus pour la traiter avec le plus grand respect et lui appliquer d’urgentes mesures de précautions. Mais comme nous sommes atteints d’une incurable cécité écologique pour déjà évaluer et respecter « cette vie qui se voit », alors qu’attendre de nous pour celle, invisible, innomée, et méconnue ?

Dans le terme BIODIVERSITÉ, il faut voir l’ensemble du vivant, y compris les écosystèmes, les biocénoses, les espèces et les gênes. Vouloir protéger une espèce, aussi emblématique soit-elle, sans protéger son habitat est oiseux et ne s’inscrit que dans une démarche politique et courtermiste.


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2 réactions à cet article    


  • Marc Viot Marc Viot 7 novembre 2011 13:41

    A quelqu’un qui me demandait de quel bord j’étais sur l’échiquier politique, j’ai répondu un jour : « aucun ... moi, je défend le plateau ».


    • Ruut Ruut 10 novembre 2011 10:46

      Une ville est un écosystème.
      Notons que l’humain crée luis aussi de nouvelles espèces animales et végétales via les OGM.

      Dans 1 Milliards d’années, nous verrons bien ce qui aura survécu.
      Je doute que les créations humaines aient une durée de vie si longue.

      Il restera les zones irradiées de nos frasques nucléaires.

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