La bonne conscience n’efface pas la faute écologique
L’écologie a le vent en poupe. On nous en vend à toutes les sauces.
Mais dans certains cas, le procédé est douteux, fondé simplement sur une manipulation grossière ou faisant appel à notre bonne conscience, comme si cela suffisait à transformer le procédé de façon miraculeuse.
Étudions quelques cas distincts
1- Les produits à bio
Le biocarburant à partir d’algues
Le principe est simple : des algues absorbent du dioxyde de carbone afin de se multiplier. Ensuite on filtre pour récupérer les algues et on en extrait une huile qui sert à fabriquer du biocarburant.
Et on nous vante le mérite du procédé : plus de rejets de CO2. Qu’il provienne d’une centrale à charbon, d’une cimenterie ou de toute autre industrie, les algues l’absorbent. C’est écologique…
Réfléchissons un instant ? Qu’est-ce qui est écologique ? Le biocarburant ?
En réalité, il s’agit là d’une manipulation de l’esprit, façon Houdini : Le fait que le carburant soit fabriqué à partir d’algues ne prouve en rien que le carburant soit écologique. Car il ne faut pas confondre biologique et écologique.
Car le carbone émis par la source polluante (pétrole, charbon, etc.) et qui est absorbé par les algues, se retrouve dans l’huile puis dans le biocarburant. Et la combustion de celui-ci ne fera que le libérer à retardement seulement. L’huile n’est qu’un moyen de stockage. Le reste n’est que de la transformation de matière…
Le biocarburant sera écologique lorsque la source de carbone le sera.
Le bioplastique
Le bioplastique est de plus en plus à la mode. En effet, dans un monde qui doit se préparer à une disparition du pétrole dû à l’épuisement de la ressource et/ou à la lutte contre le réchauffement climatique, nous ne sommes simplement pas prêts à nous passer de tous les sous-produits qui ont investi notre quotidien : vêtements, meubles, électroménager, brosse à dents, …
L’idée est donc de développer les mêmes matières nécessaires sans user de pétrole. On cherche donc à fabriquer du plastique à partir de sources écologiques et renouvelables. Comme c’est le cas pour Danone (http://www.usinenouvelle.com/article/danone-adopte-une-bouteille-vegetale-pour-actimel.N147863) avec sa bouteille en polyéthylène provenant du bio-éthanol brésilien. Si l’impact écologique en amont est non négligeable, puisque la société annonce une réduction de l’empreinte carbone de 20%, il ne faut pas oublier ensuite le reste de la vie du produit. Si celui-ci n’est pas recyclé et réutilisé, il ira grossir les décharges ou s’accumuler dans les océans ( http://contreinfo.info/article.php3?id_article=1658 ). Que l’origine soit pétrolière ou biologique, le produit obtenu est le même, avec les mêmes effets et les mêmes défauts.
2- Le recyclage
Le recyclage des pneumatiques
Encore une bonne idée façon Houdini : on recycle les pneumatiques en leur donnant une nouvelle forme, une nouvelle vie. Broyés, réduits en granulés, ils servent à réaliser des terrains de tennis, et autres aires d’athlétisme.
Un détail ici : http://www.encyclo-ecolo.com/Pneu%28s%29_et_pneumatique
En voilà une bonne idée ! D’un objet encombrant mais bien visible que je pouvais encore maîtriser ou stocker, on me l’a broyé et étalé dans la nature. Le stock de pneumatiques semble avoir diminué, mais c’est juste parce qu’il a été disséminé dans la nature. Il n’en demeure pas moins toujours aussi dangereux. Et toujours aussi peu bio dégradable…
L’électronique
Il est bien rare qu’un ordinateur soit inutilisable lorsqu’on s’en débarrasse. Bien souvent, il est mis au rebus car trop peu puissant pour suivre l’évolution logicielle.
Lorsqu’il est mis au rebus, l’ordinateur finit parfois dans une usine de démantèlement en Afrique ou en Asie, où les composants seront dessoudés (au sens propre) un par un, séparés et retraités (parfois). Et l’on s’émeut des conditions déplorables dans lesquelles cela est fait, aboutissant souvent à des pollutions locales (http://denis-zodo.over-blog.com/article-28466932.html).
Et c’est alors que Houdini intervient encore : Plutôt que de jeter nos ordinateurs, si nous leur donnions une seconde jeunesse ! Ces ordinateurs, une fois réparés et mis à niveau, pourraient servir à d’autres. A des pauvres de notre pays, ou à des pauvres de pays pauvres.
Alors, des associations ramassent gratuitement des ordinateurs afin de réaliser une bonne action : les remettre en état et les envoyer en Afrique où ils serviront à des écoles, des enfants, des hôpitaux, pour réduire la fracture numérique dans ces pays.
C’est fort louable ! Mais ensuite ?
Lorsque ces écoles, ces enfants, ces hôpitaux auront usé les ordinateurs jusqu’à la carte mère, que deviendront-ils ? Seront-ils rapatriés en Europe pour y être déconstruits selon nos normes environnementales en vigueur ou bien le retraitement sera-t- il laissé à la charge des pays en question ?
J’ai posé la question à quelques associations, je n’ai pas eu de réponse jusqu’à présent.
Mais je gagerais bien qu’en définitive, ces ordinateurs se retrouvent bien dans les mêmes filiaires de recyclage artisanal, allant ainsi polluer les mêmes rivières, les mêmes sols, les mêmes nappes phréatiques… Personnellement, j’aurais préféré qu’on ne leur envoie rien et qu’on déconstruise les composants chez nous, dans nos usines...
Comme pour le biocarburant à partir des algues ou du bioplastique, on peut penser à tort que la bonne conscience intermédiaire ou la source biologique efface le procédé polluant et remet les compteurs à zéro.
Mais il n’en est rien ! La bonne conscience n’efface rien. La bonne action non plus.
Arrêtons de nous voiler la face derrière des transformations et des manipulations dignes de la prestidigitation.
Et si, pour une fois, au lieu de déployer des trésors d’ingéniosité à réparer nos erreurs, nous utilisions notre intelligence à ne pas en commettre ?
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