Le scénario Négawatt 2011 est-il à coté de la plaque ?
Le scénario Negawatt 2011 a été publié le 29 septembre dernier.
Ce scénario tient-il la route ?

Le scénario négaWatt 2011 présente des éléments particulièrement intéressant sur les aspects bâtiments, transports et industrie.
Cependant, c'est sur l'aspect production d'électricité que ce scénario soulève des interrogations.
En 2050, ce scénario propose une production d’électricité basé quasi-exclusivement sur les renouvelables :
- 194 TWh d’éolien
- 90 TWh de photovoltaïque
- 77 TWh d’hydraulique
- 18 TWh de géothermie
- 7 TWh d’énergies marines
- 8-9 TWh de gaz
Soit un total de 394 TWh.
Cette production sur l’année donne en moyenne une puissance instantanée de 45 GW.
La consommation devrait en 2050 comme aujourd’hui être supérieur en hiver qu’en été, disons dans ce scénario en moyenne entre 30 et 40 GW l’été, et entre 50 et 60 GW l’hiver (en supposant que l’on arrive à diminuer la puissance de pointe en hiver de plus de 30 %, de 85-90 GW aujourd’hui à environ 60 GW en 2050).
Dans ce scénario, on peut évaluer que les puissances installées pour chaque type d’énergie seraient les suivantes :
- 194 TWh d’éolien -> 97 GW installé (facteur d’utilisation de 23 %, d'après RTE)
- 90 TWh de photovoltaïque -> 84 GW installé (facteur d’utilisation de 12 %)
- 77 TWh d’hydraulique -> 28 GW installé, légèrement supérieur à aujourd’hui
- 18 TWh de géothermie -> 2 GW installé, si on suppose une production continue
- 7 TWh d’énergies marines -> 1 GW installé, si on suppose une production continue
- 8-9 TWh de gaz -> 3 GW installé, si on suppose un facteur d’utilisation de 30 %, 6 GW installé, si on suppose un facteur d’utilisation de 15 %
Peut-on m’expliquer comment cette offre de production peut permettre de satisfaire une demande de disons 60 GW, un soir d’hiver (il fait nuit, la production photovoltaïque est de 0 GW), sans vent (il est fréquent qu’en situation anticyclonique, il n’y ait quasiment pas de vent sur toute la France, ce qui donnerait une production éolienne < 4 GW (par exemple le 2 octobre 2011 à 14h, le taux de charge de l’éolien en France était de 4%)) ?
La puissance disponible serait au maximum de 4 GW d’éolien + 28 GW d’hydraulique + 2 GW de géothermie + 1 GW d’énergie marine + 6 GW de gaz (si l’on considère cette puissance installée) = 41 GW, bien loin des 60 GW demandés.
Le scénario négaWatt ne me parait donc pas tenir la route.
De même, dans ce scénario, que fait-on quand le vent souffle sur toute la France (production éolienne > 60 GW) et qu’il fait grand soleil (production photovoltaïque > 60 GW), et que l’on se retrouve avec une production > 120 GW pour une demande d’environ 50 GW ? La capacité d’exportation de la France ne dépasse actuellement pas 15 GW.
Le problème est générique à tout scénario de production d’électricité basé en grande partie sur l’éolien et le photovoltaïque : l’intermittence de ces énergies nécessite d’autres moyens de production sollicitables en l’absence de vent ou de soleil. En pratique, les énergies pouvant être utilisés à cette fin ne sont que le charbon et le gaz, pour le plus grand malheur de notre fragile climat.
C’est d’ailleurs la voie choisie par l’Allemagne, qui après sa décision de sortir du nucléaire (pour la plus grande joie des écologistes) a prévu la construction de 20 GW de nouvelles centrales à gaz et à charbon (sans que cela ne paraisse déranger ces mêmes écologistes).
Enfin, le scénario propose de stocker de l’électricité sous forme de méthane, ce qui peut à première vue paraitre être une bonne idée, mais ne me semble en fait pas si évident.
Tout d’abord, pour stocker de l’électricité sous forme de méthane, il faut du CO2 en grande quantité et sous forme quasi-pure. Il faudra donc brûler du gaz (ou du charbon), ce que pourtant le scénario vise à réduire au maximum, et être capable d’extraire sur les centrales à gaz (ou à charbon) en question le CO2 des gaz de combustion, ce qui pour l’instant n’existe pas sauf à petite échelle, et réduira grandement le rendement de l’installation vue l’énergie nécessaire à l’extraction.
Le scénario prévoit de stocker en 2050 33 TWh par an d’électricité sous forme de méthane, tandis que la combustion concentrée de gaz dans des centrales électriques (seul lieu où il sera possible d’extraire du CO2 des gaz de combustion) prévoit de produire 8 TWh d’électricité (donc en brûlant 16 TWh de gaz en énergie primaire, avec un rendement de 50%).
Où donc trouver tout le CO2 nécessaire à stocker 33 TWh de méthane ?
Le scénario Négawatt 2011 laisse donc à désirer...
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