Perspectives d’avenir : observatoires et indicateurs de biodiversité
Des échos du Salon européen de la recherche et de l’innovation 2006. L’Union européenne s’est lancée dans le combat pour la biodiversité et a fixé à ses Etats membres un objectif ambitieux à l’horizon 2010 : stopper l’érosion actuelle. Pour pouvoir répondre à ce défi, encore faut-il pouvoir mesurer la progression. C’est pourquoi le Muséum national d’histoire naturelle a lancé le projet Vigie-Nature, présenté par l’enseignant-chercheur Denis Couvet, le 9 juin dernier.

Si la disparition d’espèces est bien connue pour les mammifères et les oiseaux, elle l’est beaucoup moins pour les autres familles animales ou végétales. Et pourtant, l’impact de la perte de biodiversité sur les activités humaines n’est pas négligeable.
Impacts socio-économiques des pertes de biodiversité
Ils peuvent être de différents ordres. Les perturbations météorologiques, par exemple : la disparition de certains écosystèmes accentuent leur impact :
- les arrachages de mangrove dans le cas des tsunamis
- la dégradation des zones humides aux abords de La Nouvelle-Orléans, alors que 5 milliards de dollars auraient suffi pour les rénover.
Par ailleurs, on observe une augmentation de la fréquence de maladies émergentes telles que la maladie de Lyme (corrélée à la diversité des vertébrés, par un effet tampon) ou encore le virus de West Nile (corrélé à la diversité des oiseaux). Quant à la grippe aviaire, force est de constater qu’elle a eu des effets catastrophiques dans les élevages (faible diversité) mais pas chez les oiseaux migrateurs, qui sont pourtant fréquemment touchés.
Bénéfices associés à la diversité dans les champs agricoles
Une expérience de plantation menée en Chine, et mélangeant deux variétés de céréales, a conclu à un gain du rendement (revenu multiplié par deux) associé à des économies de pesticides. Seul inconvénient : une technique de fauchage plus complexe.
Des observations menées sur une large échelle en Italie (Perrings, 2003) ont conclu à une corrélation entre le revenu agricole et : 1) la diversité des céréales 2) la diversité des variétés de blé dur.
Nécessité de disposer d’observatoires de la biodiversité
Pour pouvoir prendre la dimension d’un phénomène aussi grave que le changement climatique, des organismes comme Météo-France disposent d’un réseau maillé d’observatoires particulièrement resserré. A l’image de ce que devrait être un réseau d’observation de la biodiversité qui pourrait étudier des variations significatives dans l’espace et dans le temps.
C’est pourquoi le Muséum a lancé le projet Vigie-Nature afin d’assurer le suivi de l’abondance et de la diversité d’espèces communes (végétation, invertébrés, vertébrés), impliquant divers organismes et s’appuyant sur des réseaux d’observateurs.
Structures existantes, aux plans national et international
Dans ce cadre, certaines structures existent déjà. L’observatoire STOC (suivi temporel des oiseaux communs) permet la quantification (observation standardisée définie par un protocole), et la représentativité des habitats et des facteurs associés aux changements globaux. Les résultats sont entre autres les suivants :
- diminution de 10% de l’abondance en 10 ans, très variable selon les espèces et les habitats (généralistes + 7%, bâtis 0, forestiers - 17%, agricoles - 29 %) ; ainsi, le nombre de Pouillot fitis (espèce transsaharienne) a diminué de 57 %
- corrélation négative entre le déclin des populations d’oiseaux et la productivité agricole.
La diversité des communautés végétales a été étudiée dans le Wisconsin et il apparaît :
- une diminution de 11,5% du nombre d’espèces (sur une parcelle de 4 m²) entre 1940 et 2000, et atteignant 50% dans les espaces protégés
- une uniformisation des écosystèmes.
En cause, le passage d’un paysage forestier à un paysage agricole, la disparition des carnivores entraînant une prolifération des herbivores et une diminution de la diversité agricole. A tel point que le loup a été réintroduit en 1990 dans le parc du Yellowstone pour contrôler les herbivores (effet indirect sur la vigilance des wapitis).
Une science participative
Outre l’intérêt de compléter le réseau d’observatoires professionnels, le projet du Muséum est un projet collaboratif faisant intervenir différents acteurs (ONG, associations...). Si l’on peut critiquer sa mise en place, le manque de moyens associés et les volontés politiques qui sous-tendent le projet, il demeure que cette démarche apporte des perspectives très intéressantes. Les participants à ces projets scientifiques d’observation et de modélisation sont autant d’interlocuteurs, éléments moteurs de la valorisation auprès des collectivités locales et du grand public. Leur participation s’étend à l’élaboration de scénarios environnementaux. La prise en compte de l’ensemble des mécanismes (impacts de la consommation...) entraîne la modification des comportements : le réseau prend conscience de l’approche d’effets indésirables et une boucle vertueuse se met en place (prédictions auto-contredites).
Pour plus d’informations :
- article Wikipedia,
- site officiel du Muséum national d’histoire naturelle,
- site de Vigie-NatureVigie-Nature,
- présentation du conférencier.
Documents joints à cet article

Ajouter une réaction
Pour réagir, identifiez-vous avec votre login / mot de passe, en haut à droite de cette page
Si vous n'avez pas de login / mot de passe, vous devez vous inscrire ici.
FAIRE UN DON