« Plante ton slip », Barbara !
C’est l’ADEME* qui a lancé cette opération originale en France. Initiée en 2016 par des agriculteurs canadiens, elle consiste à mettre un slip en terre pour évaluer l’activité biologique du sol. En France, cette pratique a d’ores et déjà été reprise ici et là par des particuliers et des associations…
Comme chacun le sait, la terre est vivante : entre les diverses bestioles qui vivent en sous-sol et les innombrables micro-organismes qu’elle accueille, nombreux sont les acteurs capables de « digérer », plus ou moins rapidement, les objets qui ont été enfouis. Or, plus un objet se dégrade vite, plus cette transformation est un indicateur de la qualité du sol, de sa capacité à se régénérer et à transformer les intrus en matières nutritives. C’est précisément pour savoir à quoi s’en tenir sur leurs terres cultivables que des agriculteurs québécois ont, en 2016, lancé l’opération « Plante ton slip ».
Le principe est simple : il consiste à enterrer à une quinzaine de centimètres de profondeur dans la couche arable – si tout va bien, elle est riche en humus, en sels minéraux et en micro-organismes – un vieux slip en coton puis à retourner voir deux mois plus tard dans quel état il est. En période normale – hors épisode de sécheresse marquée** –, le slip doit être retiré du sol en lambeaux. Si tel n’est pas le cas, il y a lieu de se poser des questions, et pour les professionnels, de procéder à une analyse biologique du terrain pour connaître les causes de ses difficultés, voire de son incapacité, à digérer un trivial slip en coton.
Pour effectuer ce test, à la fois ludique – les enfants y prennent part en s’amusant – et révélateur, L’ADEME conseille l’emploi d’un slip en coton blanc (usagé, inutile de gaspiller du neuf !) ou de tout autre sous-vêtement, de préférence en coton, si possible « bio » bien que cela ne soit pas nécessaire à cette petite expérience. À défaut de coton, du lin peut également convenir bien que cette matière soit moins rapidement biodégradable. En tout état de cause, il est conseillé de ne pas utiliser un vêtement de couleur afin d’éviter de polluer le sol par la présence des pigments chimiques.
L’avantage du slip sur les autres pièces de tissu tient à la présence d’un élastique dont le temps de dégradation est infiniment supérieur à celui des fibres du sous-vêtement. Cela permet de garder une bonne tenue du vêtement-test lors de la récupération lorsqu’il est en lambeaux. Après avoir nettoyé le slip dégradé, on peut en prendre une photo-témoin, à comparer avec une précédente photo prise avant d’avoir « planté » ledit slip deux mois plus tôt. Outre que cela constitue un souvenir original, on peut partager ces deux photos sur le web en les postant sur ce site : maps.sumwhere.co/ ?theme=902.
Disons-le tout net : au niveau des professionnels – agriculteurs, arboriculteurs, viticulteurs, maraîchers, horticulteurs, sylviculteurs –, pratiquer un tel test n’a, chacun s’en rend compte, qu’un intérêt très relatif, le besoin de connaissance de leur sol passant par une analyse biologique réalisée par un laboratoire spécialisé. C’est donc plus aux jardiniers amateurs que l’opération « Plante ton slip » peut apporter un éclairage sur la qualité du sol de leur potager ou de leurs massifs décoratifs. Surtout s’ils ont des enfants ou des petits-enfants que la participation à une telle opération ne manquera pas de ravir en les amusant.
Au-delà de cette plantation éphémère de slip qui ne donne qu’un indice qualitatif approximatif, les amateurs auront, s’ils veulent en savoir plus sans passer par une coûteuse analyse de laboratoire, tout intérêt à se tourner vers d’autres formes d’expérimentation. Par exemple en visionnant Comment faire une analyse de sol facilement ?. Dans cette vidéo d’une durée de 17’ 34’’, le vulgarisateur Gérard Bourges nous montre une suite de gestes simples qui permettent de mieux connaître la nature du sol que l’on veut tester. Un processus à la portée de tous et peu coûteux, surtout si l’on emprunte ou si l’on loue un pH-mètre.
Mais au fait, Barbara Pompili, l’actuelle titulaire du maroquin de la Transition écologique, a-t-elle, en tant que ministre de tutelle de l’ADEME, planté son slip en coton dans le jardin de l’Hôtel de Roquelaure pour donner l’exemple à nos compatriotes ? Hélas ! il appert que ce n’est pas le cas à ce jour. Ce geste symbolique aurait pourtant eu, n’en doutons pas, une puissante force incitatrice. Il aurait pu également servir de support à un point de presse centré sur la préservation des sols. Une occasion ratée par la ministre. À moins que Barbara Pompili ne soit en train de chercher un vieux slip dans un tiroir de sa commode… Qui sait ?
* ADEME : Agence de l’Environnement et de la maîtrise de l’énergie.
** Hors période hivernale également, cette saison étant celle du repos.
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