2007, citoyens, approprions-nous l’Union européenne !
En ce mois de novembre, la plupart des partis ont dévoilé leur projet pour 2007. Que celui-ci soit projet pour la campagne présidentielle ou pour les élections législatives, chaque parti a peu ou prou esquissé les grandes priorités de son action, au cas où les électeurs français le propulseraient au pouvoir.

Mon regard tourné vers les affaires européennes, je me suis intéressé à analyser la partie consacrée à l’Union européenne dans chaque projet des partis engagés pour 2007. Vous retrouverez facilement ces projets sur les sites Web de chacun de ces partis politiques.
Précisons d’abord que l’UMP n’a présenté pour le moment qu’un projet législatif, qui pourra différer sensiblement du projet qui sera défendu dans le cadre de l’élection présidentielle. En outre, n’ayant pas trouvé de volet « Europe » dans le projet des Verts, leur point de vue n’apparaîtra pas dans cette analyse.
Je propose, si vous le voulez bien, de revisiter les
positions de chaque parti sur le thème Europe et d’en dresser une brève
synthèse.
Le projet communiste est détaillé et les rédacteurs ont
manifestement soigné leur précision terminologique en mettant en exergue la
nécessité d’une mise en place d’un « modèle social européen solidaire et
de haut niveau, en opposition à la logique de mise en concurrence des
populations. » Même son de cloche du côté du PS, qui souhaite apparemment
proposer un texte de « traité social européen pour harmoniser
par le haut les droits sociaux. » Pour l’UDF, c’est l’ensemble des
questions de politique française qui doivent (devraient) s’inscrire dans une
perspective européenne : « Il n’est pas un sujet de notre avenir
national qui puisse trouver une réponse durable sans la dimension européenne. »
Pour l’UMP en revanche, l’action française ne s’impose à l’échelle européenne
que dans la mesure où elle préserve et protège les intérêts nationaux. Cette
position s’affiche à travers une phrase : « La compétition ne doit pas nous
opposer entre pays européens. » Enfin, fidèle à ses convictions, le FN
considère que l’Union européenne doit (devrait) s’orienter vers « une
coopération associant des nations libres et souveraines. »
Globalement, les projets s’articulent autour des mêmes thèmes clefs : une action européenne plus concrète, une demande de clarification du rôle de l’Union européenne dans la résolution des problématiques de la mondialisation et des flux migratoires en provenance du sud, le renforcement du modèle social européen, la présentation d’une issue de secours au processus de réforme institutionnelle européen après le rejet du traité constitutionnel du 29 mai 2005.
L’UDF affiche clairement l’enjeu européen : « L’Europe est bien un moyen pour écrire l’avenir, non pour le subir. » Pour le PS, « l’Europe sera relancée par un plan concret, » relayé par l’UMP qui lance presque immédiatement dans le texte : « L’Europe des projets concrets [doit] protéger dans la mondialisation. » Là où le PS n’apporte pas de détails sur les moyens de la mise en œuvre des « plans concrets », l’UMP précise : « Seul un projet politique ambitieux, fondé sur l’humain, la culture et le progrès social, peut justifier l’abandon de certaines souverainetés. »
Concrètement, l’UMP prône une union protectrice de la mondialisation, des effets négatifs de l’immigration, des insuffisances en matière de sécurité alimentaire, des risques en matière d’approvisionnement énergétique et de réchauffement climatique. Pour l’UDF, l’urgence porte plutôt sur la réforme institutionnelle européenne et sur la nécessité d’élargir le champ d’intervention de l’union aux domaines où l’Etat seul ne peut pas/plus apporter de réponse ou agir avec efficacité : immigration, lutte contre le réchauffement climatique, énergie sont les dossiers où « la règle de l’unanimité [des votes] paralyse encore trop souvent l’action européenne. » Le PC insiste pour sa part sur la nécessité de cesser la « mise en concurrence des travailleurs, des peuples et des territoires ». Parmi les propositions avancées, le parti prône l’élaboration de « politiques nouvelles sociales, économiques, industrielles et écologiques » et la recherche d’une « harmonisation par le haut des niveaux de protection sociale (santé, retraites...) ». Pour le parti communiste, l’option nationale mérite aussi d’être préservée : « D’une manière générale, le rapport entre les règles européennes et nationales doit être transformé, afin de faire toujours prévaloir celle qui socialement est la plus favorable. »
La tendance est manifeste : hormis l’UDF, et peut-être le PS, les partis versent vers un net repli sur soi. La position du Front national, pour qui une « grande Europe des nations » est la seule issue européenne possible, semble grignoter un peu plus chaque jour l’espace naturel accordé au dossier Europe chez les partis de mouvance démocratique et républicaine. La préférence nationale sous-entendue, parfois explicite, est omniprésente dans les projets politiques, et l’on peut s’interroger sur la finalité de telles positions : alors que tout le monde semble d’accord pour constater que le processus actuel de construction européenne ne convient pas à une majorité de Français, pourquoi vouloir préférer l’option du repli national - ce n’est pas se faire injure que de reconnaître que la France seule ne résoudra pas les problèmes de l’approvisionnement énergétique, ceux de l’immigration de masse ni la question du changement climatique - à celui d’un clairvoyant intéressement démocratique et massif des citoyens aux dossiers et thèmes européens ?
Citoyens et lecteurs, l’Europe n’est pas technocratique par nature ; elle souffre d’un déficit démocratique qui la paralyse, qui nous martyrise, et que nous pouvons combler en agissant ensemble par une action citoyenne d’envergure.
Exigeons, à travers la voix de nos représentants élus, que les dossiers présentés à l’examen du Parlement européen dans le cadre du processus législatif (procédure de codécision) défendent notre intérêt général, nos droits économiques et sociaux. Ils sont là pour cela, et n’attendent que notre soutien pour pouvoir mieux agir sur chacun des dossiers dont ils ont la charge.
Exigeons que davantage de dossiers soient soumis à cette procédure de codécision, et que le Parlement puisse exprimer notre position sur chacun d’entre eux.
Demandons à nos députés européens de nous informer - via les médias - sur l’évolution de ces dossiers, mais aussi sur les enjeux en débat au Conseil de l’UE, afin que ce Parlement puisse peser toujours un peu plus sur les gouvernements et sur les puissants lobbies, qui ont souvent une autre conception de l’intérêt général que la nôtre.
Citoyens, approprions-nous l’Union européenne. Les problématiques internationales amplifiées par la mondialisation ne seront pas résolues par des recroquevillements politiques derrière un mur de sable national. Notre intérêt général citoyen ne sera pas embelli par un comportement invitant à un repli sur soi généralisé.
Les citoyens européens peuvent écrire leur avenir, le devoir des technocrates européens est de servir la démocratie européenne.
En visionnaire de l’Europe du concret et des attitudes pragmatiques, Jean Monnet répétait sans cesse : « Je ne suis pas optimiste, je suis déterminé. »
Alors, citoyens, ne soyons ni pessimistes, ni
optimistes : soyons déterminés. Déterminés à ne pas nous abaisser à la tentation
nationaliste ou populiste. Déterminés à cultiver notre jardin et à faire de l’Europe
notre chose publique et citoyenne, notre res publica Europa.
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