Analyse de la Déclaration de Berlin à propos des 50 ans de l’UE
Que peut-il y avoir au-delà des mots purement réthoriques de cette déclaration ? Quel peut être son impact à moyen terme ?
Cette déclaration est découpée en quatre parties, une
préface/introduction, et trois parties numérotées de I à III. La première chose qui
peut surprendre sur la forme, vient du fait que les trois parties n’aient pas
de titres, alors que cela aurait rendu le projet plus lisible pour tout le
monde. Les titres ne s’imposent pas pour les lois, mais pour les déclarations,
très découpées et morcelées comme celle-là, des titres auraient pu permettre au
lecteur de mieux structurer cette déclaration.
Préface :
La préface est un bilan de la construction européenne et de
ses différentes étapes ainsi que de ses motivations. Il est surtout rappelé
que l’Europe a permis de surmonter les divisions d’antan, France-Allemagne, et
Occident-pacte de Varsovie. Le mot paix revient par deux fois en dix lignes, et
les mots associés à la guerre, conflits, division sont aussi très présents. Les
signataires de la déclarations auraient donc voulu montrer par là, que la paix
et la prospérité économique actuelle sont le fruit de cette union. En somme un
paragraphe très consensuel.
Article I :
L’article I ressemble pour sa première partie
approximativement, par la volonté de parler de droits de l’homme et de liberté,
à la déclaration française des droits de l’homme, et à la Déclaration
universelle des droits de l’homme de 1948.vSuit un énoncé des valeurs partagées
par les différents pays membre de l’Union. (Solidarité et autres).
Les deux derniers paragraphes de cet article décrivent les
liens qui existent entre les différents pays adhérants à l’Union européenne,
ainsi que la volonté de maintenir une diversité en Europe.
Article II :
La seconde partie est plus concrète, et plus sujet à débats.
On y parle de la mondialisation par la formule détournée, « les grands
défis qui ignorent les frontières », et de la réussite économique et
sociale de l’Europe grâce à l’euro fort notamment. Cette partie est très
subjective, surtout lorsque l’on voit les différents niveaux de réussite de
pays membre de l’UE à l’heure actuelle et à situation comparable. Selon la
déclaration , l’Europe doit placer ses citoyens au coeur de la vie économique,
afin d’obtenir une croissance économique forte. Une spécificité de Merkel qui
préfère systématiquement le mot "citoyen" à "peuple", sans doute pour faire plus
proche du peuple de son individualité justement et engager politiquement ce
citoyen.
Le second paragraphe est consacré à la lutte contre toute
les formes de menaces autres qu’économiques.
La suite prête à l’Europe les mêmes intentions de sécurité
et progrès pour les autres pays du monde que pour elle-même.
Enfin, le développement durable est rapidement abordé, ainsi
que le changement climatique qui est officiellement reconnu.
Article III :
La dernière partie est consacrée à la volonté de poursuite
de l’extension et de l’approfondissement de l’Union européenne, ce qui peut
paraître comme paradoxal à l’heure actuelle.
Le dernier paragraphe est un retour au début, qui veut nous
faire espérer et croire en l’UE sur des bases nouvelles comme nos ancêtres il y
a 50 ans. Enfin est affirmée la volonté immuable et optimiste que l’Europe
perdurera.
Mes attentes du sommet de Berlin :
L’évènement à la base était commémoratif principalement.
Mes attentes n’étaient donc pas démesurées, pour faire simple, ce sommet ne
devait pas offrir à l’Europe un cadeau d’anniversaire.
Néanmoins, 50 ans après un traité, le traité de Rome, il
m’aurait semblé logique face à l’échec de la Constitution européenne, de
proposer un nouveau traité simplifié.
Ce traité simplifié annoncé n’aurait pas dû reprendre les
points de méthodes, de manières et de moyens de la constitution, mais
simplement les règles encadrant la pratique du pouvoir. Celui-ci aurait été
préparé auparavant et simplement conclu lors du sommet.
Même sans parler de traité, j’aurais au moins pu m’attendre
à une date de décision prise, ou à une direction donnée pour faire avancer
l’Europe. Même un agenda m’aurait paru satisfaisant.
Mon avis sur la déclaration :
Je suis né, et ai toujours vécu en démocratie libérale,
doté d’un Etat de droit depuis ma naissance, comme pour tous les autres pays
de l’UE avant 2004 . C’est sans doute pourquoi je trouve cette déclaration
très plate. Je n’y vois pratiquement rien de plus, que ce qu’il y a dans
la Déclaration universelle des droits de l’homme ou dans la Constitution des Etats membres en matière de valeurs morales.
Dans ce texte, qui peut sembler purement rhétorique, je n’ai
vu aucune trace d’audace qui était bien plus l’apanage des pères fondateurs de
l’Europe politique en 1957.
Il me semble aussi contradictoire d’avoir voulu faire signer
cette Constitution à tout les pays de l’UE, alors qu’on y parle de l’espace
Shengen, et de l’euro, que tous les pays n’ont pas joint, même si le
"noyau dur" l’a fait. Ce qui a sans doute choqué les Anglais, c’est
la contradiction manifeste entre l’acceptation d’une union dans sa diversité,
et dans le même temps la promotion d’un modèle social européen.
Beaucoup de points me semblent être repris de la défunte Constitution européenne de Giscard d’Estaing. Notamment lorsque l’on parle de
sécurité, d’immigration, et de coopération entre pays.
Les deux seuls points d’audace que j’y vois, sont la
réaffirmation du rôle positif de l’euro, et de l’Europe sur les économies de
nos pays, ce qui est discuté actuellement par les finalistes de l’élection
présidentielle française même si peu d’économistes les soutiennent sur ce point
précis.
L’autre point vient du fait que le réchauffement climatique,
qui ne serait prouvé qu’à 90 %, selon la réunion des experts du GIEC à Paris,
devient maintenant un fait, et une vérité reconnue.
La régionalisation de l’Europe, c’est-à-dire le regroupement
en entités supranationales de différents territoires, me semble aussi un autre
point positif évoqué ici. Un Strasbourgeois se sentira toujours plus proche du
BadeWürtenBerg que de l’Ile-de-France et sera donc peut-être plus prompt à
s’intégrer dans une Europe des régions supranationales.
Mais dans sa globalité, cette déclaration m’a semblé être
un résumé des différents valeurs et des différents objectifs que pourrait
avoir n’importe quel gouvernement pour un pays, sans parler nullement des
méthodes, ni de choix politique. A mon sens, je comprends la décision de
certains pays de ne pas signer cette déclaration qui ne valait pas la peine de
se mouiller pour quasiment rien de neuf quand on connaît leur situation
politique tendue au vu de leur opinion
Pour conclure, il ne faut pas se tromper quand on lit ce
texte. Il ne devait certainement pas devenir un agenda, la situation politique
en France étant peut-être trop dans l’expectative, même si la France se trouve
de moins en moins au centre de l’Europe avec l’élargissement. Ce texte,
d’Angela Merkel, ne pouvait qu’être consensuel après la pause, voir l’arrêt
actuel des choses après le rejet de la Constitution. Personnellement je pense
qu’il faut prendre cette déclaration telle quelle, un bilan ambitieux mais sans ambitions
de l’Europe et de ses bienfaits lors des 50 dernières années afin de peut-être
repartir de l’avant sans rompre le dialogue citoyens-gouvernants.
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