Belgique : un grand cri d’amour
Alors que le pays s’enfonce dans une crise de plus en plus grave, quelques citoyens ont voulu reprendre le flambeau belge. Résultat ? Une manifestation historique à Bruxelles afin de marquer son attachement au Royaume.
Bien sûr, la manifestation était à majorité francophone. Bien sûr, elle avait lieu à Bruxelles, ville de langue française. Bien sûr, les hommes politiques s’étaient peu déplacés. Bien sûr, tout cela sonne peut-être plus comme le chant du cygne que comme la résurgence de la fierté d’être Belge. Il n’empêche, le défilé de dimanche, le plus important connu par la Royaume depuis la Marche Blanche (suite à l’affaire Dutroux), force l’admiration.
Et pour cause, sans aucun relais institutionnel et marginalisé par les médias, le mouvement a pris de l’ampleur par l’abnégation de simples citoyens dont une truculente dame, comme seule la Belgique sait en servir, Marie-Claire Houard. Cette Liégeoise de 45 ans, fonctionnaire et mère de deux enfants, voulait à l’origine seulement faire un geste pour son pays. Mais elle a surtout été agréablement dépassée par le succès de sa pétition qui a recueilli plus de 100 000 signataires de Namur à Anvers, de Courtrai à Malines. Alors, la pimpante Marie-Claire a vu qu’une brèche s’ouvrait et a voulu transformer l’essai par une manifestation d’attachement au pays de la bière.
Pour s’assurer un succès maximum, la mère de famille a mis elle-même les mains dans le cambouis et est allée distribuer des tracts. Les voyageurs de la gare centrale à Bruxelles ont donc croisé son enthousiasme et son optimisme toute la semaine. Le résultat est au rendez-vous de l’investissement puisque au moins 35 000 personnes ont bravé le froid pour battre le pavé aux cris de « vive le roi » ou de « vive la Belgique ».
Mieux, les slogans rivalisaient d’imagination pour affirmer leur attachement à la Belgique. On a ainsi pu lire « Belgium Best », un pastiche du slogan du Vlaams Belang « Belgie barst » (Belgique crève), ou encore l’Union fait la force (devise du Royaume)... Les joyeux manifestants se sont même surpris à entonner La Brabançonne que le favori au poste de Premier ministre, Yves Leterme, confond avec La Marseillaise. Pour finir, tout cela s’est terminé dans le parc du Cinquantenaire par une bière et des frites et toujours dans une ambiance festive.
Alors, quel poids aura cette démonstration d’amour. Difficile à dire à l’heure actuelle ? En effet, si les médias francophones ont largement relayé l’initiative, on ne peut pas en dire autant côté Flamands puisque certains journaux ont même raillé la manifestation. Aussi, que se passera-t-il demain ? Qui va donner un nouvel élan au mouvement de dimanche ? Les politiques, souvent présents, se sont fait discrets.
A contrario, on peut aussi être optimiste quant aux suites. En effet, c’est une initiative citoyenne qui a eu raison de l’inertie des politiques. Ainsi, le mouvement n’est pas politisé et donc ne peut être accusé d’obéir à une quelconque obédience. Cela devrait rendre la critique des séparatistes difficiles et ce surtout du côté du Vlaams Belang. Mais c’est surtout le nombre de participants qui interpelle dans un pays où les manifestations, même pour des considérations sociales, sont assez rares. Voilà donc comment une bande de joyeux idéalistes a vaincu l’électrocardiogramme atone du Royaume. C’est pour cela que leur initiative redonne un sens à la Belgitude. Ainsi, ce dimanche, c’est peut-être la majorité silencieuse qui est sortie de sa torpeur pour s’emparer du débat et forcer les politiques à s’entendre sur un futur vouloir vivre ensemble.
Et si les Belges s’étaient tout simplement réinventé un avenir ce dimanche ?
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