Dans la société actuelle, l’évolution des sciences et des technologies développe et amplifie les moyens de domination des classes dominantes. Il n’y a pas que ce qui reste encore plus ou moins visible, il y a surtout de plus en plus de domaines où le contrôle citoyen ou institutionnel devient très insuffisant, voire même impossible dans le système actuel.
Il y a plus d’un an, nous écrivions à propos des nanotechnologies :
Nanotechnologies, recherche, éthique et contrôle citoyen
(...) Le National Research Council des Etats-Unis a émis un constat très sévère des insuffisances du programme de recherche de ce pays sur les nanotechnologies,
en ce qui concerne l’étude des risques et des conséquences pour la
santé. Mais quelle est la situation de ce côté-ci de l’Atlantique ?
(...)
A la séance publique du 5 novembre du COMETS, Comité d’Ethique du CNRS, concernant notamment les nanotechnologies, un membre de notre Collectif (Luis Gonzalez-Mestres) a adressé cette question orale aux organisateurs :
«
Est-ce que quelqu’un a essayé de faire une évaluation, dans le domaine
du volet santé, de la pertinence du budget et des garanties
d’indépendance de la recherche sur des domaines (...) [tels que, par exemple : ] nanoparticules et cancer, nanoparticules et maladies urbaines, voire même nanoparticules et sécheresse oculaire (...) ? »
(fin de citation)
Le réponse, donnée oralement par Jacques Lefrançois, a été très claire : « Les budgets sont définis, mais il n’y a pas d’instance d’évaluation des évaluateurs d’opportunité. Autrement dit, non, (...) il n’y a pas d’évaluation »
Telle
semble donc avoir été il y a moins de deux mois la situation en France,
mais aussi au sein de l’Union Européenne. Les propositions les plus
avancées se heurtant à la résistance des lobbies industriels.
Aucune
instance indépendante n’avait évalué l’adéquation des moyens investis
dans les domaines de recherche évoqués concernant les risques des
nanotechnologies, pas plus que les modalités de fonctionnement de cette
recherche compte tenu des exigences éthiques en matière d’apparence
d’impartialité et d’indépendance.
(...)
(fin de citation)
Avec la stratégie de Lisbonne et le « ’marché de la connaissance », tout savoir devient payant. En France, l’Agence Nationale de la Recherche (ANR) déclare financer les projets d’après une prétendue « pertinence économique par rapport aux entreprises », voir :
http://www.agence-nationale-recherche.fr/Agence
ainsi que notre article :
MDRGF, CNRS et « pertinence économique pour les entreprises »
En réalité, le partenariat avec le secteur privé est de plus en plus exigé d’une recherche publique dont la raison d’être institutionnelle est le service public et le progrès d’une connaissance à la portée de tous, et pas de faire gagner de l’argent à telle ou telle multinationale.
Qui pourra encore défendre l’intérêt général ? Le premier problème étant celui de la liberté de l’information scientifique et des recherches « hors lobby ».
De ce point de vue, les dangers paraissent plus graves encore que ce que rapporte l’auteur à propos des fichiers allemands.
Cordialement
Le Collectif Indépendance des Chercheurs
http://science21.blogs.courrierinternational.com/