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Accueil du site > Actualités > Europe > Euro : mais que veut l’Allemagne ?

Euro : mais que veut l’Allemagne ?

C’est ce que se demande The Economist dans son dossier du 10 août, qui représente une Angela Merkel songeuse qui lit un mémorandum sur comment démonter l’euro avec le titre « Tentée, Angela ?  ». Un dossier qui souligne la lassitude des Allemands à l’égard de la monnaie unique.
 
Quand Berlin pense à un plan B
 
The Economist a donné une forme particulièrement bien sentie à ce dossier, présenté comme une note de ses équipes sur un plan B monétaire européen, envisageant tous les avantages et les inconvénients d’une réorganisation de l’euro. Sont envisagés deux scénarii pour mettre fin à la crise de la zone euro. Un premier qui consisterait à pousser la Grèce en dehors de la monnaie unique. Un autre, plus radical, qui ajouterait le Portugal, l’Irlande, Chypre et l’Espagne.
 
De manière intéressante, ce mémo souligne que la sortie de l’euro et « la dévaluation, si elle n’est pas gâchée par une envolée hyperinflationniste, pourrait sortir la Grèce de l’impasse d’une récession perpétuelle en lui permettant de retrouver sa compétitivité perdue d’un seul coup, plutôt qu’en réduisant ses coûts sur plusieurs années. Cela devrait provoquer une forte relance de son économie, qui s’affaisse, par l’effet sur le solde commercial ». Idem pour les autres pays.
 
Bref, ce faisant, The Economist tord le cou au mythe qui veut que l’économie des pays qui quitteraient l’euro s’effondrerait. Bien gérée, cette sortie serait au contraire une bouffée d’air frais, comme le confirme l’histoire économique, comme montré par Jonathan Tepper. Le mémo étudie également les coûts pour l’Allemagne. Il estime à 3% du PIB Allemand (80 milliards) le montant des transferts annuels que Berlin devrait se résoudre à accepter pour soutenir les économies en difficulté.
 
Face à cette addition (dans le bas de l’échelle des autres estimations faites jusqu’à présent), la note souligne que le coût d’une sortie est finalement acceptable. Il chiffre la coût à 118 milliards pour une sortie seule de la Grèce (avec un nouveau plan d’aide de 50 milliards) et 496 milliards pour 4 pays. Néanmoins, près de la moitié de cette somme (et 30% dans le seul cas de la Grèce) vient du solde des dettes Target 2 du système des banques centrales. Mais je ne suis pas sûr que cela soit vrai et serais heureux d’en débattre avec les personnes compétentes sur la question.
 
L’euro est bien mort à Berlin
 
Dans le scénarion imaginé par The Economist, Angela Merkel décide de ne rien changer à sa stratégie devant les risques du plan B imaginé par ses collaborateurs… Dans le premier article, il affirme que de telles discussions doivent bien avoir lieu à Berlin. Il faut dire que la succession de sommets européens qui ne règlent rien, la montée de l’addition, notamment en Grèce, irritent grandement l’opinion publique allemande, dont la majorité est maintenant favorable à un retour au mark.
 
Mon sentiment est que l’Allemagne refusera de mettre plus d’argent sur la table pour essayer de faire fonctionner l’euro mais ne souhaite pas prendre l’initiative de son démontage. Après tout, les chiffrages du coût d’un maintien de la monnaie unique sont exhorbitants : entre 3 et 7% du PIB par an, ad vitam aeternam, quand le MES ne représente qu’une garantie à hauteur de 8% du PIB, qui ne sont que prêtés (et donc devraient être récupérés) !
 
En outre, les euros obligations proposées par l’institut Bruegel, dont certaines élites françaises sont tellement friandes, reviennent à demander une caution solidaire de 4000 milliards d’euros, soit 150% du PIB du pays ! Du coup, le coût d’une sortie semble finalement faible par rapport au coût du maintien de la monnaie unique (d’autant plus que les estimations de The Economist, dont une des sources est la Commission…, sont sans doute trop fortes).
 
Comment l’Allemagne pourrait-elle ne pas avoir envie de revenir au deutsche mark plutôt que de continuer avec cette construction baroque et artificielle dont la note est sans cesse revue à la hausse, et qui leur vaut d’être accusée de basculer dans un 4ème reich par la presse d’Europe du Sud ? Mais l’histoire étant l’histoire, Berlin ne souhaite sans doute pas prendre l’initiative. Du coup, le mieux consiste sans doute à laisser pourrir la situation en évitant que que l’addition ne grimpe davantage (à dire vrai, le temps passant, une partie des fonds prêtés aux pays autres que la Grèce peuvent au contraire être récupérés). Les conditions imposées aux pays « aidés » devant in fine les pousser à quitter l’euro.
 
Je ne suis pas certain que l’Allemagne ne sache pas ce qu’elle veut. Elle ne veut pas, légitimement, régler une addition sans cesse revue à la hausse. Du coup, Berlin refusera tout saut fédéraliste, condamnant à l’avance l’aventure monétaire européenne pour protéger les intérêts financiers du pays.

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10 réactions à cet article    


  • Fred59 20 août 2012 13:52

    C’est tout simplement le pacte géostratégique signé en 2004 entre l’Allemagne et les USA (sans que les partenaires européens ne soient consultés d’ailleurs), complété par les multiples directives directes de MM. Geitner et Obama, qui empêchent l’Allemagne de prendre l’initiative sur le démantèlement de l’euro.


    • BlackMatter 20 août 2012 19:41

      Moi qui pensant bêtement que c’était du fait que les centaines de milliards d’excédents commerciaux de l’Allemagne s’envoleraient si les pays européens retournaient à des monnaies nationales. Mais les explications complotistes semblent plus convaincantes smiley


    • nightwings nightwings 20 août 2012 20:39

      Avant d’avancer des éléments que Coluche trouvait insupportable évitons d’imiter des journalistes : http://youtu.be/eExHp56S32k il serait bon d’être factuel et citer des sources fiables


    • Fred59 21 août 2012 03:03

      Mille excuses, je croyais cet élément-clé de l’histoire européenne récente connu de tous au vu de son importance. Suite à vos remarques j’ai constaté que Google a du mal à donner des références là-dessus.

      J’ose espérer que vous ferez la différence entre une alliance stratégique et un complot.
      Il est vrai qu’aucun média français n’en a parlé à l’époque et pourtant c’est un des fondements de la politique allemande encore aujourd’hui.

      Voici le compte-rendu qu’en faisait Der Spiegel.

      Il s’agit de l’alliance germano-américaine pour le 21ème siècle, signé le 27 février 2004 à la Maison Blanche par Condoleeza Rice et Berndt .
      Je vous résume quelques éléments de cette alliance dont vous pourrez mesurer la pérennité à ce jour : Afghanistan, Irak (refiler à l’ONU le soin de panser les plaies), Israël/Palestine (soutien à la solution 2 Etats), taux de change €/$ (directement entre allemands et USA), baisse des taux directeurs de la BCE (oubliant qu’elle est « indépendante »^^), mais aussi coopération antiterroriste, etc,etc,etc... Le tout dans le « libre marché » et la préparation du marché transatlantique, selon un agenda.

      voici le texte de cette alliance (en anglais)

      Et voici comment la Maison Blanche perçoit ce partenariat, dans un communiqué de la Maison-Blanche en juillet 2011.

      Alors, oui, des raisons puissantes peuvent pousser Angela Merkel à agir d’une façon qui semble au premier abord incompréhensible.


    • Fred59 21 août 2012 03:08

      Il manquait un nom :
      ... Condoleeza Rice et Bernd Mützelburg, diplomate allemand ayant en particulier préparé la conférence sur l’afghanistan en 2010 .


    • BlackMatter 21 août 2012 10:35

      Votre lien renvoie à une déclaration. Une déclaration n’a pas force de loi, elle n’est ni une alliance ni un traité. Et je ne vois pas bien le rapport avec l’Euro. De toute façon, les pays européens ont toujours été proche de l’Otan. Où est la nouveauté ?



    • jak2pad 20 août 2012 23:38

      Je me pose une question :

      il est probable que les dettes actuelles de la Grèce ne seront jamais payées entièrement, et peut-être même pas du tout.
      Le fait de lui prêter sans arrêt de nouvelles sommes ( fort importantes) , ce qui ressemble à un crédit -revolving, rend-elle la probabilité de remboursement plus importante ?
      Les optimistes et les ignorants diront oui.
      Mais les pessimistes, les lucides et tous les gens qui ont un jour ou un autre géré quelque chose en partenariat avec un irresponsable, eux diront non.
      Ce qui fait peur à tous les créanciers, c’est que disparaissent les éventualités de remboursement par la Grèce.
      Mais ce fait est déjà devenu une évidence.
      Alors quelqu’un peut-il m’expliquer pourquoi il faut encore augmenter la casse ?

      • Fred59 21 août 2012 03:15

        Pour pousser à la vente des derniers bijoux de famille, et des richesses du sous-sol en crète... Pour finir l’exploitant sera bien Noble Energy (Bill Clinton est lobbyiste pour cette firme américaine), voir par exemple ici

        Mais aussi pour punir un peuple entier, et montrer aux autres peuples comment on rééduque les mauvais élèves.


      • TDK1 TDK1 21 août 2012 08:39

        Bonjour,


        Je crois que nous avons la réponse de ce que l’Allemagne, ou plus exactement Angela Merkel, va faire. Elle va abandonner ses positions, en particulier le fameux principe de stabilité qui pourtant a sauvé au moins deux fois l’Allemagne. Tout cela dans l’unique but de gagner les élections. Nous sommes en pleine perversion démocratique. L’attitude de Merkel, telle que je l’analyse (http://maviemonargent.info/2012/angela-joue-sur-le-fil-du-rasoir/) est une catastrophe pour l’Europe. Elle va déclencher à moyen terme une vague inflationniste dont les peuples auront à souffrir. Le pari e Merkel est que le peuple allemand souffrira moins que les autres, redémarrera plus vite et que la zone euro n’aura plus de raison d’exploser, puisque ce qui motive les pays « du sud » à chercher la reprises en main de la monnaie, c’est justement le rêve de la dévaluation. 
        Nous y allons en courant. maintenant, il faut néanmoins avoir conscience que les Etats qui ne profiteront pas de période inflationniste de cinq - six ans pour se restructurer, se réorganiser et rééquilibrer leur budget se trouveront dans une situation encore plus catastrophique après...

        • Loïc Decrauze Loïc Decrauze 23 août 2012 18:23

          Quand on sait que l’obole était au XVIème siècle une monnaie grecque qui équivalait au sixième de la drachme, on peut comprendre l’humiliation que représente pour le Premier ministre Samaras la tournée des euroboles européennes. Pas sûr qu’il obtienne grand chose lorsqu’on observe à quoi se réduit le consensus franco-allemand : une présentation commune des résultats de la rencontre sans intervention journalistique. Pour résumer : se leurrer soi-même et museler l’autre. Le faux duo Merkel-Hollande n’a rien à envier au feu couple Nicolas-Angela (cf. Une clé de 12 pour la 11, vite…  pour son résumé sur l’air de Laurel et Hardy).

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