Europe : une idée révolutionnaire pour le « plan D »
Et si un impôt européen remplaçait les contributions nationales au budget de l’Europe ? On remplacerait du même coup le « M » du marché par le « D » de la démocratie.
Une « période de réflexion » a été décidée par le Conseil européen, après les résultats négatifs des référendums sur le projet de traité constitutionnel (France et Pays-Bas). Lancée en juillet 2005, cette « période » est devenue de longue durée, à la demande du Parlement européen qui a voulu associer la société civile à la relance d’un projet commun.
Le temps européen est comme suspendu dans la confusion. Les députés de l’Union sont largement dépités, depuis ce mois de mai 2005 qui a vu fleurir des plans - inspirés de l’alphabet - aux architectures incertaines. Les Européens convaincus en sont restés sur le « Q », si l’on peut dire... La réflexion sur l’Europe patine.
La Commission européenne, qui a finalement repris la main (comme toujours), sous l’impulsion du Parlement, a lancé cette année le « plan D ». Qui a dit que les fonctionnaires européens n’ont pas d’humour ? C’est un plan ambitieux, puisqu’il se décline en 3D : « débat, dialogue, démocratie ». Qu’est-ce que cela signifie, concrètement ? Deux choses : 1. les institutions de l’Union sont désemparées. 2. les citoyens sont appelés à la rescousse.
Pour une fois qu’on nous donne la parole, profitons-en. Il y a même un budget pour les nouvelles actions de communication sur l’Europe ! Et si on parlait gros sous, justement, pour relancer l’Europe ? Le budget de l’Union à 25 pour 2007-2013 ressemble à un prématuré enfanté dans la douleur : 862,4 milliards d’euros (1,045% du PIB communautaire). Près de la moitié sera engloutie par la politique agricole commune, à moins que la donne n’évolue : un ajustement est prévu en 2008. A titre de comparaison, le seul budget de la France est d’environ 300 milliards d’euros.
En fait, on ne sait pas trop comment dépenser efficacement ce budget européen « au rabais », selon l’expression souvent employée, et à juste titre. Les Etats marchands de tapis ont gagné, les citoyens consommateurs ont perdu. Et la démocratie est resté au placard... comme d’habitude. La France a préservé « sa » politique agricole et ainsi son retour sur investissement : si l’Etat français est le deuxième plus gros contributeur (après l’Allemagne), il reçoit toujours plus qu’il ne donne (1,7 milliard d’euro de bénéfice). Le Royaume-Uni conserve sa ristourne historique, l’Allemagne n’a pas voulu mettre plus... Les gros contributeurs n’ont donc rien lâché, les nouveaux arrivants n’ont pas fait d’effort. On peut les comprendre... Quant aux futurs entrants pressentis (Bulgarie et Roumanie), entre la misère budgétaire et les soucis d’organisation, ils sont gentiment priés d’attendre un peu plus longtemps que prévu.
En résumé, la solidarité européenne est restée derrière la lourde porte des Etats nations. Autrement dit, les peuples de l’Europe sont exclus par les pouvoirs qui tiennent pourtant grâce à eux.
Alors, dans cette jolie période de réflexion en 3D, soyons un brin révolutionnaire et proposons de passer au-dessus des Etats. La première dimension citoyenne de ce plan D pourrait être de proposer un impôt européen à la place des contributions nationales des Etats membres, négociées en coulisse. La question serait simplement posée par référendum aux citoyens de l’Europe : « Voulez-vous d’un impôt européen pour financer la solidarité européenne ? ». Cette question, il faudrait la poser à tous en même temps. Pas question de refaire le coup des débats séparés sur le TCE... Un débat européen, un vrai, serait alors lancé. On peut avoir la naïveté d’y croire, non ? Certains ont bien cru au plan B...
Vous me direz : « Encore un impôt ?! Y’en a marre de payer ! Et ça va être encore un machin de plus ingérable ! » Et vous aurez raison : rien n’est simple. Mais cet impôt européen - qui serait dégressif et différencié selon le niveau de vie moyen des Etats et le revenu des citoyens - augmenterait mécaniquement, de manière exponentielle, les marges de manœuvre d’une politique commune en Europe. Il entraînerait un débat sur une fiscalité européenne ainsi que sur la nécessité d’un gouvernement économique et d’un renforcement des pouvoirs du Parlement. Cela remettrait probablement en question les objectifs concrets de l’élargissement.
En somme, un impôt européen entraînerait la nécessité d’une vraie... Constitution européenne, en bonne et due forme.
Que les citoyens européens qui se contentent du marché unique rejettent l’idée, et que les autres, lassés du marché sans politique commune, se lèvent, pour faire lever l’impôt commun ! Vous l’aurez compris : je me range dans le deuxième camp. Vive le « plan D » !
Au fait, à qui on envoie la proposition ?
Laurent Watrin
http://eurocitoyen.blogspirit.com
(sur ce lien, vous verrez mieux la photo...)
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