Exporter, tout exporter !!!
L'Union européenne (UE) a changé de religion. Elle est passée de la Trinité au tout aussi mystérieux 3% dont la pratique essentielle consiste à produire pour exporter suivant le modèle allemand qui fait feu de tout bois. Pour cela, il a fallu comprimer salaires, cotisations, allocations sociales...
L'Allemagne, exemplaire, exporte : machines outils aux pays émergents et voitures puissantes à leur bourgeoisie naissante. Elle a même trouvé, pour l’exportation, un gisement inattendue dans sa démographie.
Sa population diminue. En 2010, l'« accroissement naturel » était négatif, le nombre de décès était supérieur au nombre de naissances, de 180 000 personnes, partiellement compensé par une immigration de 130 200 personnes. La population diminue et vieillit. Le nombre de personnes âgées augmente et elle manque de main d’œuvre. Elle doit faire appel à l'immigration ; elle est déjà parmi les pays qui ont la plus forte proportion d'immigrés dans l'UE.
Le phénomène n'est pas près de s'arrêter avec, en 2010, un taux de fertilité totale (nombre d'enfants par femme) de 1,39, un des plus faibles dans l'UE : seules l'Espagne, Malte et la Pologne avec 1,38, la Roumanie 1,33, la Hongrie 1,25 et la Lettonie 1,17 ont un taux inférieur.
Le nombre de personnes dépendantes augmente, les maisons spécialisées manquent de personnel, le coût est de plus en plus élevé pour les familles et les dépenses sociales. Les solutions sont multiples : soit utiliser la main d’œuvre étrangère, meilleur marché, soit délocaliser les établissement dans des pays de l'est ou ailleurs, soit exporter les personnes âgées dans des établissements qui se mettent en place dans ces pays. Dans ces établissements de qualité, quelquefois gérés par des Allemands, le coût est bien moindre : avec la retraite, même stagnante, et l'aide de l’État, les familles ont peu à débourser. Ces centres peuvent être plus ou moins éloignés, en Slovaquie, République tchèque, Hongrie, Espagne, Canaries ou même Thaïlande. Mais avec les moyens modernes de communications, la chaleur familiale peut toujours être transmise...
Certains envisagent même un partenariat d’État à État...
Seuls les pays riches et vieillissants de l'UE peuvent suivre cet exemple. Les autres doivent être créatifs ! Cela tombe bien. Malgré les « bonnes » politiques suivies, certains pays ont des jeunes à « exporter ». Ainsi, une ancienne présidente de la région de Madrid déclarait en septembre « si l'Allemagne a besoin de jeunes bien formés , Madrid peut les fournir ». L'Espagne n'est pas la seule. Entre le premier semestre 2010 et le second semestre 2011, le nombre d'immigrés en Allemagne, provenant d'Espagne et de Grèce a été multiplié, environ, par 3 : Espagne de 4 868 à 13 405 ; Grèce de 4819 à 14 889. (Le Monde 02/11/12).
Avec les politiques suivies depuis quelques années sur les conseils de la Troïka (FMI, BCE, UE), le chômage est florissant : en septembre 2012, 15,1 en Irlande, 15,7 au Portugal, 25,1 en Grèce, 25,8 en Espagne, et environ le double chez les jeunes. Avec les nouvelles émigrations, la population des 20-29 ans a diminué de 19,3% en Irlande, de 13,1% en Espagne, de 10,2% en Grèce, de 9,9% au Portugal, de 3,1% en Italie tandis qu'elle augmentait dans les pays les plus riches de l'UE : Allemagne +1,7%, France 1,8%, Finlande 2,1%, Autriche 2,5%, Pays-Bas 2,8%, Belgique 4,3%, Danemark 7,1%, Royaume-Uni 8,3%, Suède 12,3%.
Décidément, l'histoire et particulièrement l'histoire européenne est loin d'être un fleuve tranquille. Si un moment les pays du Sud de l'UE ont pu se réjouir de la chute des dictatures, de l'ouverture de l'Union à la main d’œuvre, un certain développement a permis l'arrêt de cette émigration vers les pas de l'UE et même le retour ce certains ou la transformation de pays d'émigration en pays d'immigration, voici à nouveau que la porte s'est ouverte par nécessité... Et pour combien de temps ?
Bien sûr, ces nouveaux émigrants ne vont pas seulement en Union européenne, ils se dirigent vers différents pays en fonction de données culturelles, linguistiques, diasporiques... Grecs en Australie, en Suède (demandes doublées par rapport à 2010), Irlandais pour le Canada, l'Australie, la Nouvelle Zélande ou en Asie, Portugais pour le Brésil, l'Angola, le Mozambique ou le nord de l'Europe.
En partant, ils donnent satisfaction à beaucoup de monde : ils diminuent les dépenses sociales, envoient de l'argent et font diminuer les chiffres du chômage (Grèce, Irlande, Portugal, Espagne, Italie la population en âge de travailler s'est réduite de 0,1 à 0,9%, elle a augmenté de 0,2% en Allemagne.
Certains ne cachent pas leur satisfaction. Dans cette ventilation de la main d’œuvre intraeuropéenne, ils veulent voir la constitution d'« un vrai marché du travail européen » !!!Le secrétaire d’État aux Finances irlandais, bon élève de la Troïka, veut servir de modèle à d’autres pays en crise. Avec un chômage en hausse, des salaires en baisse, le pays exporte ses produits dans le monde entier. Y compris des hommes !
En France, ceux qui songent à « s'exporter », ce sont les millionnaires persécutés. La France compte plus de millionnaires que n'importe quel pays européen, d'après le Crédit suisse.
Alors « l'humain » plus tard ? Ou simple variable d'ajustement ?
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