Les anglo-saxons veulent-ils la fin de l’euro ?
C’est un des arguments les plus intéressants des soutiens de la monnaie unique : les Etats-Unis et la Grande-Bretagne souhaiteraient sa fin pour assurer la prééminence du dollar et de la City. Et par conséquent, il faudrait donc tout faire pour la protéger.
Pourquoi peut-on le penser ?
En effet, récemment, Georges Soros a exprimé ses doutes sur la monnaie unique et un certain nombre d’économistes ou de journalistes anglo-saxons (Paul Krugman, Joseph Stiglitz, Nouriel Roubini, Martin Wolff) expriment leurs critiques à l’égard de cette construction baroque. Pire, on pourrait déduire de la spéculation des marchés contre les dettes souveraines de la zone euro une volonté de détruire in fine la zone euro puisque c’est bien ce à quoi cela pourrait mener…
Mais tous ces éléments mis bout à bout ne prouvent pas cette théorie. En effet, parmi les critiques de la monnaie unique, il y a deux prix Nobel plutôt progressistes qui ne me semblent en aucun cas animés par une volonté de domination de leur pays et ils ne recommandent pas forcément la fin de l’euro. En outre, la spéculation des marchés peut être justifiée par les simples indicateurs actuels sur le niveau de la dette ou des déficits publics et non par une volonté de casser l’euro.
En effet, quand on voit la situation de la Grèce, avec sa dette qui s’envole à 160% du PIB, une croissance en berne et un déficit qui devrait atteindre péniblement 7.6% du PIB en 2011, il n’est pas anormal que les marchés en déduisent une décote probable de la dette de 50% comme ils le font aujourd’hui. On pourrait même dire que le niveau de décote induit par les marchés est très raisonnable étant donnée la situation des différents pays de la zone euro…
La monnaie unique n’est pas en cause
Alors, bien sûr, on peut voir la menace que représente l’euro pour le dollar, dans le sens où la monnaie unique européenne pourrait devenir un rival et faciliter l’évolution du monde vers un multipolarisme monétaire qui ferait perdre aux Etats-Unis le privilège exorbitant du dollar, monnaie nationale et monnaie de réserve du monde. Cependant, il faut noter que la fin de la monnaie unique ne serait pas forcément la fin de l’euro, qui pourrait être conservée comme monnaie commune.
Pire pour les Etats-Unis, cette monnaie commune pourrait s’étendre au-delà de la simple zone euro et remettre en question plus encore la domination du dollar. D’ailleurs, il est tout de même extrêmement intéressant de constater que les administrations étasunienne et chinoise soutiennent fortement la monnaie unique, ce qui devrait amener à se poser la question inverse, à savoir si l’euro monnaie unique ne sert pas davantage les intérêts des Etats-Unis et de la Chine.
En effet, Barack Obama est intervenu plusieurs fois pour pousser les dirigeants européens à adopter les plans de sauvetage, poussant Angela Merkel à accepter le fonds européen au printemps 2010. En effet, la monnaie unique, par sa cherté structurelle, profite aux Etats-Unis, poussant Airbus, par exemple, à acheter de plus en plus de composants outre-Atlantique. Et il en va de même pour la Chine, qui soutient la monnaie unique en achetant des dettes souveraines.
Loin de vouloir la fin de la monnaie unique, les anglo-saxons semblent au contraire s’en satisfaire, de même que la Chine. Cela devrait amener à se poser la question légitime de nos intérêts car il paraît douteux que l’euro dans sa forme actuelle puisse leur être favorable, ainsi qu’à nous…
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