Les enjeux de l’allongement du congé de maternité
Les députés européens ont voté en première lecture mercredi dernier, le principe d’un congé de maternité de minimum 20 semaines dans tout l’UE. Si cela ne constitue pas un bouleversement en France dont les congés de maternité durent déjà 18 semaines, ils constituent une véritable révolution dans certains pays, notamment de l’est et du sud, très en retard sur la question. Cette nouvelle fut accueillie avec un enthousiasme diverse par les ministres concernés des différents Etats membres. Rien qu’en France, on observe des dissonances entre Nadine Morano plutôt contre, et sa ministre de tutelle Roselyne Bachelot, plutôt pour. De par la manière dont elle a été traitée par les médias, la question parait dérisoire, pourtant, les congés de « parentalité » sont cruciaux pour l’avenir de l’Europe.
Or l’allongement du congé de maternité aurait pour effet, et cela a été prouvé, d’augmenter le taux de fécondité, et ce pour plusieurs raisons. D’abord plus le congé de maternité est court, plus les femmes doivent faire un arbitrage entre travail et famille. En effet, quand le congé de maternité est trop court, beaucoup de femmes se sentent obligée de quitter leur emploi pour s’occuper de leur enfant en bas age. Or en supposant qu’une femme fasse une pause d’un an et demi, elle touchera en fin de carrière un salaire moindre de 18% par rapport à une carrière sans arrêt. Dans les pays ou le congé de maternité est court, les femmes font plus qu’ailleurs cet arbitrage et ont donc moins d’enfants. Par ailleurs un allongement du congé maternité, s’accompagne empiriquement d’un rattrapage des salaires féminins sur les salaires masculins : en effet une grande partie de la différence de salaires entre hommes et femmes représente la rémunération du risque pris par l’employeur d’embaucher une femme, risque qui est le départ pur et simple de l’entreprise pour cause de maternité. En allongeant le congé de maternité on laisse donc plus de temps au femmes pour s’occuper de leurs enfants en bas age, et on évite donc un arbitrage famille/carrière qui explique en partie le bas taux de fécondité des pays européens.

Cependant certains pays, comme le Royaume Uni, l’Allemagne et dans une certaine mesure, la France, contestent cet allongement qui couterait trop cher. Il est vrai que sur le court terme, la France devrait par exemple débourser 1,7 milliards d’euros supplémentaires. Cependant à long terme ce calcul ne tient pas la route, en effet si le congé de maternité est allongé, moins de femmes quitteront leur emploi pour s’occuper de leurs bambins, par conséquent ces femmes toucheront un salaire plus élevé en fin de carrière, et cela signifie donc, à moyen terme, plus de rentrés fiscales pour l’Etat. Ces femmes rembourseraient donc à l’Etat l’allongement du congé de maternité, intérêts compris via l’impôt.
Si l’Europe ne veut pas perdre de sa splendeur, elle doit répondre a ce grand défi démographique qui s’impose à elle. Cela passe par l’allongement du congé de maternité mais aussi par l’amélioration et l’élargissement des structures de garde. C’est par un arsenal de petites mesures très concrètes que nous ferons remonter le taux de fécondité en Europe.
Article inspiré des travaux du sociologue danois Gosta Esping Andersen.
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