Datant du 12 mars 2014 pour Le Nouvel Economiste, ce sondage peut permettre de faire un tour des listes qui vont se présenter aux prochaines européennes et de tirer quelques premiers enseignements sur la possible issue de ces élections.
De ces 14 chiffres, ressortons trois enseignements :
-La sanction qui pourrait être infligée au Parti Socialiste : le parti de la majorité ne recueille pour le moment que 17 pour cent des intentions de vote. Sans doute le fruit d’une défiance ce à l’égard de la politique du gouvernement et du président actuels. Ainsi, le Parti Socialiste ne serait que troisième, assez loin derrière l’UMP et le FN, les deux partis leaders de la sanction à l’égard du PS. La sanction est aussi le fruit d’un manque de mobilisation : seulement 48 pour cent de ceux qui ont voté pour François Hollande en 2012 expriment le souhait de voter pour le PS à ces élections européennes.
-Le camp eurosceptique est déjà assez haut alors que la campagne n’a pas encore commencé. Le Front National est déjà à 21 pour cent, Debout La République est à 4 pour cent. A cela on peut même rajouter une gauche dans les mêmes chiffres qu’aux dernières élections présidentielles : 9 pour cent pour le Front de Gauche, 3 pour cent pour le Nouveau Parti Anticapitaliste et 1 pour cent pour Lutte Ouvrière. Le total s’élève à 38 pour cent.
-Les verts et les centristes confirment leur fibre européenne. Europe Ecologie-Les Verts totalise 7 pour cent des intentions de vote : c’est bien mieux que le résultats d’Eva Joly aux dernières élections présidentielles mais c’est plus de deux fois moins que leur résultat aux élections européennes de 2009 (plus de 16 pour cent). Les centristes (UDI et Modem) sont à 9 pour cent, soit le même résultat qu’en 2009 et 2012.
Cependant il ne faut pas s’arrêter à un tel sondage pour plusieurs raisons :
-La campagne pour les Européennes n’a pas encore commencé et pour le moment l’actualité politique se concentre plus sur les élections municipales de mars 2014.
-Seulement 19 pour cent n’expriment pas d’opinion, or le plus souvent l’abstention est beaucoup plus importante.
Le contexte : une désaffection pour l’Europe
Depuis les dernières élections européennes, le contexte a changé. Déjà en 2009, on ne pouvait pas dire que c’était le grand amour entre les français et l’UE : seulement 40 pour cent de participation !
Mais en plus, depuis 2009 s’est ajouté un contexte économique et politique plus tendu en Europe. En effet, les crises de la dette et de l’Euro se sont succédées dans divers pays : Grèce, Espagne, Portugal, Italie, Chypre. La confusion s’est installée et les décisions prises ont favorisé certes une Europe plus fédéral (
avec notamment le Mécanisme Européen de Stabilité, véritablement technocratique) mais aussi des tensions importantes entre les peuples et une résurgence des mouvements nationalistes voir néo-nazis (comme l’Aube Dorée en Grèce). Il est évident que jamais les tensions entre Grecs et Allemands n’ont été aussi fortes, les sondages le montrent :
plus de la moitié des Allemands souhaitaient en 2012 que la Grèce sorte de l’Euro, 49 pour cent pensaient que la Grèce ne pourrait pas se réformer. Plus de 51 pour cent des Allemands souhaiteraient même sortir de l’Euro. En 2013 en Grèce, 55 pour cent des Grecs auraient une opinion négative de l’UE et 49 pour cent une opinion négative de l’Euro. D’une manière plus globale, dans tout le continent, l’euroscepticisme gagne du terrain, soit par un manque de confiance, soit par une adhésion croissante aux partis eurosceptiques. Un des principaux leaders de cette montée est Nigel Farage, président du United Kingdom Independance Party, qui explose au Royaume-Uni. Celui-ci, par son sens rhétorique, se fait de plus en plus remarquer au parlement européen.
Bien sûr, cette forte poussée de l’euroscepticisme n’a pas échappé aux européistes qui ont ainsi décidé de le combattre
en finançant des « trolls » en vue des élections européennes sur internet, un des endroits où l’euroscepticisme semble le plus se développer.
De même, rappelons que l’une des dernières décisions de l’Union Européenne fut de permettre le
prélèvement des épargnants en cas de difficultés d’une banque. Il s’agit d’une nouvelle solution prévue pour 2016 pour tenter de sauver l’Euro. Cela constitue un véritable pari tellement
l’Euro est touché par des problèmes structurels qui se sont révélés et amplifiés depuis 2008.
« En fait, les élections au Parlement Européen représentent la première possibilité qui va être donnée aux Peuples Européens de donner leur avis sur l’Euro, ce Frankenstein financier qui a détruit leurs vies. Il va donc s’agir d’un referendum, pour ou contre l’Euro et C’EST TOUT. »
Peut-être est-on à un nouveau tournant sur le débat européen…
Les compétences du Parlement Européen
Faisons un petit tour des compétences du Parlement Européen pour voir plus concrètement l’utilité du vote de mai prochain.
Sur les finances
D’abord, comme tous les parlements, le Parlement Européen participe au vote sur le budget de l’UE européenne et a le dernier mot sur les dépenses non obligatoires. Elle a donc un rôle sur les finances mais ce rôle ne semble pas être le plus important. En effet, le parlement n’a une action que sur la partie dépense du budget et non pas sur les recettes…
Contrôle du pouvoir exécutif
Le parlement élit tous les 5 ans le président de la Commission Européenne mais sur proposition du Conseil de l’Europe. Cependant, le reste de la Commission Européenne est nommée sans tenir compte de la composition du Parlement.
Aussi, le parlement dispose d’un contrôle intéressant sur la Commission Européenne, qu’il peut démettre de ses fonctions à 2/3 des suffrages exprimés et à la majorité des parlementaires (et non pas des présents).
Pouvoir législatif
Le pouvoir législatif, à l’inverse de la majorité des parlements nationaux, n’est pas le principal pouvoir du Parlement européen. Il ne dispose pas de l’initiative en matière de pouvoir législatif (cela appartient à la Commission Européenne). Cependant, il est censé approuver (ou désapprouver) les lois et directives proposées par la Commission, ce qui n’est pas négligeable. A défaut de pouvoir véritablement réorienter la construction européenne par son biais, on peut au moins exprimer un désaccord sur la construction proposée par la Commission. Il lui est aussi possible de soumettre des demandes à la Commission qui s’engage depuis 2003 à donner suites aux demandes.
Conclusion
Même si l’Union Européenne est de moins en moins populaire, il ne faut surtout pas négliger son importance et son pouvoir. L’abstention n’est en aucun cas la solution pour changer l’Europe et même si le Parlement Européen n’est pas l’institution européenne qui a le plus de pouvoir, elle reste la seule tenant en compte l’avis des peuples européens. Le contexte ayant changé depuis 2009 (avec les crises successives de l’euro et les nouveautés technocratiques de la Troïka), il faut plus que jamais exprimer son avis. A défaut d’avoir eu un référendum en Grèce sur les mesures d’austérité (comme le préconisait Papandréou), ayons notre référendum en mai prochain !
Sources :