Négociations commerciales UE/Chine : diviser pour mieux exporter
Bras de fer Chine–UE. L’annonce de l’instauration par l’Union européenne d’un droit de douane sur l’importation de panneaux solaires chinois et de cellules photovoltaïques a donné lieu à des mesures de rétorsions de la Chine. Sur les vins français dans un premier temps. Sur les voitures allemandes haut de gamme dans un second. Le dragon chinois mise sur la division des européens pour échapper à la taxation de ses produits.
Initialement de 11, 7%, la taxe sur le photovoltaïque chinois devrait passer à plus de 47 % en moyenne. La raison évoquée par les européens est simple. Le dumping pratiqué par les autorités chinoises avec les capitaux d’État a cassé les prix et quasiment tué l'industrie naissante du photovoltaïque sur le vieux continent.
La vigueur de la réaction chinoise s'explique par le poids des exportations de ce secteur. En 2012, la Chine a exporté pour 20,577 milliards d’euros de matériel photovoltaïque vers l’UE alors que les importations de vin en provenance de l’UE, ont porté sur 762 millions d’euros dont 534 pour les vins français.
Au lendemain de l'annonce de Pékin du lancement d'une enquête anti-dumping sur les vins européens, François Hollande a lancé un appel à la cohésion des 27, la situation des balances commerciales des pays membres étant très divergente. En effet, les mesures protectionnistes proposées par la Commission doivent être approuvées par la majorité des Etats membres or, 17 d’entre eux, rangés derrière Berlin, s’y sont déjà déclarés opposés.
Version asiatique du combat des Horaces contre les Curiaces, Pékin mise sur la disparité européenne dans le droit fil de L'Art de la Guerre de SunZi, "Lorsque l'adversaire est uni, divisez-le".
L'Allemagne notamment, premier partenaire européen de la Chine, est hostile à une stratégie de tension avec Pékin. Le choix de la Commission a été sévèrement condamnée par Berlin qui a évoqué "une grave erreur".
La menace, arrivée dans un deuxième temps, du gouvernement chinois d’imposer des taxes douanières aux importations de voitures haut de gamme européennes, essentiellement allemandes, constitue une tentative d'enfoncer un peu plus un coin entre Paris et Berlin.
La Chine a semble-t-il déjà gagné la partie puisque 17 États sont sur la position allemande.
Il s'agit bien d'un nouveau clivage majeur de l'UE, désormais partagée à quasi égalité entre états inscrits dans une logique marchande et ceux, qui souhaitent défendre des industries nationales en difficulté. Entre ceux qui résument l'UE à une simple fédération de républiques marchandes et ceux qui aspirent à une construction politique plus intégrée placée sous le sceau de la solidarité.
Invité de France Culture (cf vidéo), Jacques Attali souligne que le protectionnisme n’est pas désastreux s’il est assorti dans le même temps d’une politique industrielle. Or si les pays de l’UE ont une politique commerciale commune, ce n’est absolument pas le cas pour leur politique industrielle. L’Europe est rattrapée une nouvelle fois par une construction inachevée qui l’a laissée au milieu du gué avec tous les risques que cela induit.
Crédit photo : Armin Linnartz
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