Pour que l’espoir renaisse à gauche
Malgré l’occultation du phénomène par les grands médias et l’appel à peine déguisé à l’abstention à coup de sondages utilisées pour guider le peuple dans ses choix après l’avoir privé d’une information sur les véritables enjeux du scrutin, un frémissement se fait sentir à la gauche de la gauche à quelques jours du vote. Les meetings du Front de gauche remportent un vif succès et cette initiative unitaire à la gauche du PS ne cesse d’enregistrer de nouveaux soutiens. Ainsi de nombreuses personnalités du monde politique ou culturel comme Jean Ziegler ou Guy Bedos ont décidé de lui apporter leur soutien.
Pour qu’un espoir renaisse à gauche et pour que changer d’Europe ne soit pas un vain slogan dénué d’actions et de votes en faveur de tous ceux qui aujourd’hui en France et Europe sont victimes la crise, cette union des antilibéraux pourrait créer la surprise dimanche prochain.
Continental, Caterpillar, Molex... dans le privé comme dans le public, ces derniers mois la colère populaire est montée d’un cran et des milliers de licenciement ont été annoncés en France, des dizaine de milliers en Europe, conséquences directes de la politique libérale menée depuis des années par les commissaires européens et autres technocrates et soutenue par les grands groupes politiques (PSE, PPE) mais aussi par les verts au parlement de Strasbourg.
Vous trouverez les votes des différents groupes dans le dossier spécial qu’y consacre le journal de Jaurès :
http://www.humanite.fr/Aujourd-hui-dans-l-Humanite
Mais face à l’ampleur de la crise qui se dessine, en France et en Europe, le premier semestre 2009 a vu des manifestations de salariés et chômeurs sans précédents depuis plusieurs années.
Dans les universités, les assemblées générales se sont multipliées et la ronde infinie des obstinés n’en finit pas de tourner... A l’université de Strasbourg, le 10 avril, et après les mises en scène violente orchestrées par le pouvoir lors du sommet de l’Otan dans cette même ville le 4 avril, les forces de l’ordre se sont opposées aux étudiants et enseignants qui manifestaient pacifiquement dans l’enceinte de la faculté et les en ont délogé.
Pour sa part, l’Appel des appels regroupe désormais de nombreux professionnels de la santé, de la justice, de l’éducation, entre autres corps de métier, qui en ont assez des restrictions budgétaires et des choix gouvernementaux allant à l’encontre de la qualité des services publics.
Manifestation du 29 mars en France
Dans son analyse de la situation actuelle parue dans « Le Monde » du 4 avril 2009, intitulée : « Après 1789, 2009 ? », voici ce qu’écrit Sophie Wahnich historienne au CNRS, chercheuse au CNRS-Laboratoire d’anthropologie des institutions et des organisations sociales (Laios-IIac) (1) :.
« Le mot d’ordre qui circule « nous ne paierons pas votre crise » met en évidence cette division sociale entre un « nous », les opprimés, et un « vous », les oppresseurs... Mais le « nous » des opprimés n’est pas constitué uniquement des précaires, chômeurs, ou futurs chômeurs, il est constitué des classes moyennes qui sont précarisées, des classes lettrées qui manifestent et se mettent en grève pour défendre une certaine conception de l’université et des savoirs. Il est constitué de tous ceux qui, finalement, se sentent floués et réclament « justice ».
A ce titre, les mouvements sociaux de cet hiver et de ce printemps sont déjà dans la tentation naturelle de refaire 1793. Ils veulent plus de justice et pour l’obtenir affirment que, malgré les résultats électoraux, ils incarnent le souverain légitime... Une loi, aujourd’hui, a été votée pour agrandir cette classe d’ilotes, mais le gouvernement refuse que l’impôt sur les immenses richesses puisse venir en aide aux « malheureux »Le pacte de la juste répartition des richesses prélevées par l’Etat semble avoir volé en éclats quand les montants des chèques donnés aux nouveaux bénéficiaires du paquet fiscal ont été connus : les 834 contribuables les plus riches (patrimoine de plus de 15,5 millions d’euros) ont touché chacun un chèque moyen de 368 261 euros du fisc, « soit l’équivalent de trente années de smic. “
Et ne parlons pas des multiples scandales liés à l’octroi de parachutes dorés et autres stock-options mirobolants à des PDG directement impliqués dans les faillites bancaires par leur choix de gestion plus près du pari de casino ou du Monopoly que d’une utilisation responsable et utile de l’argent que leur avaient confié les petits épargnants. Ne parlons pas non plus, ou plutôt si, parlons-en, de la solution trouvée par les dirigeants des principales puissances mondiales : faire payer aux plus pauvres et aux contribuables l’irresponsabilité et l’incurie de ces décideurs. Encore et toujours...
De son côté, le gouvernement français comme beaucoup d’autres en Europe et dans le monde tente d’entretenir l’illusion que la fin de la crise est pour bientôt et que ce système en faillite peut-être régulé, relayé par les mêmes experts économiques et financiers qui lui servent de porte-voix sur les plateaux TV. Un point de vue partagé par les dirigeants du G 20 et dans notre pays, par la plupart des partis dont le PS (et l’UMP bien sûr) mais aussi par le Modem, l’extrême-droite et les écologistes libéraux qui ont voté des deux mains le traité de Lisbonne, plus libéral que moi tu meurs ! Reniant ainsi le Non au Traité constitutionnel européen par 55% des français !
Pourtant, l’avertissement est de plus en plus clair et audible : les manifestants contre la réunion du G 20 à Londres le 2 avril dernier brandissaient des banderoles où on pouvait lire dans la langue de Shakespeare :
« Le capitalisme, ça ne marche pas. Un autre monde est possible ! » (Banderole brandie par les manifestatnts anti-G20 à Londres le 2 avril) :
Nous ne paierons pas leur crise
Alors quelle traduction politique peut-on attendre de cette forte volonté de changement qui s’exprime dans les conflits sociaux et dans les manifestations
Contester les dogmes du capitalisme et proposer de nouvelles règles du je
Des personnalités politiques et de simples citoyens proposent des solutions mais au même titre que les enseignants et les étudiants en mouvement depuis près de quatre mois, dans les grands médias d’information ils ont été jusqu’ici purement et simplement censurés.
L’allégeance des économies nationales aux règles de la haute finance et aux dogmes capitalistes de la compétitivité, de la rentabilité et de la flexibilité, toujours à la recherche du profit maximum, nous a conduit là où nous en sommes. A un véritable gâchis planétaire qui fait courir de graves dangers à la démocratie et à la paix dans le monde.
L’épisode déclencheur des subprimes aux Etats-Unis a été le révélateur de la supercherie que représentent les mécanismes de crédits à taux variables et de leur titrisation, qui ont constitué une manne financière pour des boursicoteurs sans scrupules mais qui a conduit des centaines de milliers de ménages américains à la rue.
Face à ce rouleau-compresseur qui broie la vie de simples citoyens vivant de leur travail partout dans le monde, tous ceux-là avec l’aide de politiques qui ne s’en remettent pas aux sacro-saintes lois du marché, doivent proposer et défendre une autre logique, un autre moteur de l’économie. Une logique qui ne mette plus au centre des sociétés humaines la recherche du profit et son pendant - l’exploitation de millions d’hommes, de femmes et d’enfants – mais la satisfaction des besoins et l’épanouissement de tous dans le respect de l’environnement.
L’Europe qu’on nous vante régie par les traités de Maastricht puis de Lisbonne est basée sur le principe de concurrence libre et non faussée, y compris pour les services publics (directive Bolkestein) et sur la libre circulation des capitaux qui conduit à un moins-disant social et à la remise en cause des acquis sociaux de nombreux pays.
Ne faut-il pas au contraire faire adopter et inscrire dans les textes de cette Union des Etats européens des règles radicalement différentes, à l’opposé de cette concurrence de tous contre tous, basées sur la satisfaction des besoins des populations et sur la coopération et l’entraide entre ces pays ?
Même chose au niveau international. Ne pourrait-on pas changer les critères d’attribution d’aides aux pays pauvres du FMI et de la Banque mondiale basés sur la rentabilité financière de leurs économies et la promotion de secteurs dits « rentables » à l’exportation qui n’apportent aucun mieux-être à leur population ?
A l’inverse ne peut-on défendre et faire adopter au niveau international des critères basés sur la satisfaction des besoins de ces populations, en les aidant à développer des services publics innovants et des activités aux retombées directes pour ces peuples, comme par exemple la souveraineté alimentaire ?
Interdire les licenciements boursiers.
Dans la même logique mercantile et de recherche de marges et de dividendes toujours plus importants pour les entreprises et les actionnaires, les licenciements boursiers qui étaient déjà monnaie courante sont en hausse exponentielle en période de crise.
Les interdire - notamment en France – par la loi et en créant un organisme public de crédit qui conditionne les aides aux entreprises à de véritables créations d’emplois et de services aux populations ainsi qu’au respect de l’environnement, serait une preuve de la volonté des politiques d’oeuvrer dans l’intérêt des salariés et des chômeurs victimes de cette course folle à l’enrichissement d’une poignée de privilégiés.
Le Front de gauche – Parti de gauche, PCF, Gauche unitaire (minoritaires du NPA), MRC) – pourrait créer la surprise et faire mentir les sondages si les votes en sa faveur dépassaient ceux du PS. Car il faut en finir avec cette fausse gauche qui a détourné de nombreux citoyens de la politique. Bien sûr, le débat sur les élections européennes est volontairement occulté par les médias. Par exemple qui sait qu’Ignacio Ramonet (Attac), Gisèle Halimi et Magyd Cherfi (Les Motivés) - parmi d’autres nombreuses personnalités - dans leur soutien au Front de gauche ? Et que pas moins d’une quarantaine d’économistes appelent à voter Front de gauche pour faire renaître l’espoir d’une vraie gauche en France.
Tous ceux qui en ont assez des politiques menées au nom de l’Europe libérale et des traités de Maastricht et de Lisbonne et qui veulent voir les formations politiques de la gauche unie dans la bataille doivent se mobiliser le 7 juin pour faire entendre une autre voix, antilibérale, pour une europe sociale, solidaire, pacifique, démocratique, écologique, féministe.
Voici ce qu’on peut lire sur le site web du Front de gauche :
« Les élections européennes de juin 2009 vont offrir une occasion de changer les fondations de l’Union européenne et d’ouvrir une nouvelle perspective pour l’Europe.
Nous faisons face à une crise financière, économique et sociale, une crise de l’ensemble du système et qui continue à grandir de jour en jour. Elle amplifie la crise alimentaire, énergétique et écologique. Elle aggrave les inégalités de genre. Elle a des conséquences sur la vie de tous les êtres humains en Europe et dans le monde.
Partout, le choc est terrible dans l’Union européenne. La crise est causée par le capitalisme néolibéral mondialisé, qui est poussé en avant par les élites irresponsables qui prennent les décisions politiques et économiques. Le prix de cette irresponsabilité devra être payé par les peuples. Leurs politiques mettent en danger la paix, la sécurité et la coexistence internationales. Le monde a été plongé dans cette crise mondiale par la politique hégémonique des États-Unis, en particulier par l’Administration Bush.
Lire la suite : http://www.frontdegauche.eu/index.php?option=com_content&view=article&id=228:plateforme-electorale-du-pge&catid=100:argumentaires&Itemid=121
Video Front de gauche :
Beaucoup mettent en avant le fait que l’Europe est pilotée par la commission européenne et la BCE... et qu’il serait donc vain d’aller voter. Pourtant s’abstenir ne rendra pas le parlement européen plus démocratique, au contraire cela confortera les tenants du libéralisme dans leur vision d’une Europe technocentriste, loin des gens, boîte d’enregistrement des désidératas des financiers et des puissants.
Le problème n’est pas l’existence de ce parlement (ni d’aucun parlement d’ailleurs) mais sa composition politique et de le faire évoluer vers une représentation beaucoup plus proche des préoccupations populaires.
Car contester l’utilité même du vote, du suffrage universel et aller jusqu’à appeler comme certains n’hésitent pas à le faire à bloquer l’entrée des bureaux de vote n’est pas recevable dans le contexte actuel qui appelle au contraire un renforcement de la démocratie, directe et représentative, à l’expression la plus large de ceux qui pensent qu’un autre monde est possible.
Comme le dit Bernard Cassen, journaliste et universitaire, dans son message de soutien au Front de gauche : « Après une trentaine d’années d’hégémonie, le néolibéralisme est en train de se fracasser contre le mur de ses propres aberrations. L’occasion serait idéale pour lui opposer des alternatives cohérentes,aussi bien au niveau national qu’européen et international, et pour donner ainsi des perspectives politiques aux luttes sociales qui font tache d’huile dans de nombreux pays du Nord comme du Sud. »
(1) Elle est l’auteur de nombreux ouvrages sur la Révolution française, dont "L’Impossible Citoyen, l’étranger dans le discours de la Révolution française" (Albin Michel, 1997) ; "La Longue Patience du peuple, 1792, naissance de la République" (Payot, 2008).
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