Pourquoi le gouvernement italien ne pliera pas...
... et en quoi le rapprochement avec Orban est un véritable marqueur.
Avant tout, il faut apprécier l’espace géographique et historique de l’Italie : sans ancien empire colonial, ni réelle influence mondiale politique ou culturelle, l’Italie ne peut jouer que sur deux tableaux : l’Europe et la Méditerranée. Or, cette dernière zone est désormais en voie de désorganisation (et l’UE n’a, dans l’opinion italienne, guère aidé l’Italie pour absorber la crise migratoire alors même qu’elle était en première ligne) : ne reste donc que l’Europe.
Ensuite, L’Italie n’est pas la Grèce : deuxième puissance industrielle de l’Union Européenne, avec des comptes publics assez sains et une balance commerciale à l’équilibre, exportant massivement dans des pays de l’Europe orientale réputés « eurosceptiques », elle pourrait même devenir le porte-voix de ces derniers (explicitement le « groupe de Višegrad ») pour réclamer un rééquilibrage de l’Union voire envisager une sortie de l’Euro (ce qui accroîtrait d’autant la compétitivité de son industrie exportatrice). A cet égard, toute « surréaction » du couple Franco-Allemand ou de l’Europe du Nord serait extrêmement dangereuse et pourrait au contraire accélérer le mouvement de contestation des mécanismes de l’Union par l’Italie. Le spectre d’une crise financière en Europe, déclenchée par une rupture violente entre Europe du Nord et Europe du Sud et de l’Est, est effrayant à juste titre car un tel développement serait un vrai cataclysme qui n’aurait rien de commun avec la crise grecque.
Troisièmement, il faut comprendre que la coalition qui est au pouvoir en Italie fait elle aussi le pari du respect à ses engagements électoraux. Elle appliquera son "programme-cadre" en faisant autant que faire se peut fi des avis extérieurs. L’Union Européenne serait d’ailleurs bien avisée de ne pas s’engager, sur un plan politique, de manière trop frontale contre l’Italie, non seulement en raison des risques économiques de crise, mais aussi sous peine de passer un peu plus pour une structure coupée de la volonté démocratique des peuples. Surtout à un an des élections européennes.
Enfin, il ne faut pas que « l’Europe qui gagne » de 2018 refasse les mêmes erreurs que « l’Europe qui avait gagné » en 1918. En méprisant ses demandes et en n’accordant en somme qu’une place de pays « semi-victorieux » à l’Italie à l’issue de la Grande Guerre, celle-ci avait ouvert la voie à l’expérience fasciste dès 1922. Au final : le gouvernement italien mettra en œuvre une politique eurosceptique, et elle sera soutenue par les pays du groupe de Visegrád.
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