Royaume-Uni : victoire historique des travaillistes de Keir Starmer
« On peut dire ce que l’on veut sur vouloir sauver le monde, mais si nous ne gagnons pas d’élections, il n’y a rien que nous puissions faire ! » (Keir Starmer, le 4 avril 2020).
L'actuel Premier Ministre britannique Rishi Sunak, du parti conservateur, a dissous les Communes le 22 mai 2024 (comme en France le 9 juin 2024). Les citoyens britanniques sont allés voter ce jeudi 4 juillet 2024. Le renouvellement des parlementaires aurait dû avoir lieu en décembre prochain, leur mandat étant de cinq ans. 4 515 candidats ont fait campagne pour les 650 sièges de députés. Ce sont les premières élections législatives sous le règne de Charles III. Ces élections closent une période de quatorze ans de gouvernements conservateurs ponctuée par le Brexit et l'hystérisation du débat politique.
En effet, la promesse d'organiser un référendum sur le Brexit par David Cameron n'avait qu'une finalité très démagogique, gagner les élections législatives du 7 mai 2015 et le pari fut réussi. Sauf que David Cameron, qui ne souhaitait pas le départ du Royaume-Uni de l'Union Européenne, a dû organiser ce fameux référendum (qui a eu lieu le 23 juin 2016) et la campagne fut extrêmement démagogique et populiste (avec probablement des ingérences russes comme c'est désormais courant) et les conservateurs étaient eux-mêmes très divisés sur la question. Après la victoire du oui au Brexit, David Cameron a démissionné et les gouvernements se sont succédé, ceux de Theresa May, Boris Johnson, Liz Truss et Rishi Sunak (ainsi que les élections : le 8 juin 2017 et le 12 décembre 2019) pour mettre en œuvre techniquement (et avec beaucoup de difficultés) le Brexit.
Si les conservateurs, pourtant profondément divisés sur le Brexit, ont pu gagner les élections de 2017 et 2019, c'est parce que leurs adversaires travaillistes s'étaient donné comme leader Jeremy Corbyn, un homme très à gauche, ami de Jean-Luc Mélenchon et considéré comme le Mélenchon britannique. C'est même plus que cela puisque Jeremy Corbyn a démissionné de la tête du parti travailliste en raison des suspicions d'antisémitisme (et de ses échecs électoraux répétés).
Son successeur désigné le 4 avril 2020 est Keir Starmer (61 ans), une personnalité beaucoup plus recentrée, avocat, procureur général, député depuis 2015. Il a gagné sa notoriété auprès du grand public comme défenseur des écologistes dans l'affaire McLibel (un groupe de militants écologistes a fait campagne contre les méthodes de McDonald's, une affaire judiciaire qui a duré très longtemps) dans un documentaire de Ken Loach en 1997. Favorable au maintien de son pays dans l'Union Européenne, Keir Starmer avait demandé l'organisation d'un second référendum sur le Brexit mais Jeremy Corbyn s'y était opposé.
La situation économique se dégradant et les conservateurs étant très divisés, la défaite du gouvernement sortant était attendue, mais peut-être pas d'une telle ampleur. Le mode de scrutin pour la Chambre des Communes est le scrutin majoritaire à un tour, ce qui a pour effet une amplification des victoires et des défaites, d'autant plus que le système politique britanniques n'est pas binaire, puisque quatre partis principaux ont fait campagne, les conservateurs, les travaillistes, mais aussi les centristes libéraux-démocrates et les populistes de Nigel Farage qui avait efficacement fait campagne en faveur du Brexit. Malgré une audience électorale non négligeable (il n'y a pas encore les résultats en voix mais probablement une dizaine de pourcents), le nombre de sièges se comptera sur les doigts d'une main (dans les résultats provisoires, son parti est crédité de 4 sièges, ce qui est beaucoup plus que ce que les sondages avaient pronostiqué).
Sur 648 sièges connus (sur les 650 au total) dans les résultats provisoires, les travaillistes ont obtenu (au moins) 412 sièges, soit 210 de plus qu'en 2019. Les travaillistes ont donc largement atteint la majorité absolue (326 sièges). Inversement, c'est un désastre électoral pour les conservateurs qui ont perdu 244 sièges avec 121 députés élus. Selon certains spécialistes, la victoire des travaillistes est historique est dépasse celle des libéraux aux élections du 12 janvier au 8 février 1906 où ils avaient obtenu 397 sièges sur 670 avec 48,9% des voix (pour une participation de 83,2%), soit un gain de sièges de 214 alors que leurs adversaires conservateurs avaient perdu 246 sièges avec 156 sièges gagnés (pour 43,4% des voix).
Ce jeudi, les libéraux-démocrates ont fait également un très beau score avec le gain de 60 sièges, ils ont atteint (au moins) 71 sièges, tandis que le parti national écossais (indépendantistes écossais) a au contraire énormément chuté à 9 sièges (perdant 39 sièges), accusant sa plus grande défaite depuis 2010. Pour les conservateurs, c'est une défaite historique puisque jamais ils n'ont eu aussi peu de députés depuis la fondation des Tories en 1834 !
Si les travaillistes ont gagné, c'est aussi parce que Keir Starmer a profondément changé le programme de son parti depuis la démission de Jeremy Corbyn, ce dernier voulait même se désengager de l'OTAN. Keir Starmer a tenu une ligne très claire de lutte contre l'antisémitisme, a rejeté les mesures fiscales démagogiques en renonçant à des augmentations d'impôts, en prônant une politique pro-entreprises, en soutenant un programme nucléaire de long terme, en défendant une régulation de l'immigration, etc.
C'est assez amusant de voir des gens de gauche en France qui se sont alliés avec les insoumis se féliciter de la victoire de Keir Starmer, car si l'on veut se permettre de faire un parallèle, on peut dire que les travaillistes britanniques ont pu gagner (très largement) les élections parce que justement, ils ont viré leur Jean-Luc Mélenchon et l'ont remplacé par leur Emmanuel Macron ! Nul doute qu'une ère nouvelle commence au Royaume-Uni. Celle du retour à la modération.
Aussi sur le blog.
Sylvain Rakotoarison (05 juillet 2024)
http://www.rakotoarison.eu
Pour aller plus loin :
Royaume-Uni : victoire historique des travaillistes de Keir Starmer.
Les 80 ans du Débarquement en Normandie.
Le Tunnel sous la Manche.
Il y a 20 ans, l'élargissement de l'Union Européenne.
Peter Higgs.
Les 120 ans de l'Entente cordiale.
75 ans de l'OTAN.
Le souverain cancer de Charles III.
Le retour surprise de David Cameron.
Charles III en France : oublié le Brexit, vive l'Entente cordiale !
David Hockney.
Richard Attenborough.
Jane Birkin.
Kim Wilde.
Couronnement plus vieux, couronnement heureux !
Tony Blair.
Discours de Tony Blair à l'Assemblée Nationale le 24 mars 1998 à Paris (texte intégral et vidéo).
Êtes-vous invité au couronnement ?
Margaret Thatcher.
John Major.
Michael Heseltine.
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Anthony Hopkins.
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Ukraine, un an après : "Chaque jour de guerre est le choix de Poutine".
L'Ukraine à l'Europe : donnez-nous des ailes !
Élisabeth II, la reine des Français ?
Howard Carter.
La BBC fête son centenaire.
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Qui succédera à Liz Truss ?
Liz Truss.
Le temps du roi Charles III.
Je vous salue Élisabeth, pleine de grâce…
Archie Battersbee.
Diana Spencer.
Theresa May.
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