Suisse : le succès électoral de l’extrême droite repose sur une escroquerie politique et met en évidence la médiocrité des partis rivaux
Le succès électoral de l’Union démocratique du centre (UDC) repose sur une escroquerie politique. Bien qu’elle se donne une image d’amie du peuple, l’Union démocratique du centre ne fait absolument rien pour le peuple, bien au contraire.
La prétendue "lutte contre les abus" dont l’Union démocratique du centre a fait son fonds de commerce électoraliste n’est qu’un alibi pour se livrer au démantèlement social en toute bonne conscience. C’est la même méthode que celle qui consiste à feindre de défendre les intérêts des contribuables en créant délibérément une logique de banqueroute au préjudice de l’Etat. Alors même qu’on affecte de se préoccuper de l’endettement des finances publiques, on exige des diminutions d’impôts au profit des plus riches. On invoque le déficit des finances publiques pour contraindre l’Etat à privatiser les services publics, fermer des hôpitaux, des bureaux de poste, diminuer le montant des retraites au préjudice du commun des citoyens, diminuer le montant des indemnités de chômage et la durée de ces indemnités, licencier les fonctionnaires, etc. Les riches n’ont pas à se soucier des conséquences de cette politique, car ils peuvent s’offrir une clinique privée et envoyer leurs enfants dans des écoles privées.
Au lieu de résoudre les vrais problèmes, l’Union démocratique du centre les aggrave et détourne le débat politique sur des problèmes relativement dérisoires ou des faux problèmes, en rejetant la responsabilité de tout ce qui ne va pas sur des boucs émissaires : faux requérants d’asile, faux invalides, faux chômeurs, travailleurs frontaliers et les étrangers en général. Cette politique du bouc émissaire s’accompagne d’une campagne de calomnies permanentes dont seule change la cible au fil des mois. Les politiciens qui tiennent ce discours cynique bénéficient de la plus grande complaisance de la part des médias locaux, tandis que ceux qui le combattent sont hypocritement accusés d’angélisme et présentés, au mieux, comme de doux naïfs. Obsédés par leur image, les politiciens rivaux ne veulent pas être en reste et, après de molles protestations pour la forme, s’associent à cette politique du bouc émissaire.
L’Union démocratique du centre mène une politique néolibérale taillée sur mesure dans l’intérêt particulier des multinationales, des banques et des spéculateurs internationaux. Il s’agit d’une politique manifestement préjudiciable au commun des citoyens. Le succès électoral de l’Union démocratique du centre ne s’explique nullement par les mérites objectifs de sa politique. Il repose essentiellement sur la médiocrité des partis rivaux. Et, en premier lieu, il repose essentiellement sur la médiocrité de la prétendue "gauche" suisse.
Les partis de gauche suisses sont dirigés par des apparatchiks syndicaux, des avocats ou de hauts fonctionnaires tous grassement payés. Ce sont des propriétaires de villas qui s’identifient aux autres propriétaires de villas, et non à l’ouvrier ou à la vendeuse exploités. Les politiciens de gauche suisses sont de fervents adeptes de la course aux pots-de-vins. A quelques rarissimes exceptions près, ce sont des opportunistes engagés en politique parce qu’ils espèrent, par ce moyen, "se faire des relations", obtenir une place juteusement rémunérée, ou décrocher une subvention dont ils se mettront l’essentiel dans la poche. Leur prétention de représenter le peuple est une imposture, au même titre que la prétention similaire de l’Union démocratique du centre et des autres partis.
Depuis une vingtaine d’années, la gauche suisse est complice de la politique néolibérale de démantèlement social. Chacune des étapes de ce démantèlement social a été entérinée par les partis de gauche. Les dirigeants des partis de gauche sont les premiers à mettre le couvercle sur la marmite des revendications de la base et les découragent systématiquement en les qualifiant d’irréalistes ou d’utopistes. On ne compte plus le nombre de fois où les partis de gauche ont refusé de soutenir un référendum lancé par des chômeurs, des invalides ou d’autres catégories sociales victimes de la politique néolibérale. Dans le même temps, les dirigeants des partis de gauche se donnent des airs de "résistants" face à cette politique néolibérale. Militer pour la gauche suisse n’a aucun sens, car les militants sont systématiquement trahis par les dirigeants des partis de gauche, toujours disposés à s’entendre avec les dirigeants des partis de droite sur le dos de leur propre base. Plus un politicien de gauche ou un apparatchik syndical est vendu à la droite et plus les médias locaux se montrent complaisants à son égard. Il sera dépeint comme quelqu’un de raisonnable, pragmatique, avec qui on peut discuter, tandis que ceux qui refusent de faire des concessions sur le dos des pauvres et des exploités sont dépeints comme des extrémistes. On rejette hypocritement sur eux la responsabilités des suppressions d’emplois, comme si ces suppressions n’étaient pas décidées par les spéculateurs internationaux dans le but d’accroître leur dividende.
Les dirigeants du Parti socialiste suisse se sont tellement éloignés du commun des citoyens qu’ils redoutent d’être identifiés au "parti des perdants". Ce serait mauvais pour leur précieuse image. Dans l’espoir de s’attirer les votes de "la classe moyenne", ils ont tourné le dos aux exploités et aux plus démunis, se discréditant ainsi à leurs yeux. Le Parti socialiste suisse n’apparaît plus que comme un club d’opportunistes vivant sur l’héritage social construit par les générations précédentes, mais courant désormais après la droite néolibérale et se donnant pour modèle un Anthony Blair.
N’attendant plus rien de la gauche suisse, sinon du blabla "politiquement correct" et des slogans creux, les électeurs ont tendance à considérer l’Union démocratique du centre comme le parti qui dénonce l’hypocrisie du milieu politique et veut "faire le ménage". Cette illusion est entretenue par les principaux médias locaux, dont la servile complaisance favorise le règne des imposteurs. Le vote UDC est moins un vote xénophobe qu’un vote sanction à l’encontre des autres partis. Ainsi, dans le canton de Genève, au cours de ces dernières années, deux partis d’extrême droite, inexistants ou complètement marginalisés jusqu’alors, ont successivement accédé au parlement en basant leur campagne électorale sur la dénonciation du milieu politique et ses magouilles : l’Union démocratique du centre et le Mouvement des citoyens genevois. On mentionnera que, contrairement à l’Union démocratique du centre, le Mouvement des citoyens genevois soutient la justice sociale. Quant à la gauche genevoise - ou ce qui en tient lieu -, minée par les rivalités égocentriques de ses dirigeants, elle n’est bonne qu’à faire de l’agitation à propos d’un quelconque projet de parking et occuper toutes les places qu’elle peut obtenir dans les conseils d’administration qui distribuent un jeton de présence à leurs membres. Bien que l’exécutif du canton de Genève soit censé être "majoritairement de gauche", il mène une politique réactionnaire et ne cesse de s’en prendre aux plus démunis.
Frank Brunner
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