Les commerçants oubliés
Une conséquence inédite des blocages induits par le CPE, place de la Sorbonne : depuis deux semaines, des commerçants ouvrent tous les jours leurs boutiques sans recevoir le moindre client, ou si peu...
Que l’on remonte la rue Cujas en direction de la Sorbonne ou que l’on tente d’entrer en empruntant la rue de la Sorbonne, la situation est la même, et bien compréhensible : les deux rues sont barrées par des gardes mobiles de la police comme de la gendarmerie, tandis que les ouvertures sont obstruées par des grilles... Il s’agit d’éviter une prise d’assaut en règle des manifestants contre les locaux de l’université.
Pourtant, lorsqu’on demande si on peut entrer dans le périmètre surveillé afin de se rendre dans un bar ou dans une librairie de la place, la réponse est souvent la même : "Tout est fermé", nous dit-on, "Le quartier est bouclé !".
Cependant, avec un peu d’obstination ou de chance, les forces de police parfois vous laissent entrer, "pour voir", disent-elles, afin qu’on puisse vérifier par nous-mêmes l’état des lieux. Quelle n’est pas alors notre surprise en découvrant les différents commerces ouverts : des bars-brasseries vides, des librairies ouvertes, avec leur personnel attendant un éventuel client. Quelques personnes se pressent dans ces lieux déserts, des personnes âgées pour la plupart, peut-être parce qu’elles ne ressemblent pas à des manifestants... Avisant la librairie philosophique qui jouxte la rue Champollion, je demande étonné au premier vendeur que je rencontre : "Ah, vous êtes de nouveau ouvert !", tandis que celui-ci, surpris, me répond : "Mais non, nous le sommes toujours depuis deux semaines, nous avons simplement été fermés samedi dernier... Mais on ne voit personne !".
On ne peut être qu’étonné devant un tel paradoxe : voilà précisément des gens que les services de sécurité laissent entrer chaque matin et repartir chaque soir, sans même s’interroger sur la possibilité que ceux-ci aient des clients... iIs les condamnent donc pratiquement au chômage technique... Sans doute à cause d’une mauvaise coordination des ordres de la préfecture ou d’une coopération inefficace entre les différents services chargés des lieux, et de peur sans doute de laisser passer quelques étudiants...
Il est pourtant urgent de permettre au quartier de respirer, en informant les forces de police sur place que la vie économique doit continuer, même dans ces zones protégées, afin d’ailleurs de faire découvrir aux éventuels chalands les curiosités surréelles d’un environnement recomposé et peut-être déjà historique...
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