Sondage et fusions-associations de communes
Sondage et fusions-associations de communes
Les
sondages méritent qu’on y regarde toujours à deux fois, avant de prendre
pour argent comptant ce qu’on croit pouvoir y lire au premier regard.
Vous savez, par exemple, que la façon de poser une question influe forcément sur la réponse qui est donnée. L’art de poser la bonne question,
pour obtenir la réponse que l’on souhaite, est un art largement
pratiqué lorsque le sondage doit servir non pas à établir une
photographie de l’opinion, mais à établir que la vérité en laquelle on
croit est juste.
Malheureusement, la mairie de Rouen vient de nous
en donner une illustration particulièrement frappante. La mairie a
voulu montrer que les habitants de Bihorel et de Bonsecours étaient
favorables à une fusion-association avec Rouen, alors que les élus de ces
deux villes ont montré leur désapprobation.
Quelle technique a été choisie ? Occulter, simplement, le terme de
fusion, et ne parler que d’association. D’où la question suivante :
"Avez-vous entendu parler d’un projet d’association entre Bihorel,
Bonsecours et Rouen ?". Toutes les questions suivantes porteront sur un
projet d’association, et non sur un projet de fusion. S’opposer à une
association, ou à une fusion, vous conviendrez que ce n’est pas
exactement la même chose.
Et les personnes interrogées répondent bel
et bien en fonction de la question posée, et non de leur connaissance
du dossier. La preuve ? 36 % des personnes interrogées n’ont pas
entendu parler du projet. Mais seulement 10% se disent sans opinion
quand on leur demande si elles y sont favorables ou opposées ! Restent 26
%, qui n’ont jamais entendu parler de cela avant qu’on leur pose la
question, mais qui vont quand même donner leur opinion, sur une simple
association, et non sur une fusion... Avouez que vouloir tirer une
conclusion de tels résultats sera tout de même un peu osé. Mais peu
importe, puisqu’on arrive à ce à quoi on voulait arriver : 51 % des
habitants de Bihorel et 68 % de ceux de Bonsecours se disent favorables
à une association avec Rouen.
Vient se greffer un autre point qui a son importance : la taille de l’échantillon interrogé. Il s’agit, pour chacune des deux communes, de 300 personnes. D’où une marge d’erreur importante, sur laquelle, évidemment, on ne communiquera pas : 51% de 300 personnes, si l’on tient compte de la marge d’erreur, cela veut dire, scientifiquement, entre 45,2% et 56,8%. Autant dire honnêtement qu’on ne peut tirer aucune conclusion d’un tel chiffre. Les mêmes modes de calcul donnent une fourchette comprise entre 62,6% et 73,4% pour le résultat donné de 68%. Là, oui, le résultat pourrait paraître sans appel... si la question n’avait été biaisée dès le départ.
Qu’on repose la question, en remplaçant le mot association par le mot fusion, et qu’on pose la question à un échantillon plus représentatif de la population, les résultats ne seront évidemment pas les mêmes. Mais sur ces résultats-là, on ne pourra pas fonder une communication efficace.
Pour calculer la marge d’erreur d’un sondage, je vous recommande cette page Web.
Ajouter une réaction
Pour réagir, identifiez-vous avec votre login / mot de passe, en haut à droite de cette page
Si vous n'avez pas de login / mot de passe, vous devez vous inscrire ici.
FAIRE UN DON