2005 en Afrique...
Les années se suivent, mais ne se ressemblent pas ; 2005 n’a pas failli à la règle. Que ce soit dans les domaines politiques, économiques voire sportifs, cette année, qui vient de finir, nous a réservé ses cohortes de surprises, de rebondissements, propres à cette Afrique qui se cherche depuis des décennies.
![](http://www.agoravox.fr/local/cache-vignettes/L139xH93/afriqie-03af3.jpg)
Au début :
Fidèle à son image de continent bouillonnant dont les vapeurs qui s’échappent sont teintées depuis belle lurette par les conflits fratricides, des famines, des déplacements de populations provoqués par des guerres civiles, l’année qui s’achève ouvre sa première page par la crise togolaise, déclenchée par le décès de son président, le doyen des chefs d’Etats, feu Gnassimbé Eyadéma, au pouvoir depuis 1965 , mort en décembre 2004 ; comme pour perpétrer la régence, son fils, Faure Eyadema, nonobstant la constitution, écarte le successeur constitutionnel et s’installe aux commandes du pouvoir, oubliant de facto la vieille tradition africaine qui veut qu’en cas de deuil, toutes les querelles soient mises en berne jusqu’à l’enterrement du défunt... Ce sont les condamnations et les mises en demeure qui lui font plier l’échine, tout en maintenant sa candidature à l’élection présidentielle qui, d’ailleurs, sans coup férir, le porte quelques mois plus tard au sommet de l’Etat... Qui dit qu’en Afrique, le ridicule tue ? La bonne nouvelle de l’année vient du Soudan, qui allait enfin fumer le calumet de la paix, après un conflit de plusieurs décennies entre les animistes du sud de John Garrhan et les musulmans du nord détenteurs du pouvoir central ; mais le colonel rebelle ne savoure pas les merveilles de la paix, car quelques mois après, il meurt dans un accident d’hélicoptère, alors qu’il s’apprête à regagner Khartoum, en provenance de Kampala en Ouganda ; le pire d’une reprise de la guerre, qui avait mis sur la route des millions de déplacés, était évité de justesse.
Un autre conflit latent, celui de la Côte d’Ivoire, évolue dans l’impasse, avec le Président Laurent Bagbo, à ne jamais décider de céder la moindre parcelle de son pouvoir à qui que ce soit, malgré l’implication effective de la communauté internationale, sous l’égide de l’ONU, avec en sus les menaces d’embargo et d’isolement des chefs de guerre et des acteurs politiques impliqués dans ce drame.
Au fil du temps :
Les choses vont effectivement bouger... L’Union africaine, héritière de la défunte Organisation de l’unité africaine (OUA), s’implique activement dans la gestion des conflits... Du Libéria, en République démocratique du Congo, en passant par la Côte d’Ivoire, le Togo, le Soudan et le Burundi, l’UA fait entendre sa voix en multipliant des démarches, et surtout en désignant des émissaires, fins diplomates qui font avancer les processus de paix, tout en menaçant à chaque fois les belligérants, si les accords de paix n’étaient pas respectés, de sanctions.
Ainsi, le Libéria organise sa première élection démocratique qui porte, chose inédite en Afrique et rare dans le monde, une femme à la présidence de la république : Mme Elian Johnson, qui, au terme d’un combat épique avec l’ancienne star du football Georges Uppon Weah, prend le dessus.
En Côte d’Ivoire, le Président Laurent Bagbo, sous le joug des caciques de son régime et des jeunes patriotes, se résigne à contrecœur à promulguer la loi autorisant le dernier premier ministre du père de l’indépendance, Alassan Drame Ouattara, leader du Rassemblement des démocrates républicains, RDR, à pouvoir se présenter à une élection présidentielle, nœud du drame ivoirien.
Au Burundi, les élections démocratiques ont permis l’accession à la magistrature suprême d’un homme modéré ; beaucoup d’espoirs sont placés en lui.
En République démocratique du Congo, certains leaders jusque-là opposés au pouvoir, et en guerre ouverte à l’est du pays depuis plusieurs années, ont déposé les armes et rejoint le pouvoir central, en attendant les élections qui, nous l’espérons, permettront une cœxistence pacifique des fils de ce pays.
Pour une fois, l’organisation africaine joue son véritable rôle, et ce tableau luisant, en contraste total avec l’image qu’on présente le plus souvent de l’Afrique, est à son actif...
Un autre évènement, et non des moindres, est la volonté affichée par le Président béninois Mathieu Kérékou de ne plus briguer de mandat et de se conformer à la constitution : à notre avis, face à la volonté affichée de nombreux présidents au pouvoir en Afrique de fuir le statut d’ancien président et de se maintenir par tous les moyens aux affaires, mention spéciale à cet homme qui, par ce geste, administre une leçon d’humilité politique et de grandeur d’âme, qui lui permet de rejoindre le cercle très restreint des présidents Senghor, Nelson Mandela, qui ont volontairement quitté le pouvoir, alors que beaucoup d’autres s’éternisent et s’enlisent dans ses dédales.
La chute des ténors :
Jamais on n’aurait imaginé une Coupe du monde de football sans la participation des ténors africains que sont les Lions indomptables du Cameroun, les Supers Eagles du Nigeria... Allemagne 2006, ce sera sans eux, et pour cause.
Alors que tout le monde, jusqu’à la dernière journée, ne pouvait s’imaginer pareille situation, le sort en a voulu autrement ; tenus en échec à domicile par les Pharaons d’Egypte qui n’avaient rien à gagner ( un but partout), les Camerounais ont cédé leur place à la Côte d’Ivoire qui, pour la première fois de son histoire, goûtera aux merveilles d’une Coupe du monde de football, tout comme l’Angola, à égalité de points avec le Nigéria, qui se contentera de suivre ce rendez-vous footballistique à la maison. Impérial, le Togo, sous la supervision du maestro Stephen Keshi, survole et se qualifie comme la Côte d’Ivoire, le Ghana et l’Angola, à leur première participation en Coupe du monde, sans oublier la valeureuse Tunisie, qui en est à son troisième rendez-vous. C’est ce que nous offre le sport, en cette année 2005...
Les barbelés de la honte :
Cette année restera à jamais gravée dans l’esprit de bon nombre d’Africains comme celle des émigrés de Cieuta (Maroc), en route pour la recherche d’un monde meilleur, lequel malheureusement prend fin tragiquement dans cette enclave marocaine, à la frontière avec l’Espagne ; ils sont pourchassés et maltraités par leurs frères de ce royaume ; qui aurait cru, en cette période où l’heure est à l’unité du continent, que les Africains seraient les premiers à renvoyer ad patres leurs frères africains ? C’est pourtant la triste réalité, que nous avons vécue à la fin du troisième trimestre de l’année qui vient de s’achever.
Enfin les aspirations des jeunes Africains prises en compte :
Face aux nombreux problèmes que rencontrent les jeunes Africains dans leur existence quotidienne, notamment leur propension à émigrer par tous les moyens en occident, le sommet de la Francophonie, tenu à Bamako durant le mois de décembre dernier, a attisé la conscience de ces problèmes et a apporté des solutions, notamment celle de mieux investir dans son pays d’origine, afin que les populations se fixent et ne soient pas toujours tentées d’immigrer.
Ainsi va l’Afrique, à l’aube de l’an cinq du XXIe siècle.
7 réactions à cet article
Ajouter une réaction
Pour réagir, identifiez-vous avec votre login / mot de passe, en haut à droite de cette page
Si vous n'avez pas de login / mot de passe, vous devez vous inscrire ici.
FAIRE UN DON