A quoi joue Seif el-Islam Kadhafi ?
Depuis la libération des infirmières et du médecin bulgares, le fils du colonel Kadhafi, Seif el-Islam (ici), orchestre habilement sa propre mise scène médiatique en multipliant les déclarations aussi contradictoires que loufoques. En ce sens, il s’affirme bien comme le digne héritier du Guide de la grande révolution de la Grande Jamahiriya arabe libyenne populaire et socialiste (ici). C’est d’ailleurs là tout l’enjeu de ses dernières déclarations dont voici quelques morceaux choisis extraits des entrevues données, depuis une semaine, à trois grands médias (Le Monde, Newsweek et Al Jazeera) :
Le mercredi 1er août 2007, dans une entretien dans l’hebdomadaire français Le Monde (réalisé à sa demande), Seif Kadhafi a affirmé mercredi qu’un contrat d’armement avec la France ainsi qu’une décision de justice, concernant un ancien agent libyen détenu en Grande-Bretagne, avaient joué un rôle important dans la libération des infirmières et du médecin bulgares détenus en Libye. "Ce que je peux dire, c’est que les Français ont arrangé le coup. Les Français ont trouvé l’argent pour les familles. Mais je ne sais pas où ils l’ont trouvé", dit-il, refusant de confirmer une intervention du Qatar. Il a également affirmé que, dès le départ, les autorités savaient pertinemment qu’ils étaient innocents ; en un mot, il a reconnu qu’ils n’étaient, ni plus ni moins, que des otages !
Le lundi 6 août 2007, à l’hebdomadaire américain Newsweek, il confirme que l’affaire des infirmières bulgares n’a été qu’un "chantage", mais rétorque que les Européens ont, eux, également fait chanter les Libyens et ont "payé le prix" d’un "jeu immoral". "Tout le monde a joué sa carte pour favoriser ses intérêts dans son pays". Enfin, il a commenté le rôle de Cécilia Sarkozy, en déclarant qu’elle était "très chanceuse" car "beaucoup de personnes avaient essayé avant".
Le mercredi 8 août 2007, lors d’une entrevue à la chaîne satellitaire Al Jazeera, le « glaive de l’Islam » a fait de nouvelles déclarations. Il avoue tout d’abord que les infirmières et le médecin bulgares ont été torturés et menacés au cours de leur détention, mais récuse certaines déclarations du médecin d’origine palestinienne, notamment au sujet du viol dont il aurait été victime. Plus surprenant, Seif n’a pas hésité à critiquer le travail de la police libyenne en reconnaissant que « le dossier avait été bâclé et que les enquêtes n’ont pas été réalisées de manière professionnelle et scientifique ». En revanche, il estime que la justice libyenne est « exemplaire et juste ».
Contrairement à ses déclarations précédentes et sans doute parce qu’il s’adresse à un média qatari, il reconnaît le rôle financier du Qatar dans la résolution de l’affaire.
Enfin, interrogé sur ses déclarations de l’année dernière concernant la nécessité de créer un « mécanisme politique clair et transparent », de réformer la justice, de réaliser des élections, de doter la Libye d’une constitution et d’arrêter la torture, Seif fait marche arrière. Il a plutôt exprimé sa fierté quant à la situation des droits de l’homme dans son pays, ajoutant que « les droits de l’homme sont mieux respectés en Libye qu’aux États-Unis ou dans tous les autres pays arabes ».
Malgré toutes ses dénégations, le doute n’est pas permis. Cette agitation médiatique quelque peu maladroite que Seif tente d’organiser autour de sa propre personne n’a qu’un seul but : apparaître comme le seul héritier et successeur naturel de son père ; mais, et pour son plus grand malheur, il n’est pas fils unique contrairement à certains qui se sont fait ou tentent de se faire un prénom, Bachar El Assad ou Gamal Moubarek (ici)...
Et si, coup du sort, Kadhafi, le père, en bon défenseur de la cause féministe dans le monde arabe, concoctait son dernier et plus grand coup d’éclat en préparant le terrain pour sa petite fille chérie Aïcha... Pauvre Seif !
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