• AgoraVox sur Twitter
  • RSS
  • Agoravox TV
  • Agoravox Mobile

Accueil du site > Actualités > International > Afrique-élections : la question électorale

Afrique-élections : la question électorale

L’actualité de ces derniers mois en Afrique reste dominée, du Libéria au Gabon en passant par le Burkina Faso, par les élections présidentielles. Si le cas du Libéria est singulier, en ce sens que les différents challengers n’avaient pas de passé en tant que têtes du pouvoir executif, il n’en demeure pas moins qu’à Libreville comme à Ouagadougou, il s’agissait de deux présidents au pouvoir qui ont remporté la mise, entraînant de facto l’ire de l’opposition.

A l’origine :

 

Avant l’avènement de la démocratie plurielle dans plusieurs pays africains, dans les années 1990, la question électorale était une préoccupation mineure pour les populations ; en effet, n’ayant qu’une valeur symbolique, sans enjeu véritable, l’élection était de pure forme et ressemblait beaucoup plus à des nominations qu’à une consultation électorale, au cours de laquelle on assiste à des confrontations d’idées, de programmes, de projets de société, avec, en ligne de mire, un arbitre : l’électeur.

 

Depuis l’instauration de la démocratie multipartiste, la question électorale est au centre de la vie politique, économique et sociale dans de nombreux pays. Si on considère un parti politique comme une association d’individus mus par un idéal de conquête de prise du pouvoir en utilisant les moyens démocratiques, on comprend aisément qu’on s’engage ainsi dans un combat d’idées dont la raison d’être n’est autre que l’émergence d’un vainqueur et d’un vaincu. À ce niveau, la question qu’on est en droit de se poser, c’est celle de savoir quel critère permet de désigner l’heureux élu.

La démocratie, comme le définit de manière éloquente Jean-Jacques Rousseau, nous renvoie à cette notion : « c’est le gouvernement de la majorité », c’est-à-dire celui qui, au terme d’une consultation électorale, rempile, en d’autres termes, a le maximum de suffrages exprimés en sa faveur... Une autre question nous vient à l’esprit : que devient la minorité qui a rejeté le programme du vainqueur ? Inéluctablement, elle est soumise à la dictature de la majorité... C’est ici que commencent les contestations des résultats électoraux, auxquelles on assiste un peu partout en Afrique, au lendemain des opérations électorales.

 

AU CŒUR DU PROBLÈME :

 

* Le concept Majorité - Opposition :

 

Les régimes en place en Afrique brillent par leur propension à consolider leur emprise sur la gestion des affaires de la cité, et à asseoir ainsi leur longévité au pouvoir... Ce n’est que chose normale, dans l’essence même de l’homme, que l’ego de conservation pousse toujours à chercher à être au plus haut et à s’y maintenir en utilisant tous les moyens dont il dispose. La méthode générale consiste, au sortir des élections, notamment législatives ou municipales, clefs de tout régime présidentiel ou parlementaire, à fédérer, autour du parti gagnant, certains autres partis moins représentatifs pour consolider l’emprise du vainqueur sur le pouvoir, et sa pérennité. Il se forme alors un agrégat de partis ou d’associations qui gravitent autour du parti au pouvoir, soutenant son action : c’est ce qu’on appelle la majorité présidentielle, qui, au fil du temps, s’étoffe et devient une formidable machine, difficile à ébranler. L’opposition devient alors ce qui ne partage pas la vision des gouvernants sur la gestion de la chose publique.

 

* À la base de la pyramide :

 

- La constitution :

 

Les constitutions de nombreux pays africains souffrent de leur maniabilité ; on les modifie au gré des gouvernants ; ainsi, le régime en place, grâce à sa mainmise sur le parlement, où il est majoritaire, fait d’elle ce qu’il veut ; plus besoin d’organiser un référendum pour la changer, une simple loi taillée sur mesure, et le tour est joué, par une simple saisine du gouvernement sur proposition du parlement.

 

À ce niveau, l’opposition doit se battre pour que la constitution soit forte, modifiable exclusivement par référendum, et uniquement dans le cas où il s’agit d’un problème de souveraineté nationale.

 

- Le mode du scrutin :

 

Tout se joue encore ici ; s’agit-il un scrutin à un tour ? à deux tours ? à la proportionnelle ? C’est au niveau du législateur, c’est-à-dire du parlement, de voter et d’entériner le mode du scrutin ; là, l’opposition doit peser de tout son poids pour que le mode du scrutin permette une saine émulation de toutes les forces politiques. Pas question d’attendre d’être à quelques mois de l’élection pour se plaindre du mode du scrutin... le faire à temps, pour amener le pouvoir en place à prendre en compte cette revendication. Un scrutin à un tour n’est favorable qu’au régime en place, qui peut facilement nouer des alliances pour étoffer sa majorité ; pour l’opposition, il est préférable de choisir le mode à deux tours, qui permet facilement aux vaincus du premier tour de nouer des alliances au second. Le malheur, c’est que la plupart des leaders s’endorment toute l’année, et ne se réveillent que lorsque les délais sont très courts pour toutes modifications sur le sujet.

 

- Le fichier électoral :

 

C’est généralement du ressort des administrations locales, sous la tutelle du ministère de l’intérieur ou de l’administration du territoire ; il doit être mis à jour pour coller à la réalité du flux humain, qui a une influence sur les élections. L’opposition, dont la mission traditionnelle est la contestation, doit veiller au grain, afin de garantir sa fiabilité. Elle doit se faire entendre, afin qu’au sein des administrations locales, des fonctionnaires des deux bords y soient commis, et travaillent de manière permanente à sa mise à jour. Le pouvoir en place est aux affaires et cherche à s’y maintenir par tous les moyens ; ceux qui n’y sont pas encore doivent doubler d’ingéniosité pour y parvenir.

 

- Le nomadisme électoral :

 

Le transfert des populations est fréquent en Afrique, en période électorale. Ainsi, il n’est pas rare de voir certaines localités augmenter ou diminuer leurs effectifs à l’approche d’une consultation électorale. Généralement, on vote pour un parent ou un proche, pour sauvegarder ses intérêts... De cette manière, les tripatouillages ont libre cours, puisqu’il est plus facile pour un candidat de soudoyer facilement les voix dans sa région d’origine.

 

Voilà, de manière non exhaustive, certains points qui rendent les élections sujets de contestation en Afrique.

 


Moyenne des avis sur cet article :  5/5   (1 vote)




Ajouter une réaction

Pour réagir, identifiez-vous avec votre login / mot de passe, en haut à droite de cette page

Si vous n'avez pas de login / mot de passe, vous devez vous inscrire ici.


FAIRE UN DON






Les thématiques de l'article


Palmarès