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Air Gabon : les raisons d’une liquidation

Le Conseil des ministres du vendredi 24 février a annoncé la liquidation de la compagnie de transport aérien gabonaise, Air Gabon, au profit d’une nouvelle, Air Gabon International, dont la Royal Air Maroc (RAM) détient 51% d’actions et l’Etat gabonais, 49%.

Chronique d’une privatisation qui s’est muée en liquidation :

Depuis plus d’une dizaine d’années, les compagnies de transport aérien n’étaient des transporteurs que de nom... Si certains ont mis la clef sous la porte (Air Afrique, Nigeria Airways), d’autres ne fonctionnaient que sous perfusion, maintenues en sursis par fierté nationale ; ainsi, que ce soit pour la Camair ou pour Air Gabon, le dernier soupir était attendu de tous ; celui d’Air Gabon a été expiré ce vendredi 24 février 2006, où le gouvernement gabonais, las de maintenir la compagnie en état de vie végétative, a pris ses responsabilités en la liquidant .

Depuis 1992, après le départ de Monsieur Mamadou Diop, actuel secrétaire général de la République gabonaise, de la direction de la compagnie, les multiples directeurs qui se sont succédés à sa tête n’ont pu trouver la situation idoine à donner à cette structure, pour qu’elle retrouve son rayonnement d’antan ; faut-il vous rappeler que la compagnie Air Gabon avait le monopole sur les vols domestiques, malgré la présence d’autres prestataires tels Air Service, Air Inter, et qu’elle se positionnait en leader sur les vols régionaux (Libreville-Douala-Lomé-Cotonou-Abidjan-Dakar) malgré la concurrence ardue de Camair et d’Air Afrique ? En concurrent direct d’Air France sur la desserte Libreville-Paris-Libreville ? D’une flotte estimée à huit avions dont un Boeing 747/200, un Boeing 767 et plusieurs Boeing 737, à ce jour, elle ne compte plus que deux avions.

Les liaisons africaines sont les suivantes :

· La côtière : Libreville/Bamako en passant par Douala, Lagos, Lomé, Cotonou, Abidjan et Dakar.

· L’axe Libreville/Johannesburg

Les dessertes européennes :

· Libreville/Paris/Rome

· Libreville/Londres

Celle d’Asie : Libreville/Dubaï

Avant l’annonce de la liquidation, toutes ces liaisons, en dehors de celles de Dubaï et Londres supprimées depuis juin 2004, se faisaient de manière approximative, par manque d’aéronef depuis le retrait du Boeing 747 qui assurait les vols longs courriers. L’Etat gabonais avait toujours cru pouvoir sauver cette société dont le poids de la dette extérieure l’asphyxiait depuis des lustres. Plusieurs voies ont été explorées : la compression du personnel, la suppression des dessertes peu rentables, la prise en charge du traitement salarial du personnel par le Trésor public... Mais rien de cela n’a apporté de solution... La faillite en question :

Sans vouloir être l’avocat après la mort, d’après Maixent Ndong Odzame, président du syndicat des agents de cette société : "Les pouvoirs publics sont responsables de sa faillite" ; selon lui : " l’Etat n’a pas fait tout ce qu’il pouvait pour la compagnie. Si son objectif avait été de nous maintenir en vie, les moyens ne lui auraient pas manqué. Nous avons été abandonnés" ; et de continuer : "Pendant cinq ou six mois, nous avons démontré qu’avec seulement trois avions opérationnels, nous pouvions faire tourner la compagnie, qu’elle était viable...".

Lorsqu’il y a eu libéralisation des espaces aériens, Air Gabon, par ses experts, était bien avertie ; alors qu’elle devait consolider son emprise sur les vols intérieurs, très bizarrement, elle a supprimé la majorité de ses dessertes domestiques, sans raisons apparentes, laissant ainsi le champ libre à ses concurrents...

Elle s’est investie par prestige sur les lignes très coûteuses et peu rentables (Libreville/Londres, Libreville/Dubaï, Libreville/Johannesburg...). Dans le fil du discours de ce président, invité dimanche 5 mars sur une chaîne de télévision gabonaise, un directeur général d’Air Gabon, Monsieur Gérôme Ngoua Bekalé, a vu juste lorsqu’il est arrivé aux commandes de cette compagnie en juin 2004 ; après sa prise de fonction, il a commandé un audit sur la rentabilité des dessertes de la compagnie ; dès qu’il en a reçu le résultat, immédiatement il a suspendu les liaisons Dubaï, Londres et Johannesburg ; mal lui en pris, puisque trois jours après, on lui a imposé l’ouverture de la ligne Johannesburg. Malgré cet état de choses, en un an, il est parvenu à des résultats, surmontant des problèmes d’ingérences extérieures dans sa gestion. .

Aujourd’hui, la dette de cette société est estimée à environ 35 milliards de francs CFA (53,4 millions d’euros) ; sa flotte vieillissante a contraint les dirigeants à louer à prix d’or des avions de remplacement ; ce qui n’a fait précipiter son agonie. En perfusion financière depuis avril 2005, c’est l’Etat, par le biais du Trésor public, qui assure le paiement des salaires du personnel, évalués à environ 39,5 millions d’euros. Ne pouvant plus répondre à cette sollicitation, le gouvernement, par la voix de son porte-parole, le ministre de la communication Ndemezo Obiang, vendredi 24 février, a annoncé sa liquidation pure et simple avec ses 1 100 salariés. Le cri de cœur de Monsieur Maixent Ndong Odzame :

Le président du syndicat des personnels de la compagnie Air Gabon (Sypag) lance un appel aux pouvoirs publics, au moment où débutent les négociations entre son syndicat et le comité de liquidation ; pour lui : "L’heure est grave et il faut tenir compte du caractère spécifique des agents d’Air Gabon, qui comprend notamment le personnel navigant technique" ; en effet, selon lui : "Si l’on prend le cas d’un pilote qui a passé 20 ans dans la boîte, ce dernier représente pour l’Etat près de trois cents millions de francs CFA correspondant à sa formation, à la validation de ses licences et à bien d’autres stages techniques..." ; l’Etat ne saurait mettre ce type de personne au chômage sans réfléchir plus d’une fois ; il continue, dans la ligne de ses complaintes, en affirmant que ’’des trois à quatre cents employés que devra compter la nouvelle compagnie, il ne s’agira pas exclusivement des agents d’Air Gabon, mais aussi de ceux que devront apporter les repreneurs, à savoir la RAM ; ce qui fait que les pouvoirs, du moins l’espère-t-il, ont dû insister auprès de ces derniers pour que priorité soit accordée au recrutement de ses camarades. Il regrette que son syndicat n’ait pas été mêlé aux négociations ayant abouti à la liquidation, ce qui aurait été pour eux une occasion de proposer leurs exigences. Ce que propose la Royal Air Maroc : La Royal Air Maroc (RAM), actuel repreneur de la compagnie Air Gabon, n’en est pas à sa première expérience dans la joint-venture, puisqu’elle a fait ses preuves avec Air Sénégal International... Elle propose, avant le démarrage de ses activités, de mettre à la disposition de la nouvelle entité deux avions pour les vols en direction de Paris, Johannesburg et pour la desserte côtière. En ce qui concerne le personnel, elle recrutera trois cents à quatre cents personnes ; actuellement, l’incertitude demeure sur le quota accordé à ceux venant de la défunte Air Gabon. Spéciales dernières :

Jeudi dernier, la direction d’Air Gabon a annoncé l’arrêt définitif de toutes ses liaisons sur le continent africain. Selon Brigitte Bikah, directrice de la communication : "Tous les vols africains de la compagnie sont définitivement arrêtés ; seuls les vols vers l’Europe (Paris) et les liaisons nationales de la compagnie vers Franceville, Oyem et Port Gentil sont maintenus avec des appareils et du personnel naviguant loués’’. Autre fait marquant, le comité de liquidation a annoncé lundi 6 mars que la situation du personnel sera soldée d’ici au 31 mars 2006. D’une manière objective, la liquidation de la compagnie Air Gabon, comme celle d’autres compagnies africaines pouvant intervenir à court ou moyen terme, résulte d’une conjonction de facteurs dont le plus significatif est la libération des espaces aériens qui a occasionné une forte concurrence ; s’il est admis que la gestion de ces compagnies comme biens de sociétés d’Etats en Afrique n’a pas toujours obéi à une certaine orthodoxie, il n’en demeure pas moins que les effectifs pléthoriques et des avantages exorbitants, dont ont régulièrement bénéficié les personnels et leurs familles, n’étaient pas pour arranger les choses ; n’a-t-on pas vu des personnes contracter des "mariages à condition", pour bénéficier des avantages de voyager librement et de vaquer à leurs affaires ?


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1 réactions à cet article    


  • Yaarg (---.---.110.97) 13 mars 2006 14:58

    Omar Bongo a dû encore s’en mettre plein les poches !

    Air Gabon ? Pour dire le bordel interne, certaines agence n’acceptaient que les espèces pour l’achat des billets (ni carte bancaire, ni chèque)...

    Bon débarras...

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