Algérie : La contre-révolution dans tous ses états

En quatre mois de soulèvement populaire, les Algériens ont réussi tant bien que mal à faire face à d’innombrables embûches parsemées le long de leur chemin vers une démocratie effective. Personne ne peut, aujourd’hui, nier le caractère pacifique de leur démarche, grâce auquel les hommes de l’ancien régime ont fini par craquer. Toutefois, il ne faut pas trop se réjouir, puisque de nouveaux maîtres[1] sont en phase de s’imposer par la menace, l’intimidation et la répression. La tentation totalitaire n’a jamais été aussi forte que sous les ordres de la gent militaro-policière actuellement en position de force. L’on assiste depuis déjà quelques semaines à des phénomènes qui soulèvent l’indignation de tous les observateurs neutres :
- Rejet systématique, sur fond d’autisme politique aigu, de toutes les feuilles de route émanant de la société civile ou des personnalités nationales.
- Blocage injustifié des routes menant vers la capitale du pays par des barrages de contrôle à l’occasion des traditionnelles manifestations du vendredi.
- Confiscation de tous les espaces symboliques de la contestation au niveau de la capitale (L’immeuble en construction connu sous la désignation « palais du peuple », Tunnel des facultés, périmètre de la Grande-Poste).
- Usage épisodique du gaz lacrymogène et de la matraque pour disperser les foules.
- Arrestations sélectives infligées à seulement certains hommes de l’ancien régime et non à tous.
- Non abandon des poursuites judiciaires engagées sous l’ancien régime contre des journalistes et des activistes politiques.
- Interdiction du port de l’étendard amazigh, depuis le 19 juin 2019, sur ordres du chef de l’Etat-major de l’armée. Dans ce sillage, des fouilles au corps sont effectuées en public à la recherche de ce symbole culturel. Plusieurs personnes ont été arrêtées, brutalisées et placées sous mandat de dépôt pour avoir simplement brandi ce drapeau.
- Multiplication des discours à caractère politique, prononcés dans des casernes et devant des militaires, et diffusés auprès des populations civiles par des médias lourds.
- Déploiement de brigades de trolls sur les réseaux sociaux pour parasiter le mouvement populaire et semer la zizanie dans les rangs des manifestants.
- Blocage de plusieurs sites d’information qui ont conservé leur liberté de ton à l’égard de l’actualité.
- Instrumentalisation de certaines chaînes de télévision et de stations de radio tant publiques que privées dans le but de manipuler l’opinion publique.
[1] L’accent circonflexe est très significatif ici.
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