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Accueil du site > Actualités > International > Amazonie brésilienne : Dossier Acre

Amazonie brésilienne : Dossier Acre

L'Amazonie est une mer de forêts couvrant un territoire plus vaste que l'Union européenne, qui abrite la plus grande biodiversité au monde et qui possède un des plus grands fleuves de la planète, mais c'est aussi une terre de convoitise, de conflits, et parfois de misère.

En mai dernier, dans l'état du Acre, en région amazonienne, une opération de la Police fédérale brésilienne arrêtait quinze personnes suspectées de frauder les appels d'offre et dévier des fonds publics. Parmi elles des hauts fonctionnaires du gouvernement étatique, des fonctionnaires de divers organismes, des magistrats et des chefs d'entreprises du bâtiment et des travaux publics. Pris dans la tourmente, le neveu du gouverneur de l'état lui-même a été arrêté [1].
Bien que consignés dans leur ville de résidence et privés du droit de reprendre leurs activités professionnelles, la Justice fédérale leur a concédé la remise en liberté provisoire quelques semaines plus tard [2].
À l'heure actuelle, l'affaire suit son cours dans le cadre d'une enquête judiciaire et le président de la Cour suprême brésilienne a même décrété la protection personnelle du juge chargé de l'instruction qui aurait déjà reçu des menaces [3].
 
Mais l'affaire rebondit fin novembre avec une déclaration sulfureuse du chargé de communication du gouvernement de l'état du Acre à l'encontre du coordinateur du CIMI régional (Conseil Indigéniste Missionnaire) [4], Lindomar Padilha, dans laquelle il rejetait l'accusation d'inaction et d'abandon portée par le CIMI en dénigrant l'organisation indigéniste et son coordinateur lui-même par des accusations graves et infondées.
Ce dernier a réagit sur son blog en affirmant :
"On ne peut se taire tandis que le gouvernement, par le biais de la financiarisation et la mercantilisation de la nature, des cultures et des peuples, permet la spoliation des territoires et parraine la concentration ainsi qu'une nouvelle accumulation "primitive" de capital." [5]
 
Cette prise de position véhémente a trouvé écho auprès d'un maître de conférence de l'Université fédérale du Acre qui a récemment lancé un livre issu de sa thèse de doctorat et justement intitulé : "Développement insoutenable de l'Amazonie occidentale" [6] dans lequel il dresse un portrait critique du modèle de développement mis en oeuvre dans l'état amazonien.
Dans un article en défense de l'organisation et de son coordinateur, le professeur Elder de Paula dénonce : "[...] une fine sintonie avec le bloc "ruraliste" [propriétaires terriens] et tous les autres ennemis des peuples indigènes" ainsi que "la nette intolérance et l'autoritarisme du gouvernement en poste dans l'état du Acre".
Et il enfonce le clou en déclarant : "[...] ce n'est pas au CIMI à donner des explications mais au gouvernement de l'État du Acre." en suggérant que ce dernier doit "rendre des comptes" et il cite "le système de corruption dénoncé par l'Opération G7 menée à bien par la Police fédérale".
En fin connaisseur de la situation de cet état qu'il a étudié en détails, il rajoute :
"Plus encore, le gouvernement étatique doit des explications sur l'octroi de terres et de territoires de cet état aux 'fazendeiros', aux exploitants forestiers et aux spéculateurs financiers qui opèrent les tristement célèbres marchés de crédits de carbone."
Le professeur Elder termine en dénonçant les exactions perpétrées contre des petits paysans "avec tous les raffinements utilisés au temps de la dictature militaire" ainsi que les "pressions constantes pour qu'ils quittent leurs territoires" [7].
 
Depuis plusieurs années, la question des peuples amérindiens apparaît régulièrement sur le devant de la scène, généralement avec une forte connotation défavorable aux indiens de la part de la presse grand public. Pourtant, pour qui milite dans des milieux proches de ces réalités le discours "officiel" sonne faux et on sent le poids de la pensée conservatrice qui n'a jamais cessé de dominer : les grands propriétaires terriens, les industriels, les multinationales et la finance, tous ayant partie liée pour l'exploitation des immenses richesses que recèlent le pays.
 
 
 
 
[4] CIMI : organisme lié à l'Église catholique qui agit au Brésil auprès des communautés amérindiennes depuis plus de 40 ans : http://www.cimi.org.br
 
 
 
 
Mots clés : Amazonie ; Brésil ; corruption ; mercantilisation de la nature ; marché de carbone ; populations amérindiennes.

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6 réactions à cet article    


  • Pepe de Bienvenida (alternatif) 12 décembre 2013 21:58

    Chronique d’une mort annoncée.


    • Lucas Matheron Lucas Matheron 13 décembre 2013 01:01
      Oui et non.
      Là tous se sont tus, ici des gens s’émeuvent, d’autres parlent, et les victimes connaissent bien ceux qui veulent les éliminer.
      Alors, peut-être, la chronique d’une guerre annoncée (?) ...

    • eau-du-robinet eau-du-robinet 13 décembre 2013 04:47

      Boa tarde Lucas,

      L’exploitation (destruction) de l’Amazonie est organisé par l’oligarchie industrielle et financière avec l’aval des hautes autorités brésiliennes.

      L’agence environnementale brésilienne (IBAMA) manque cruellement de moyens et du personnel pour luter efficacement contre l’exploitation (destruction) de l’Amazonie.

      Greenpeace affirme que l’élevage bovin est responsable à 80% de la destruction de la forêt amazonienne. source

      Avec la destruction de l’Amazonie on détruit également les peuples amérindiens et leur savoir sur les plantes ...

      Dans 100 ans l’Amazonie n’existera plus .... et à la place s’installera un grand désert !

      En 2005, une première grande sécheresse avait été qualifiée de « sécheresse du siècle », avant d’être détrônée, seulement cinq ans plus tard, par un épisode plus sévère encore.

      L’analyse de ces deux phénomènes exceptionnels, conduite par Simon Lewis et publiée en février 2011 dans la revue Science, avait montré qu’en cas de récidive de tels événements la forêt amazonienne pourrait ne plus jouer son rôle d’éponge à dioxyde de carbone (CO2) – elle absorbe et stocke plus d’un milliard de tonnes de CO2 chaque année –, mais qu’elle pourrait, au contraire, devenir émettrice de gaz à effet de serre.

      En Madagascar 90% de la foret à été déjà détruite.

      La corruption détruira pas seulement la forêt amazonienne dans son ensemble mais également le monde entier ! 


      • Lucas Matheron Lucas Matheron 16 décembre 2013 14:57

        Je ne suis pas entré dans les détails que vous rappelez très justement sur les origines du problème, qui sont les conservateurs (n’oublions pas les ruralistes), pour centrer mon article sur les voix qui s’élèvent contre cet état de faits.

        Plus que de dénoncer le problème de la déforestation qui reste mondialement sans grandes solutions car objet de toutes les convoitises, mon but est de faire savoir qu’il y a des gens qui s’insurgent, à l’image et à la suite de Chico Mendes, et font face au rouleau compresseur de la finance alliée aux intérêts hégémoniques des firmes mondiales (pharmaceutiques, cosmétiques, semencières, etc.) et aux grands propriétaires terriens.
        Cela dit, je suis d’accord sur le fait que c’est bien la cupidité de quelques-uns qui est en train de détruire la planète.

      • claude-michel claude-michel 16 décembre 2013 08:58

        (la question des peuples amérindiens apparaît régulièrement)....Faut dire....

        Amen-Ridiens.. !
        Ces peuples de toute façon ont bien moins de valeur par rapport a un arbre....Y a bien des mères qui vendent leur enfant pour faire de l’argent.. ?

        • Lucas Matheron Lucas Matheron 16 décembre 2013 14:40

          Oui, effectivement de nombreux parents vendent leurs enfants, un peu partout dans le monde, et pas nécessairement les Amérindiens

          .
          Économiquement (ou financièrement) parlant, un arbre vaut plus, aujourd’hui (et peut-être que ça l’a toujours été aux yeux d’un Européen moyen) qu’une peuplade de sauvages. Ce n’est pas pour autant que lesdits sauvages ont envie d’être vendus, encore moins d’être exterminés...

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