Au coeur de la Perse se trouve un tombeau
Et le Téléviseur fit son apparition au sein de ma Maison…
Ces Fêtes de Noël 1966 apportèrent au bambin que j'étais les premières “images artificielles” frappant mon imaginaire.
Afin que plus tard, on me rappela encore le premier “choc rétinien” que fut “Les Perses”. (Téléfilm de J. Prat, d'après la tragédie grecque éponyme d'Eschyle, diffusé par l'ORTF).
Et pouvoir aujourd'hui le revoir en vidéo, j'en suis vraiment intimement bouleversé. En souvenir donc de cette première télé-vision, je souhaite rendre un hommage admiratif, à ce pays antique qui a connu dans son histoire, puissance, beauté, mais aussi douleur… La Perse.
Située à la croisée des chemins et des civilisations de l'Orient, la Perse ancienne est de culture, la plus proche de l'occident : les iraniens appartiennent en effet au groupe dit des aryens et parlent une langue aryenne, le persan de la famille des langues indo-européennes, comme le français, l'anglais, l'allemand. Et si nous l'avons un peu oublié aujourd'hui, ce pays au cours de sa longue histoire, nous a apporté énormément dans de nombreux et divers domaines…
Certes, nous connaissons ses tapis, son pétrole, ses ayatollahs, son uranium… mais pendant des siècles et des siècles la Perse incarna une grande zone de rencontre entre l'Orient et l'Occident. Des caravanes suivant la route de la soie et des épices… des métaux et des pierres précieuses.
De tout cela, les marchands avaient leur quartier général en Perse. Les occidentaux ne doivent plus ignorer son rôle précurseur sur des sujets comme la politique et l'administration. Car elle, la première, prouva au monde antique la possibilité de gouverner de grands territoires, d'administrer un Empire.
La religion régulièrement, lui assurait une suprématie morale sur ses voisins. Le zoroastrisme de Zoroastre, VI ème siècle av JC, se trouvait dans l'antiquité être une croyance si vraie et si noble, que l'on parlait déjà de résurrection des corps, de vie surnaturelle, de récompenses et de châtiments s'exerçant sur notre âme.
Toute cette ardeur religieuse s'exprime dans un livre sacré connu sous le nom d'Avesta, avec Ormuzd créateur de toute vie, symbolisé par la lumière céleste. La Perse connaîtra d'autres grands mouvements religieux. Notamment, durant le 3ème siècle ap. J.C., le manichéisme que Mani inspirera .
Elle est un des berceaux de l'humanité. Et loin d'être une terre sèche et abandonnée, il est évident qu'elle recouvre encore aujourd'hui, de nombreux trésors pour les archéologues.
Des découvertes de villes remontant à plusieurs millénaires, aux merveilleux objets mis à jour, tous sont là pour nous prouver si nécessaire, de l'importance des cultures successives qui ont marqué cette région depuis la plus lointaine antiquité.
L'invasion des aryens, environ un millénaire av. notre ère marquera profondément ce territoire, puisqu'il se nomme encore aujourd'hui Iran, ce qui veut dire "Pays des aryens".
Plus tard et ce malgré de nombreuses destructions et brutalité de hordes et de puissances étrangères :
- Celle d'Alexandre le Grand, au IVe siècle av JC, venant de Macédoine envahir le vaste Empire.
- Celle de Rome et des guerres intermittentes, puis les invasions arabes, animés par leur foi nouvelle.
- Celle de la terrible avalanche de mongols au XIIIe s. avec pour chef le redoutable Gengis Khan.
… La Perse sauvegardera son invincibilité, surmontant courageusement tous les périls et les assauts ennemis.
Ce sera le choc successif contre l'Empire Russe et Britannique, au XIXe siècle qui causera au sein du pays, le début d'une longue crise morale et culturelle.
Sous la dynastie des Qadjars, 1734-1925, l'occident connaîtra de forts progrès techno-industriels permettant par exemple, l'accélération de l'extraction des matières premières.
Par contraste, la Perse semblait, elle, rester immobile.
Reza Pahlavi, le dernier Chah d'Iran, succéda donc en 1941, à son père, qui avait fondé en 1925 la dynastie des Pahlavi. Son idéal restait de saisir l'esprit de ce nouvel âge d'Or que promettaient sciences, industries et économies occidentales.
Il lui fallait pareillement révolutionner l'Iran. Qu'elle rattrape son retard. Malheureusement et très vite, le mariage entre ce vieil Orient et ce moderne Occident ne fut potentiellement pas exemplaire.
Certes, grâce à une aide "bienveillante" des États-Unis, le pays connaissait une production en pétrole abondante et s'enrichissait. Mais l'ouverture rapide et forcenée au modernisme "made in USA" provoqua par contrecoup des oppositions dans la population iranienne. Commença alors peu à peu et à travers tout le pays, un profond repli identitaire, car le peuple devait se taire et subir l'ingérence de mœurs étrangères réservées à des privilégiés.
En 1963, on assista à la première grande vague d'émeutes, exprimant tous les mécontentements face à la répression policière et les réformes toujours plus draconiennes.
Déjà à leur tête, l'Imam Khomeiny fut contraint à l'exil en Irak. Le Roi, lui, rêvait toujours de faire de l'Iran le Japon du moyen-Orient. Ainsi, en 1967, lors de son propre couronnement comme Empereur, Mohammad Reza Chah Pahlavi déclarait : "Je veux laisser à mon fils une nation jeune, évoluée, fière, tout à fait moderne, parfaitement stable et de plus orientée vers l'avenir et la coopération avec les peuples du monde entier".
Ce positivisme, entièrement tournée sur la voie du progrès buttait cependant au sein du pays contre l'emprise majeure du courant religieux et des mollahs. L'antagonisme ne fit que croître jusqu'en 1978, année où les militaires entrèrent dans la danse. Le Général Azhari, nommé chef du gouvernement entra en force sur l'avant-scène politique. Mais tout s'aggrava encore… car la fragilité du régime était dorénavant évidente. Début 1979, L'Imam, réfugié depuis en France, invitait les fidèles, à l'aide de cassettes enregistrées et régulièrement envoyées de France en Iran, à renverser le despote personnellement visé "Shah, nous te tuerons !"…
Sous la pression montante, le Chah fut contraint finalement à s'enfuir en Egypte où il décéda peu après.
Pour des raisons autant religieuses que patriotiques, c'était en vérité la grande et ancestrale culture persane qui triomphait, en se vengeant de l'avoir bafouée, négligée et humiliée.
Des conquêtes et invasions d'autrefois, seule la religion musulmane restait. La société des Perses avait choisi cependant de suivre une branche autre que le sunnisme en s'y opposant très tôt en pratiquant le chiisme. Les chiites refusent de reconnaître la légitimité des quatre califes qui selon les sunnites avaient hérités du manteau de Mahomet.
La succession au Califat, selon eux, doit revenir aux descendants d'Ali, gendre du Prophète. Ils tiennent aussi que le fils d'Ali avait épousé une fille du Roi de Perse, déposé par le conquérant arabe... La religion a toujours été au fondement même de l'Union de la population persane, hier comme aujourd'hui. Le Peuple au lendemain de la chute du Chah rêvait d'une Révolution Humaniste. Ce grand rassemblement exceptionnel et consensuel devait permettre une ouverture vers plus de démocratie, une vie sociale en harmonie avec les sources d'un Islam enfin reconnu… Espoirs vite fanés !
La République islamique du Printemps 1979, deviendra rapidement une tyrannie religieuse. Impopulaire dans l'ensemble du pays, cette oligarchie religieuse se maintiendra au pouvoir par la terreur et le fanatisme et cela jusqu'à nos jours grâce à l'encadrement du tissu social par les membres du clergé. Et de constater avec amertume, que par ignorance et suffisance, l'Occident durant des décennies, passa sous silence (toujours pour défendre ses intérêts) toutes ces violences criminelles. Son orgueil démesuré dans la région, ne faisait que détruire les forces culturelles authentiques et actions démocratiques naissantes.
Aujourd'hui le monde a peur. Après l'intransigeante monarchie constitutionnelle de Reza Pahlavi, après la guerre interminable Iran-Irak, les deux guerres d'Irak, les menaces sur le pétrole iranien continuent de grandir. Mais pendant que les appels à la modération se multiplient, Etats-Unis, Russie, Chine… on voit l'équilibre des forces vaciller autour de l'Iran et la paix mondiale menacée. Les spéculateurs sur l'or noir se préparent d'ores et déjà à jouer sur les pénuries de demain. Oui, le temps où les hydrocarbures coulaient généreusement est bien révolu. La course vers la possession du reste de l'énergie fossile va durcir le paysage. De tels enjeux vont se transformer en une redoutable arme de pression pour les pays du Golfe. Aussi, Israël devient plus isolée et se sait déjà proprement menacée. En fait, l'importance accordée à son existence changera et passera en arrière plan des préoccupations occidentales, à mesure de l'évolution des luttes entre grandes puissances pour l'exploitation des dernières réserves d'énergies fossiles, sans oublier les fortes tensions qui risquent de surgir entre ces derniers pays producteurs… qui exigeraient de nouvelles conditions internationales sur la protection de leurs derniers gisements. Forcées dans leurs intérêts vitaux, les grandes puissances ne resteraient pas impuissantes à cette nouvelle menace...
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