En votant, à la majorité linguistique, la mise à l’agenda du projet de loi sur la scission de l’arrondissement Bruxelles-Hal-Vilvorde (BHV), les Flamands, CD&V et Vlaams Belang en tête, ont réactivé toutes les tensions communautaires. Le gouvernement tente vaille que vaille de faire front.
C’est vers deux heures du matin vendredi, après une séance parlementaire particulièrement agitée, qu’une motion introduite par le CD&V, parti démocrate chrétien du Premier ministre, et les fascistes du Vlaams Belang a permis le vote, Flamands contre Francophones, de la mise à l’agenda de la Chambre du projet de loi sur la scission de BHV. Et ce, au mépris de tous les accords pris par la majorité lors de la négociation qui avait permis, en mars dernier, de boucler le « premier paquet » des réformes institutionnelles – en ce compris la recherche d’une solution négociée pour BHV pour le 15 juillet – et, par conséquent, l’avènement du gouvernement Leterme Ier. Ce pacte ayant été rompu, à l’initiative du parti du Premier ministre qui plus est, les Francophones remettent logiquement en cause l’accord relatif à ce premier paquet, qu’ils avaient concédé pour aider à la mise en place du gouvernement.
Un gouvernement en sursis
Aussitôt le vote flamand acquis, les Francophones ont riposté, comme prévu, en déposant une pile d’amendements et en activant, ce vendredi matin, une nouvelle procédure en conflit d’intérêt. Celle-ci aura pour effet de suspendre la procédure pendant 20 jours, permettant ainsi à Yves Leterme de parvenir au 15 juillet sans craindre un nouveau coup de force – en tout cas sur ce sujet-là. Cela dit, M. Leterme n’a pas fait grand-chose pour éviter de se retrouver dans cette situation délicate. Depuis les élections du 10 juin 2007, on sait que BHV sera la pierre d’achoppement entre les deux principales communautés linguistiques du pays. Or, bien qu’il soit au cœur des négociations depuis cette date, M. Leterme n’a jamais réellement tenté de trouver une solution négociée à cet épineux problème, pas davantage qu’il n’a lui-même proposé de scénario permettant d’initier une éventuelle négociation. Parviendra-t-il à réaliser en deux mois ce qu’il a échoué à faire en 300 jours ? On voit mal comment ce Premier ministre sans autorité ni charisme, trahi par son propre parti, pourrait accomplir un tel exploit. On peut donc spéculer sur une chute du gouvernement dès le 16 juillet. Ce que ne manquent pas de faire les états-majors des partis, qui affûtent déjà leur rhétorique électorale.
La boîte de Pandore
Même si chacun stigmatise, avec raison, le caractère inopportun d’un retour de BHV au premier plan alors que l’on peine à mettre en place une politique socio-économique répondant aux difficultés de la population, il faut bien se rendre compte que l’enjeu sous-tendu par BHV est capital pour l’avenir du pays. Pour les Flamands, il s’agit, comme nous l’écrivions dans nos éditions du 2 mai, d’anticiper sur une séparation de la Belgique ou la mise en place d’une confédération, en fixant la frontière d’un éventuel futur Etat. On mesure tout ce que cela peut avoir de symbolique pour des partis autonomistes aussi influents que la NVA, la Liste De Decker et le Vlaams Belang. Face à ce « front » séparatiste, les jeunes loups du CD&V sont contraints de s’aligner s’ils veulent rester la première force politique dans le Nord. Quant aux Francophones, qui encaissent gifle sur gifle, ils ont maintenant bien compris que s’ils concèdent quoi que ce soit sur cette question, ils ouvrent la porte à tous les diktats futurs de la part des Flamands. Car si l’arrondissement électoral BHV est scindé (ce qui est loin d’être acquis même en cas de vote parlementaire, compte tenu du parcours constitutionnel à suivre par une telle loi), l’arrondissement judiciaire suivra et la boîte de Pandore sera ensuite largement ouverte. En cela, la situation actuelle renforce la position des Francophones : ouvertement bafoués par le vote hégémoniste flamand, ils peuvent parfaitement justifier par cette provocation la radicalisation de leurs positions dans la négociation communautaire. Et en prévision des rudes batailles qui s’annoncent, on peut penser que si à quelque chose malheur est bon, les Francophones y puisent une légitimation de leur combat qui leur vaudra sans doute le soutien du Conseil de l’Europe sur la protection des minorités nationales. C’est mieux que rien !
La scission en régions toujours plus petites va déboucher sur une intensification de la lutte concurrentielle entre les petits États.
On assiste aujourd’hui, tant en Belgique qu’en Europe, à une course à mort afin d’attirer les entreprises et les gens bien nantis en réduisant (voir même en supprimant ) l’impôt sur les sociétés et sur les fortunes. Une autre manière consiste à réduire les droits de succession.
Outre la division au sein du mouvement ouvrier, la stratégie de la Warande sert donc à libérer le capital de la région la plus riche de la solidarité avec les régions à la traîne. La même stratégie est actuellement suivie sur le plan européen par les fractions les plus fortes de la bourgeoisie, surtout dans les régions les plus riches.
Elles sont organisées dans un réseau qui s’emploie en faveur d’une « Europe des Régions » tendant à faire reconnaître des régions ethniquement homogènes comme régions officielles au sein de l’Union européenne. Pour ce faire, elles bénéficient du soutien de l’aile droite de la bourgeoisie allemande et, entre autres, d’Otto de Habsbourg, que l’on trouve à la tête du fameux « groupe de Locarno ». La Warande est l’homologue flamand de ce groupe1.
Pour une partie du grand capital, le nationalisme n’est qu’un moyen, via le démantèlement des grands États européens existants, d’encore renforcer l’emprise des multinationales sur la société et de saper les mécanismes de solidarité entre régions riches et pauvres de l’Europe. Ainsi, il existe déjà des amorces de collaboration entre la riche Italie du Nord de la Lega Nord, la Bavière et le Bade-Wurtemberg, en Allemagne, et l’Autriche. Et ce, par-dessus les frontières nationales." (Lerouge)
L’Union Européenne joue un jeu qui l’arrange : émietter pour mieux contrôler. Rien de neuf depuis la fameuse phrase de Machiavel qui préconisait de diviser pour mieux régner. Et favoriser de la sorte l’épanouissement de l’idéologie néo-libérale si chère aux pontes de Bruxelles...
Seul hic : les Etats-nations sont bien plus solides que ne l’auraient cru les instances Européennes !
Ca créé un précédent fâcheux. Et si demain tous les pays voulaient se débarasser de leurs réhions pauvres ? Par exemple, si ici en France, on voulait se débarasser de la Lorraine, du Nord-Pas-de-Calais et de la Corse ? On remarque quand même que, si actuellement la Wallonie est économiquement à la traine par rapport à la Flandre, il n’en a pas toujours été ainsi, et que les Flamands ont par le passé eu toutes les raisons de se féliciter que leur sort soit lié à celui des Wallons, quand cétait eux qui faisaient fonctionner l’économie nationale. Ingratitude et manque de coeur... Ca va souvent de paire, j’ai l’impression...
Dans l’Union Européenne, les frontières des Etats membres sont intangibles. A partir du moment où un Etat devient membre de l’UE, il devient totalement impossible de changer quoique ce soit au frontières de cet Etat. Surtout si c’est dans l’intention de créer un nouvel Etat.
Donc cette histoire de Clochemerle restera ce qu’elle est : une histoire de Clochemerle.
Merci Zen, votre commentaire traduit parfaitement ma position.
Je suis personnellement pour la solidarité des régions au sein des états, et je suis farouchement attaché a la force d’un gouvernement capable de mener a bien les politiques qu’ils sont chargés de développer.
En divisant, les forces de ces gouvernements, (( face a des multinationales que les "institutions" de l’Europe favorisent,)) sont dériisoires. le pouvoir n’est plus exercé dans l’interêt des pays, mais des groupes économiques. Ceci me parait intolerables.
Ne nous y trompons pas, l’Angleterre, l’espagne, l’italie et l’allemagne subissent également des pressions.
En France, cela ne semble pas encore être le cas, peut-être que parce que le gouvernement est déjà tout acquis au pouvoir économique ???