Centrafrique : La France, gendarme malgré elle ?
Après le Mali, c’est donc en République Centrafricaine que l’armée française est au point d’intervenir pour tenter de mettre fin à une situation chaotique, qui risque d’échapper à tout contrôle. Les nouvelles autorités du pays, au pouvoir depuis mars dernier, après avoir renversé le régime de François Bozizé, ont perdu tout contrôle sur leurs troupes. Le Président, Michel Djotodia, a même été tenté de « pactiser avec le diable » en évoquant des contacts avec le seigneur de guerre ougandais Joseph Kony. C’est que la situation est vraiment désespérée dans ce pays où des affrontements entre populations chrétiennes et musulmanes font craindre le spectre d’un génocide, selon Laurent Fabius.

Il faut bien reconnaître que la France est prise au piège. Elle disposait déjà d’un contingent fort de 400 hommes chargés d’assurer la sécurité de l’aéroport de Bangui. Elle n’a pas voulu s’impliquer dans les combats pour empêcher la chute du Président Bozizé qui pourtant avait appelé Paris à l’aide. L’homme régnait sur le pays depuis dix ans, avec un bilan catastrophique, ce qui rendait tout soutien français inapproprié. Mais une fois les nouveaux maîtres aux commandes du pays, la France se retrouve dans l’impossibilité de se retirer et d’abandonner un pays en proie aux massacres interconfessionnels.
Nul ne sait ce qu’il adviendra de l’intervention française, mais il faut bien admettre que n’importe quelle grande puissance, confrontée à une situation comme celle-là, serait bien obligée de rester sur place. Paris a toutefois pris ses précautions en sollicitant un vote du Conseil de sécurité de l’ONU et en organisant un sommet sur la sécurité à l’intention d’une quarantaine de chefs d’Etat africains.
Se pose alors la question de savoir si la France est vraiment bien inspirée en multipliant des interventions militaires en Afrique, au-delà des cas du Mali et de la Centrafrique. La polémique sur la « Françafrique » peut enfler à tout moment. François Hollande avait prévenu durant la campagne que la France n’avait plus vocation à jouer au gendarme de l’Afrique. Un an et demi plus tard, la promesse devient difficile à tenir.
On ne pouvait pas laisser les djihadistes s’emparer du pouvoir à Bamako. On ne peut pas non plus se retirer d’un pays à feu et à sang, la Centrafrique.
Reste qu’à force d’être sollicité, François Hollande pourrait prendre goût à l’« aventure » et initier des interventions motivées, non pas par l’urgence de la situation, mais bien par des intérêts stratégiques.
En effet, au moment où de nouvelles puissances (Etats-Unis, Chine, Brésil, Inde,…Afrique du Sud) tentent de prendre solidement pied dans une Afrique en pleine croissance, pourquoi la France serait-elle en reste ? Elle a une bonne expertise du terrain, elle est sollicitée et surtout, en tant que puissance militaire, elle a besoin de renouer des alliances stratégiques avec des pays comme la Centrafrique dont le positionnement géographique n’est pas sans intérêt.
Elle prévoyait de se retirer, elle n’arrête pas d’être sollicitée. Elle va y prendre goût et, à nouveau, jouer au gendarme. Malgré elle.
Boniface MUSAVULI
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