Chasser le dragon en Afghanistan
Le gouvernement Afghan vient d’interdire, du moins officiellement, depuis le mai 2009, l’importation de « précurseur chimique » utilisé pour la transformation de l’opium en héroïne et met enfin en œuvre, par cette action, une des parties de la résolution 1817 du Conseil de sécurité des Nations Unies, qui vient de proroger son intervention en Afghanistan jusqu’en mars 2010.
Cette décision vient d’ailleurs d’être saluée par la France.
La législation en matière de contrôle des précurseurs
En droit international, l’article 12 de
. l’obligation pour les opérateurs en chimie de réunir une documentation, de constituer des archives et de procéder à un étiquetage,
. l’obtention d’une licence pour les produits les plus sensibles et d’un enregistrement pour les opérateurs,
. la coopération entre les autorités compétentes et les opérateurs (déclaration de soupçons),
. la délivrance d’autorisations d’exportation,
. une coopération administrative entre États membres,
"Nous avons confirmé notre soutien à l’Administration transitoire du président Karzaï. Nous avons réaffirmé que le processus de Bonn devait être mené à son terme, dans la lettre et dans l’esprit. Nous demeurons préoccupés par la sécurité intérieure. Pour lutter contre le trafic de drogue en provenance d’Afghanistan, nous soutenons la pleine mise en oeuvre de la stratégie nationale afghane de lutte contre la drogue et le " Pacte de Paris " proposé le 22 mai par les Nations Unies lors de la conférence sur les routes de la drogue."
De vastes opérations mises en route depuis des années :
L’opération Topaz, lancée en 2001, est un vaste programme international portant sur le traçage des envois internationaux d’anhydride acétique, produit chimique essentiel, notamment pour la fabrication illicite d’héroïne. Son objectif comprend des activités de détection et de répression devant permettre d’intercepter des envois en contrebande de ce produit et de procéder à des enquêtes pertinentes, ainsi que de réaliser des saisies dans des entrepôts illicites ou des laboratoires clandestins pour remonter jusqu’à la source de la substance détournée.
Le Projet "Prism" a été lancé en 2002 pour prévenir le détournement des principaux précurseurs utilisés dans la fabrication de stimulants de type amphétamine. En 2006, les Opérations "Purple" et "Topaz" ont été fusionnées pour constituer le Projet "Cohesion", initiative d’envergure mondiale visant à combattre le détournement des précurseurs chimiques utilisés dans la fabrication d’héroïne et de cocaïne, en offrant une structure pouvant servir de base à des opérations régionales limitées dans le temps. Mais, Piotr Gontcharov, dans Ria Novosti en septembre 2006, nous décrit une tout autre réalité sur les caravanes de la drogue :
Les "caravanes" existent, seulement il ne s’agit pas de la drogue, mais de ses précurseurs. Le précurseur est un réactif utilisé dans la fabrication d’un produit chimique toxique. Pour transformer une tonne d’opium brut en héroïne, il faut, selon les experts, 2 à 6 tonnes d’anhydride acétique.
Sur les 4.000 tonnes d’opium brut, l’Afghanistan a importé l’an dernier plus de 10.000 tonnes d’anhydride acétique, a précisé M. Costa. Une vraie "caravane", car il faut 500 camions de 20 tonnes pour transporter cette quantité d’agents chimiques.
L’anhydride acétique n’est pas d’origine afghane. Aujourd’hui, selon les experts, cette substance chimique n’est fabriquée qu’en Chine, en Inde et en Russie. Reste à savoir comment ces "caravanes" arrivent à passer inaperçues dans un Afghanistan à l’infrastructure routière sous-développée et dans les pays voisins.
Les problèmes des précurseurs ne semblent donc toujours pas réglés, malgré les nombreuses opérations mises en place depuis 2001.
Début mai 2009, toujours dans Ria Novosti, on pouvait lire : "Les informations sur les pays fournissant à l’Afghanistan l’anhydride acétique (précurseur), utilisé dans la production de l’héroïne seront rendues publiques fin mai, a annoncé jeudi à RIA Novosti Tatiana Dmitrieva, académicienne. Auparavant on avait appris qu’en automne 2008,
Ces déclarations ont été suivies au mois d’août 2009 par une annonce des Etats-Unis qui déclarent, selon Reuters : " - Les Etats-Unis ont dressé une liste noire d’une cinquantaine de trafiquants de drogue afghans qui auraient des liens avec les taliban, avec ordre de les capturer morts ou vifs, rapporte lundi le New York Times citant un rapport du Congrès qui sera rendu public cette semaine. Le Pentagone a décidé de réserver aux barons afghans de la drogue qui sont complices des islamistes le même traitement que celui qui frappe les dirigeants insurgés, c’est-à-dire qu’ils pourront être abattus à tout moment, ont déclaré à la commission des Affaires étrangères du Sénat deux généraux de l’US Army servant en Afghanistan."
Pourtant, la réalité est tout autre comme on peut le voir dans cette vidéo.
"D’après deux généraux américains déployés en Afghanistan, cités dans le rapport sans être identifiés, les gros trafiquants ayant des liens démontrés avec l’insurrection figurant sur la "liste jointe des cibles prioritaires" ont le même statut que les meneurs de l’insurrection et peuvent être arrêtés ou tués à tout moment.
"Nous avons une liste de 367 cibles à capturer ou tuer, dont 50 cibles qui font le lien entre drogue et insurrection", a dit l’un des généraux aux membres de la commission."
La belle affaire !!! Des Karzai sur le peloton d’exécution ? L’impunité au vu et su de tout le monde...surtout de l’OICS :
"La production d’héroïne a battu tous les records en Afghanistan en 2007 malgré les tentatives de la communauté internationale pour enrayer ce fléau, s’alarme l’Organe international de contrôle des stupéfiants (OICS) dans son rapport annuel publiable mercredi.
L’Afghanistan a produit une "quantité exceptionnelle" de 8.200 tonnes d’opium l’an passé, soit 34% de plus qu’en 2006, et approvisionne désormais le marché mondial des opiacés à hauteur de 93%, selon ce rapport."
L’éradication du trafic d’opium devient-il maintenant un priorité pour les militaires en Afghanistan, du moins sur le plan de la communication ? Car pour Mc Chrystal, l’ISAF et l’ANA vont devoir "Chasser le Dragon" ensemble...avec des méthodes de coaching et de management à la Sun Tzu sorties tout droit des écoles de commerces :
Il demande aussi à ses hommes de traiter les soldats afghans, entraînés et équipés par les troupes internationales, en égaux.
Les prix de l’héroïne :
Pour produire un kilo d’héroïne, dix kilos d’opium sont nécessaires.
Prix de 10 kilos d’opium en Afghanistan : de 1 000 à 1 400 dollars (rendement par hectare : de 35 à 70 kilos).
Prix d’un kilo d’héroïne dans le Badakhshan, à plus de 80 % de pureté : 2 000 dollars (soit 1 600 euros).
Prix à Kaboul : 4 000 dollars.
Prix au Pakistan : de 4 000 à 5 000 dollars au minimum (la pureté a tendance ensuite à diminuer, la drogue étant sans cesse recoupée par les intermédiaires).
Prix en Iran : de 6 000 à 8 000 dollars
Prix à Paris : 150 000 euros.
Etant donné que l’héroïne est coupée avec plusieurs additifs (talc, farine, sucre glace), un kilo à plus de 80 % de pureté peut donner plus de quinze kilos lors des transactions au détail. Ce qui signifie que le kilo « pur » à 150 000 euros peut engendrer en théorie des ventes totales estimées à 1 800 000 euros. La plus-value théorique est donc de 1 à 1 125 : de 1 600 euros, le prix de départ, à 1 800 000 euros. Aucun autre produit ne permet une telle plus-value.
Je profite de cet article pour souligner le courage et l’abnégation de tous ces reporters de terrain qui risquent le plus souvent bien plus qu’une place de salarié et une carrière. Sans leur travail et la mise en ligne des informations par les médias classiques, les blogueur alternatifs comme moi n’auraient pas toutes cette info. Encore merci.
Sources données avec les liens dans l’article et autres documents à consulter :
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