Cheney, les adieux de la danseuse
L’administration Bush bat aux USA des records d’impopularité. Parmi ceux qu’on critique, il n’y en a pas de plus honni par les médias et la population que Dick Cheney. Dick a-t-il encore quelqu’un qui l’aime ? Jusqu’à la mi-mars, il y avait Halliburton, mais le destin sépare ceux qui s’aiment, n’est-ce pas ?
Halliburton, cette société américaine dont le vice-président Dick Cheney a conduit les destinées - avant de prendre en main celle des USA, avec les résultats que l’on sait ! - n’a eu, elle, qu’à se louer de ses services. La sous-traitance de tout ce que l’on pouvait normalement sous-traiter de la guerre en Irak et de tout ce qu’on a pu y ajouter a procuré à Halliburton entre 20 et 50 milliards de dollars de contrats. Le plus gros achat de services de l’Histoire. Dick a bien entretenu sa danseuse.
Vous me direz qu’il y a une marge, entre 20 et 50 milliards, mais tout n’est pas clair dans cette batterie de transactions, dont la plus juteuse à elle seule seule valait 16 milliards. Tout ce qu’on sait avec certitude, c’est que Halliburton y a gagné et que, sauf verdict bien différent de l’Histoire, les USA, l’Irak et la civilisation occidentale y ont tous perdu.
Ce qui rend Halliburton assez antipathique. Antipathique même aux USA, de sorte que l’ingrate société se prépare à quitter le nid avant que son souteneur soit sans emploi, après les élections présidentielles de novembre 2008, et à filer au plus vite vers d’autres cieux. Halliburton part pour Dubaï.
Ça presse. La date d’échéance, c’est novembre 2008. Disons qu’elle peut s’accorder un sursis, jusqu’à la prise formelle du pouvoir par le prochain président en janvier 2009 et l’éviction plus ou moins brutale de Cheney, mais ce serait imprudent de trop attendre. Les maîtresses royales quittent la Cour avant l’aube, et celle de feu Sa Majesté Cheney quittera sans doute la cour de Washington de nuit, avec une toute petite sacoche. Ne pleurez pas, on peut mettre beaucoup d’argent virtuel dans une petite sacoche.
Je vous prévenais, il y a plus d’un an, quand Mittal pourchassait Arcelor, que l’on était à tester le climat et les aménagements dans les colonies, pour un vaste exode des corporations trillionnaires hors des USA et même de l’Occident. Une grande migration des prédateurs
C’est Halliburton qui prend la tête du vol. Elle sent - et pour cause ! - le vent de l’hiver plus vite que les autres, mais tous les autres rapaces vont suivre comme des oies, en formation V serrée. Le temps est venu.
Qui vient confirmer ? Le professeur Allahjji de l’université de l’Ohio, bien connu pour son opposition au concept de l’indépendance énergétique des pays occidentaux - et qu’on ne peut accuser de ne pas connaître les pays du Golfe - annonce déjà, dans le New York Times du 13 mars 2007, qu’il n’y a aucune raison pour que TOUTES les compagnies qui font dans le pétrole n’aillent pas s’installer à Dubaï ou dans sa banlieue.
Allez hop ! C’est parti. On va pouvoir gérer le fric au soleil, à l’abri des questions ennuyeuses, dans un pays où l’on bâtit les plus hauts et les plus luxueux buildings du monde, où il n’y a pas de démocratie, pas de manifestants, rien que la sécurité absolue de la richesse acquise au prix d’un dur labeur.
Halliburton partie, le fric à l’abri, il restera bien sûr à mettre aussi à couvert les principaux artisans de cette extraordinaire création de richesse qu’a été l’invasion de l’Irak. Il est écrit dans le ciel - Maktüb, maintenant qu’on va parler arabe entre copains - que certains fauteurs de trouble vont vouloir demander des comptes à Cheney et à ses comparses. Est-ce qu’on n’a pas fait une loi contre le massacre des innocents ? À Nuremberg.... ?
Quand, comme le dit si savoureusement la traditionnelle expression américaine, toute cette matière fécale va arriver de plein fouet dans le proverbial éventail, quelle sera la réponse des accusés ? La première, bien sûr, le silence. Mais si ça se corse ? Alors, on jouera la Défense Pinochet, un giuco pianissimo, la meilleure stratégie quand on a les noirs, qu’on joue contre la justice et que c’est la vindicte populaire qui ouvre avec fracas.
Normalement, la Défense Pinochet devrait être suffisante pour que les bourreaux du Golfe meurent tranquilles dans leur lit, mais qui sait ? Le monde change bien vite... Supposons que, parmi les fauteurs de troubles, il y ait quelques-uns de ces milliers de GI et marines dont on vient de faire la preuve qu’on les avait mal soignés au retour du front ? Quelques-uns de ces dizaines de milliers qui en sont revenus avec des troubles psychologiques graves ? Sans parler de ces emmerdeurs d’étrangers qui restent accrochés à la convention de Genève et autres foutaises qui ne devraient pas concerner l’Amérique...
Si les exigences byzantines de la politique américaine exigeaient un procès sérieux aux USA ou une extradition, ne serait-il pas prudent pour eux que les accusés soient déjà ailleurs ? Loin, dans l’équivalent terrestre du Jardin d’Allah, mangeant des figues et des dattes, tous vêtus de blanc en symbole de leur virginité retrouvée ? À l’aise, dans un pays où l’on torture, c’est vrai mais pas n’importe qui...
Les rapaces corporatifs vont prendre leur essor d’abord, mais on fera une place ensuite à l’initiative personnelle ; surveillez bien, dans leur sillage, tous ces décideurs, organisateurs et profiteurs du massacre en Irak, probablement Cheney le premier, qui comprendront que leur arthrite, leur goutte ou leur coeur artificiel leur impose un long voyage dans un climat sec. Plus sec que la Floride, plus sec que Hawaii... Dubaï.
Pierre JC Allard
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